Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
Les souliers du mort (Ботинки мертвеца) читать книгу онлайн
продолжение серии книг про Фантомаса
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C’était la directrice d’une de ces œuvres d’hospitalisation où il est d’usage d’envoyer les orphelins des officiers ministériels.
On l’appelait : « marquise » et elle avait, en effet, un nom ronflant, appartenant à la meilleure société. Des revers de fortune l’avaient contrainte, assurait-on, à se dévouer à l’éducation de ces pauvres petits, dont elle assumait la charge et la responsabilité.
La grosse dame s’était réveillée pour la cérémonie du tirage de la loterie.
Lorsque tout le monde fut installé, elle murmura quelques mots à l’oreille du président, et M e Masson, de sa voix chevrotante, déclara :
— Mesdames et messieurs, nous allons procéder maintenant au tirage de la loterie, organisée au profit de la caisse de notre société de secours. Le gouvernement a bien voulu nous autoriser à tirer cette loterie, bien que ces sortes d’opérations soient interdites par la loi. Je rappelle qu’il y a quatre lots. Le premier, le plus important, un lot de deux cent mille francs, sera gagné par le premier numéro sortant de cette roue que vous voyez ici, à ma droite. Nous procéderons de même pour les autres lots, qui sont respectivement de cinquante mille, vingt mille et dix mille francs.
On applaudit un peu. M e Masson reprit ensuite :
— Il nous faut une main innocente pour tirer les quatre numéros qui doivent constituer le chiffre du billet gagnant. Et nous avons pensé que nous ne pouvions faire un meilleur choix que de désigner, pour remplir cette délicate besogne, le plus jeune de nos pupilles : Claude Villars, fils d’un avoué de Remiremont, orphelin de père et de mère, et confié à nos soins depuis dix-huit mois. Claude Villars vient d’avoir treize ans avant-hier.
On applaudissait à tout rompre, de bonnes vieilles dames en avaient les larmes aux yeux. M e Masson mit ses lunettes, se pencha par-dessus la table, esquissa un sourire qui ressemblait à une grimace, et, d’un ton aussi doux que possible, il murmura :
— Voulez-vous monter, mon petit ami ?
Le président n’obtint point de réponse.
En face de lui, au premier rang, un enfant, à ces mots, était devenu cramoisi. C’était le petit Claude Villars, mais il ne bronchait pas, tant il était intimidé. Sans succès, M e Masson répéta son invitation et il fallut l’intervention de l’énorme dame qui portait un titre et un nom ronflants, pour décider le gamin à venir sur l’estrade. Il y grimpa en trébuchant, se prit le pied dans le tapis vert, manqua d’attirer par terre la carafe et le verre d’eau. Ce premier danger écarté, il éprouva le besoin de se moucher, ce qu’il fit avec une sonorité qui déchaîna l’hilarité dans la salle.
Alors, le petit Claude Villars se mit à pleurer et bégaya d’une voix pointue :
— J’en ai assez, je veux m’en aller.
Mais des personnes charitables l’entouraient, et M e Masson lui-même trouvait des arguments convaincants pour décider l’enfant à s’approcher de la grande roue métallique et à y remplir sa mission.
Il y eut encore de nouveaux ennuis. L’enfant ne voulait pas introduire sa main dans le trou ménagé aux roues du cylindre. Il avait peur d’être mordu par une bête et il le répétait avec entêtement.
Il fallut qu’au mépris de tous les principes qui font force de loi dans semblable circonstance, l’énorme dame qui le chaperonnait, plongeât son avant-bras rougeaud dans la grande roue pour lui montrer qu’il n’y avait pas de danger.
Enfin, l’enfant se rassura. On le jucha sur une chaise, et, de plus en plus cramoisi, il introduisit la main dans l’intérieur de la roue.
— Surtout, lui recommandait M e Masson ne prends qu’un numéro à la fois.
Et il lui expliquait :
— Ce sont des petites boules toutes pareilles, que tu dois sentir sous tes doigts.
L’enfant avait compris, il sortit une boule et, dès lors, le silence se fit dans l’assistance, on aurait entendu voler une mouche.
L’enfant tenait la boule dans la main, il la tendit au président ; M e Masson avait ajusté ses lunettes sur son nez, il lut le numéro inscrit :
— 6.
Il y eut une rumeur et, cependant que les uns soupiraient avec satisfaction car les billets dont ils étaient titulaires commençaient par un six, les autres avaient un air navré, s’apercevant qu’ils étaient déjà écartés de toute chance puisque leur série était d’un autre chiffre.
— Encore une boule ? demanda M e Masson.
Et l’enfant s’étant exécuté, le président lut à nouveau :
— 6.
Il expliqua :
— Cela fait 66. Il nous faut quatre chiffres.
Une troisième fois, l’enfant sortit encore un 6.
— 666, proclama d’un ton impassible M e Masson.
Il se tourna du côté de Claude Villars et, par manière de plaisanterie, lui recommanda :
— Tâche de sortir autre chose pour varier.
L’enfant souriait sans comprendre. Il plongea la main dans la roue, amena la quatrième boule.
— Ah par exemple !… s’écria M e Masson, après avoir lu le numéro, c’est encore la même chose, c’est un 6.
Puis, solennellement :
— Le numéro 6 666 gagne le lot de deux cent mille francs.
Ce fut un brouhaha intense et, désormais on chuchotait dans la salle. On s’interrogeait :
— Le titulaire est-il parmi nous ? Connaît-on le porteur du 6 666 ?
Du fond de la salle, une voix s’éleva, tremblante :
— Le 6 666, fit un personnage qui se levait, c’est moi qui l’ai.
Tout le monde se retourna, le regarda. C’était M e Gauvin.
Le notaire était tout pâle, assurément stupéfait du résultat qui venait de se produire.
— M e Gauvin, murmurait-on de tout côté, le notaire de Vernon, le père de ce jeune homme qui… de ce jeune homme que…
Et des paires d’yeux curieux se braquaient sur lui.
M e Gauvin était fort gêné. Après avoir annoncé qu’il détenait ce numéro, il consulta une liste qu’il tenait à la main, cependant qu’il murmurait :
— Mais ce n’est pas moi qui ai gagné, c’est un de mes clients.
— Lequel ? demanda le président, veuillez nous donner son nom, maître Gauvin ?
Le notaire de Vernon s’était peu à peu rapproché de l’estrade, fendant péniblement la foule.
Soudain, il s’arrêta net, poussa un cri de surprise :
— Ah mon Dieu ! murmura-t-il.
On s’empressa autour de lui. Là voix du président se fit entendre :
— Mesdames messieurs, je vous en prie, ordonna M e Masson, laissez approcher notre collègue.
Puis, M e Gauvin ayant fait quelques pas vers lui, le président lui demanda :
— Quel est le gagnant ?
Alors, Gauvin, d’une voix toute blanche, déclara :
— Ce billet, le 6 666, je l’avais vendu à l’un de mes clients, à M. Baraban, qui a péri si tragiquement.
17 – LES VISITES NOCTURNES
Il devait être tout près de minuit et, dans leur paisible maison de Vernon, Alice et Fernand Ricard dormaient profondément, rêvant peut-être des félicités qu’allait immanquablement leur apporter l’héritage de leur oncle qui, ce même soir, quoique mort, gagnait à la loterie des notaires, une somme de deux cent mille francs, ce qu’ils ignoraient encore.
Le courtier en vins et sa femme ignoraient naturellement aussi la découverte du mouchoir sanglant qu’Havard et Juve avaient faite rue Richer et se croyaient donc bien tranquilles, assurés d’une impunité absolue, à l’abri de tout soupçon, et leur repos était en conséquence fort paisible.
Soudain, dans le silence ouaté de la pièce, des pas furtifs semblèrent glisser sur les tapis.
Quelqu’un était donc entré dans la villa ? Peut-être.
Il y eut soudain, malgré les rideaux tirés, un grand jet de lumière.
D’où venait-il ?
Tout simplement de la petite lampe électrique portative que tenait un personnage, un homme vêtu de noir, qui, maintenant, se trouvait au pied du lit et regardait dormir, un sourire railleur errant sur ses lèvres, Fernand Ricard et sa femme.