Les trois mousquetaires
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On ne pr?sente pas Les Trois Mousquetaires. Ce roman, ?crit en 1844, est en effet le plus c?l?bre de Dumas. Rappelons simplement qu’il s’agit du premier d’une trilogie, les deux suivants ?tant Vingt ans apr?s et Le vicomte de Bragelonne.
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– C’est ce que nous avions pensé aussi, monsieur; comme la maison est fort régulière et que nous faisons nos comptes toutes les semaines, au bout de huit jours nous lui avons présenté notre note; mais il paraît que nous sommes tombés dans un mauvais moment, car, au premier mot que nous avons prononcé sur la chose, il nous a envoyés à tous les diables; il est vrai qu’il avait joué la veille.
– Comment, il avait joué la veille! et avec qui?
– Oh! mon Dieu, qui sait cela? avec un seigneur qui passait et auquel il avait fait proposer une partie de lansquenet.
– C’est cela, le malheureux aura tout perdu.
– Jusqu’à son cheval, monsieur, car lorsque l’étranger a été pour partir, nous nous sommes aperçus que son laquais sellait le cheval de M. Porthos. Alors nous lui en avons fait l’observation, mais il nous a répondu que nous nous mêlions de ce qui ne nous regardait pas et que ce cheval était à lui. Nous avons aussitôt fait prévenir M. Porthos de ce qui se passait, mais il nous à fait dire que nous étions des faquins de douter de la parole d’un gentilhomme, et que, puisque celui-là avait dit que le cheval était à lui, il fallait bien que cela fût.
– Je le reconnais bien là, murmura d’Artagnan.
– Alors, continua l’hôte, je lui fis répondre que du moment où nous paraissions destinés à ne pas nous entendre à l’endroit du paiement, j’espérais qu’il aurait au moins la bonté d’accorder la faveur de sa pratique à mon confrère le maître de l’Aigle d’Or; mais M. Porthos me répondit que mon hôtel étant le meilleur, il désirait y rester.
«Cette réponse était trop flatteuse pour que j’insistasse sur son départ. Je me bornai donc à le prier de me rendre sa chambre, qui est la plus belle de l’hôtel, et de se contenter d’un joli petit cabinet au troisième. Mais à ceci M. Porthos répondit que, comme il attendait d’un moment à l’autre sa maîtresse, qui était une des plus grandes dames de la cour, je devais comprendre que la chambre qu’il me faisait l’honneur d’habiter chez moi était encore bien médiocre pour une pareille personne.
«Cependant, tout en reconnaissant la vérité de ce qu’il disait, je crus devoir insister; mais, sans même se donner la peine d’entrer en discussion avec moi, il prit son pistolet, le mit sur sa table de nuit et déclara qu’au premier mot qu’on lui dirait d’un déménagement quelconque à l’extérieur ou à l’intérieur, il brûlerait la cervelle à celui qui serait assez imprudent pour se mêler d’une chose qui ne regardait que lui. Aussi, depuis ce temps-là, monsieur, personne n’entre plus dans sa chambre, si ce n’est son domestique.
– Mousqueton est donc ici?
– Oui, monsieur; cinq jours après son départ, il est revenu de fort mauvaise humeur de son côté; il paraît que lui aussi a eu du désagrément dans son voyage. Malheureusement, il est plus ingambe que son maître, ce qui fait que pour son maître il met tout sens dessus dessous, attendu que, comme il pense qu’on pourrait lui refuser ce qu’il demande, il prend tout ce dont il a besoin sans demander.
– Le fait est, répondit d’Artagnan, que j’ai toujours remarqué dans Mousqueton un dévouement et une intelligence très supérieurs.
– Cela est possible, monsieur; mais supposez qu’il m’arrive seulement quatre fois par an de me trouver en contact avec une intelligence et un dévouement semblables, et je suis un homme ruiné.
– Non, car Porthos vous paiera.
– Hum! fit l’hôtelier d’un ton de doute.
– C’est le favori d’une très grande dame qui ne le laissera pas dans l’embarras pour une misère comme celle qu’il vous doit.
– Si j’ose dire ce que je crois là-dessus…
– Ce que vous croyez?
– Je dirai plus: ce que je sais.
– Ce que vous savez?
– Et même ce dont je suis sûr.
– Et de quoi êtes-vous sûr, voyons?
– Je dirai que je connais cette grande dame.
– Vous?
– Oui, moi.
– Et comment la connaissez-vous?
– Oh! monsieur, si je croyais pouvoir me fier à votre discrétion…
– Parlez, et foi de gentilhomme, vous n’aurez pas à vous repentir de votre confiance.
– Eh bien, monsieur, vous concevez, l’inquiétude fait faire bien des choses.
– Qu’avez-vous fait?
– Oh! d’ailleurs, rien qui ne soit dans le droit d’un créancier.
– Enfin?
– M. Porthos nous a remis un billet pour cette duchesse, en nous recommandant de le jeter à la poste. Son domestique n’était pas encore arrivé. Comme il ne pouvait pas quitter sa chambre, il fallait bien qu’il nous chargeât de ses commissions.
– Ensuite?
– Au lieu de mettre la lettre à la poste, ce qui n’est jamais bien sûr, j’ai profité de l’occasion de l’un de mes garçons qui allait à Paris, et je lui ai ordonné de la remettre à cette duchesse elle-même. C’était remplir les intentions de M. Porthos, qui nous avait si fort recommandé cette lettre, n’est-ce pas?
– À peu près.
– Eh bien, monsieur, savez-vous ce que c’est que cette grande dame?
– Non; j’en ai entendu parler à Porthos, voilà tout.
– Savez-vous ce que c’est que cette prétendue duchesse?
– Je vous le répète, je ne la connais pas.
– C’est une vieille procureuse au Châtelet, monsieur, nommée Mme Coquenard, laquelle a au moins cinquante ans, et se donne encore des airs d’être jalouse. Cela me paraissait aussi fort singulier, une princesse qui demeure rue aux Ours.
– Comment savez-vous cela?
– Parce qu’elle s’est mise dans une grande colère en recevant la lettre, disant que M. Porthos était un volage, et que c’était encore pour quelque femme qu’il avait reçu ce coup d’épée.
– Mais il a donc reçu un coup d’épée?
– Ah! mon Dieu! qu’ai-je dit là?
– Vous avez dit que Porthos avait reçu un coup d’épée.
– Oui; mais il m’avait si fort défendu de le dire!
– Pourquoi cela?
– Dame! monsieur, parce qu’il s’était vanté de perforer cet étranger avec lequel vous l’avez laisse en dispute, et que c’est cet étranger, au contraire, qui, malgré toutes ses rodomontades, l’a couché sur le carreau. Or, comme M. Porthos est un homme fort glorieux, excepté envers la duchesse, qu’il avait cru intéresser en lui faisant le récit de son aventure, il ne veut avouer à personne que c’est un coup d’épée qu’il a reçu.
– Ainsi c’est donc un coup d’épée qui le retient dans son lit?
– Et un maître coup d’épée, je vous l’assure. Il faut que votre ami ait l’âme chevillée dans le corps.
– Vous étiez donc là?
– Monsieur, je les avais suivis par curiosité, de sorte que j’ai vu le combat sans que les combattants me vissent.
– Et comment cela s’est-il passé?
– Oh! la chose n’a pas été longue, je vous en réponds. Ils se sont mis en garde; l’étranger a fait une feinte et s’est fendu; tout cela si rapidement, que lorsque M. Porthos est arrivé à la parade, il avait déjà trois pouces de fer dans la poitrine. Il est tombé en arrière. L’étranger lui a mis aussitôt la pointe de son épée à la gorge; et M. Porthos, se voyant à la merci de son adversaire, s’est avoué vaincu. Sur quoi, l’étranger lui a demandé son nom et apprenant qu’il s’appelait M. Porthos, et non M. d’Artagnan, lui a offert son bras, l’a ramené à l’hôtel, est monté à cheval et a disparu.
– Ainsi c’est à M. d’Artagnan qu’en voulait cet étranger?
– Il paraît que oui.
– Et savez-vous ce qu’il est devenu?
– Non; je ne l’avais jamais vu jusqu’à ce moment et nous ne l’avons pas revu depuis.
– Très bien; je sais ce que je voulais savoir. Maintenant, vous dites que la chambre de Porthos est au premier, n° 1?
– Oui, monsieur, la plus belle de l’auberge; une chambre que j’aurais déjà eu dix fois l’occasion de louer.
– Bah! tranquillisez vous, dit d’Artagnan en riant; Porthos vous paiera avec l’argent de la duchesse Coquenard.
– Oh! monsieur, procureuse ou duchesse, si elle lâchait les cordons de sa bourse, ce ne serait rien; mais elle a positivement répondu qu’elle était lasse des exigences et des infidélités de M. Porthos, et qu’elle ne lui enverrait pas un denier.