Les trois mousquetaires
Les trois mousquetaires читать книгу онлайн
On ne pr?sente pas Les Trois Mousquetaires. Ce roman, ?crit en 1844, est en effet le plus c?l?bre de Dumas. Rappelons simplement qu’il s’agit du premier d’une trilogie, les deux suivants ?tant Vingt ans apr?s et Le vicomte de Bragelonne.
Внимание! Книга может содержать контент только для совершеннолетних. Для несовершеннолетних чтение данного контента СТРОГО ЗАПРЕЩЕНО! Если в книге присутствует наличие пропаганды ЛГБТ и другого, запрещенного контента - просьба написать на почту [email protected] для удаления материала
Porthos remarqua un dernier combat entre l’amour et l’avarice.
«Et comme, continua-t-il, la duchesse que vous venez de voir à l’église a ses terres près des miennes, nous ferons le voyage ensemble. Les voyages, vous le savez, paraissent beaucoup moins longs quand on les fait à deux.
– Vous n’avez donc point d’amis à Paris, monsieur Porthos? dit la procureuse.
– J’ai cru en avoir, dit Porthos en prenant son air mélancolique, mais j’ai bien vu que je me trompais.
– Vous en avez, monsieur Porthos, vous en avez, reprit la procureuse dans un transport qui la surprit elle-même; revenez demain à la maison. Vous êtes le fils de ma tante, mon cousin par conséquent; vous venez de Noyon en Picardie, vous avez plusieurs procès à Paris, et pas de procureur. Retiendrez-vous bien tout cela?
– Parfaitement, madame.
– Venez à l’heure du dîner.
– Fort bien.
– Et tenez ferme devant mon mari, qui est retors, malgré ses soixante-seize ans.
– Soixante-seize ans! peste! le bel âge! reprit Porthos.
– Le grand âge, vous voulez dire, monsieur Porthos. Aussi le pauvre cher homme peut me laisser veuve d’un moment à l’autre, continua la procureuse en jetant un regard significatif à Porthos. Heureusement que, par contrat de mariage, nous nous sommes tout passé au dernier vivant.
– Tout? dit Porthos.
– Tout.
– Vous êtes femme de précaution, je le vois, ma chère madame Coquenard, dit Porthos en serrant tendrement la main de la procureuse.
– Nous sommes donc réconciliés, cher monsieur Porthos? dit-elle en minaudant.
– Pour la vie, répliqua Porthos sur le même air.
– Au revoir donc, mon traître.
– Au revoir, mon oublieuse.
– À demain, mon ange!
– À demain, flamme de ma vie!»
CHAPITRE XXX
D’Artagnan avait suivi Milady sans être aperçu par elle: il la vit monter dans son carrosse, et il l’entendit donner à son cocher l’ordre d’aller à Saint-Germain.
Il était inutile d’essayer de suivre à pied une voiture emportée au trot de deux vigoureux chevaux. D’Artagnan revint donc rue Férou.
Dans la rue de Seine, il rencontra Planchet, qui était arrêté devant la boutique d’un pâtissier, et qui semblait en extase devant une brioche de la forme la plus appétissante.
Il lui donna l’ordre d’aller seller deux chevaux dans les écuries de M. de Tréville, un pour lui d’Artagnan, l’autre pour lui Planchet, et de venir le joindre chez Athos, - M. de Tréville, une fois pour toutes, ayant mis ses écuries au service de d’Artagnan.
Planchet s’achemina vers la rue du Colombier, et d’Artagnan vers la rue Férou. Athos était chez lui, vidant tristement une des bouteilles de ce fameux vin d’Espagne qu’il avait rapporté de son voyage en Picardie. Il fit signe à Grimaud d’apporter un verre pour d’Artagnan, et Grimaud obéit comme d’habitude.
D’Artagnan raconta alors à Athos tout ce qui s’était passé à l’église entre Porthos et la procureuse, et comment leur camarade était probablement, à cette heure, en voie de s’équiper.
«Quant à moi, répondit Athos à tout ce récit, je suis bien tranquille, ce ne seront pas les femmes qui feront les frais de mon harnais.
– Et cependant, beau, poli, grand seigneur comme vous l’êtes, mon cher Athos, il n’y aurait ni princesses, ni reines à l’abri de vos traits amoureux.
– Que ce d’Artagnan est jeune!» dit Athos en haussant les épaules.
Et il fit signe à Grimaud d’apporter une seconde bouteille.
En ce moment, Planchet passa modestement la tête par la porte entrebâillée, et annonça à son maître que les deux chevaux étaient là.
«Quels chevaux? demanda Athos.
– Deux que M. de Tréville me prête pour la promenade, et avec lesquels je vais aller faire un tour à Saint-Germain.
– Et qu’allez-vous faire à Saint-Germain?» demanda encore Athos.
Alors d’Artagnan lui raconta la rencontre qu’il avait faite dans l’église, et comment il avait retrouvé cette femme qui, avec le seigneur au manteau noir et à la cicatrice près de la tempe, était sa préoccupation éternelle.
«C’est-à-dire que vous êtes amoureux de celle-là, comme vous l’étiez de Mme Bonacieux, dit Athos en haussant dédaigneusement les épaules, comme s’il eût pris en pitié la faiblesse humaine.
– Moi, point du tout! s’écria d’Artagnan. Je suis seulement curieux d’éclaircir le mystère auquel elle se rattache. Je ne sais pourquoi, je me figure que cette femme, tout inconnue qu’elle m’est et tout inconnu que je lui suis, a une action sur ma vie.
– Au fait, vous avez raison, dit Athos, je ne connais pas une femme qui vaille la peine qu’on la cherche quand elle est perdue. Mme Bonacieux est perdue, tant pis pour elle! qu’elle se retrouve!
– Non, Athos, non, vous vous trompez, dit d’Artagnan; j’aime ma pauvre Constance plus que jamais, et si je savais le lieu où elle est, fût-elle au bout du monde, je partirais pour la tirer des mains de ses ennemis; mais je l’ignore, toutes mes recherches ont été inutiles. Que voulez-vous, il faut bien se distraire.
– Distrayez-vous donc avec Milady, mon cher d’Artagnan; je le souhaite de tout mon cœur, si cela peut vous amuser.
– Écoutez, Athos, dit d’Artagnan, au lieu de vous tenir enfermé ici comme si vous étiez aux arrêts, montez à cheval et venez vous promener avec moi à Saint-Germain.
– Mon cher, répliqua Athos, je monte mes chevaux quand j’en ai, sinon je vais à pied.
– Eh bien, moi, répondit d’Artagnan en souriant de la misanthropie d’Athos, qui dans un autre l’eût certainement blessé, moi, je suis moins fier que vous, je monte ce que je trouve. Ainsi, au revoir, mon cher Athos.
– Au revoir», dit le mousquetaire en faisant signe à Grimaud de déboucher la bouteille qu’il venait d’apporter.
D’Artagnan et Planchet se mirent en selle et prirent le chemin de Saint-Germain.
Tout le long de la route, ce qu’Athos avait dit au jeune homme de Mme Bonacieux lui revenait à l’esprit. Quoique d’Artagnan ne fût pas d’un caractère fort sentimental, la jolie mercière avait fait une impression réelle sur son cœur: comme il le disait, il était prêt à aller au bout du monde pour la chercher. Mais le monde a bien des bouts, par cela même qu’il est rond; de sorte qu’il ne savait de quel côté se tourner.
En attendant, il allait tâcher de savoir ce que c’était que Milady. Milady avait parlé à l’homme au manteau noir, donc elle le connaissait. Or, dans l’esprit de d’Artagnan, c’était l’homme au manteau noir qui avait enlevé Mme Bonacieux une seconde fois, comme il l’avait enlevée une première. D’Artagnan ne mentait donc qu’à moitié, ce qui est bien peu mentir, quand il disait qu’en se mettant à la recherche de Milady, il se mettait en même temps à la recherche de Constance.
Tout en songeant ainsi et en donnant de temps en temps un coup d’éperon à son cheval, d’Artagnan avait fait la route et était arrivé à Saint-Germain. Il venait de longer le pavillon où, dix ans plus tard, devait naître Louis XIV. Il traversait une rue fort déserte, regardant à droite et à gauche s’il ne reconnaîtrait pas quelque vestige de sa belle Anglaise, lorsque au rez-de-chaussée d’une jolie maison qui, selon l’usage du temps, n’avait aucune fenêtre sur la rue, il vit apparaître une figure de connaissance. Cette figure se promenait sur une sorte de terrasse garnie de fleurs. Planchet la reconnut le premier. «Eh! monsieur dit-il s’adressant à d’Artagnan, ne vous remettez-vous pas ce visage qui baye aux corneilles?
– Non, dit d’Artagnan; et cependant je suis certain que ce n’est point la première fois que je le vois, ce visage.
– Je le crois pardieu bien, dit Planchet: c’est ce pauvre Lubin, le laquais du comte de Wardes, celui que vous avez si bien accommodé il y a un mois, à Calais, sur la route de la maison de campagne du gouverneur.