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La main coupee (Отрезанная рука)

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La main coupee (Отрезанная рука)
Название: La main coupee (Отрезанная рука)
Дата добавления: 15 январь 2020
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La main coupee (Отрезанная рука) - читать бесплатно онлайн , автор Аллен Марсель

продолжение серии книг про Фантомаса

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Le brave chemineau marchait pacifiquement entre deux gardiens de la paix qui, lentement, de leurs pas paisibles de montagnards, l’avaient conduit au fort Saint-Antoine, l’unique prison de la Principauté.

Sur les ordres de Juve, Bouzille avait été confié à la police et immédiatement incarcéré.

Bouzille n’avait compris qu’une chose, c’est qu’il s’était mis dans un mauvais cas en encourant la colère de Juve, mais le bonhomme, lorsqu’il interrogeait sa conscience, était obligé de reconnaître qu’il n’y avait guère eu moyen pour lui de faire autrement. Il se serait alors attiré la haine de l’officier russe et n’aurait pas obtenu de la générosité de ce prisonnier les trois louis d’or qui tintaient joyeusement au fond de sa poche.

Certes, il allait en prison, mais cette petite fortune était une consolation.

— Allons, Bouzille, avait déclaré l’un des hommes qui le conduisaient, au moment où le petit groupe arrivait dans un bureau à l’entrée de la prison, déclinez à monsieur vos nom, prénoms et qualités, afin que l’on soit fixé sur votre identité exacte.

— Je connais ça, fit Bouzille, cela se passe ici comme à Paris. Seulement on est moins de monde et puis les bureaux ne sont pas aussi bien tenus qu’à Fresnes ou à la Santé.

Et Bouzille, d’un air méprisant, surveillait le petit employé qui, émergeant d’un réduit obscur, examinait à la lueur de la lampe fumeuse les papiers crasseux que lui tendait le prisonnier.

Il demanda ensuite aux agents en les regardant craintivement par-dessus ses lunettes :

— Vous avez un mandat d’arrêt ?

Les gardiens de la paix produisirent un document et, aussitôt, le vieil employé, hochant la tête, appuya sur un timbre qui retentit au loin, dans la sonorité des couloirs vides.

Deux gardiens apparurent à l’entrée du greffe et saluèrent.

Le vieux petit employé ordonna :

— Conduisez ce détenu, cellule 32 à la 4e division.

Les geôliers aussitôt saisirent Bouzille par l’épaule et l’entraînèrent dans les couloirs cependant que, demeurés au greffe, les agents se faisaient donner décharge de leur prisonnier.

Bouzille, nullement intimidé, avec une curiosité amusée, considérait le bâtiment qu’il allait désormais habiter pour une durée indéterminée.

De temps à autre il grommelait, lançant des coups d’œil furtifs du côté de ses geôliers pour voir s’ils étaient décidés à lier conversation :

— C’est pas mal ici. C’est chauffé, c’est tranquille, ces messieurs de la direction ont l’air très aimable.

Mais comme les geôliers ne bronchaient, pas affectant un air sévère, et pour montrer aussi qu’il venait de loin, qu’il avait beaucoup voyagé, Bouzille ajoutait, parlant à haute voix :

— C’est tout de même moins bien qu’à Paris et même qu’à Bruxelles. On dirait plutôt une maison d’arrêt de province, comme celle de Lille, d’Avignon ou de La Rochelle.

Bouzille pensa tout bas :

— Pourvu que j’aie une bonne cellule et que je ne m’ennuie pas trop.

Le chemineau n’osait espérer qu’on lui donnerait un compagnon.

Aussi, lorsque les gardiens ouvrirent la porte de la cellule 32, le chemineau poussa-t-il un cri de joie :

La cellule était à deux places et déjà quelqu’un s’y trouvait.

— Entrez là, dit le gardien. Vous serez vite jugé ici, on ne fait pas beaucoup de prévention car les malfaiteurs sont rares, heureusement, et le tribunal ne tarde pas à statuer sur leur sort. La plupart du temps on les expulse ou on les renvoie dans les prisons de France. Et tâchez de vous tenir tranquille, nous n’aimons pas le tapage.

Il ajouta, paternel et conciliant :

— Avez-vous mangé, ce soir ?

— Ma foi, dit Bouzille, j’ai bien avalé quelques radis en guise d’apéritif, mais il ne me déplairait pas de m’introduire une bonne soupe dans l’estomac.

— Il n’y a pas de soupe, fit le gardien, il y a des haricots, si vous en voulez.

— Va pour les haricots, dit Bouzille. Et il ajouta :

— C’est toujours la même chose. Les prisons c’est comme les wagons-restaurants : on ne change jamais de menu. Par exemple, c’est moins cher pour la clientèle que dans les trains de luxe.

L’un des gardiens, qui s’était éloigné pour aller chercher à Bouzille sa marmite de légumes secs, revint au bout d’un instant.

Bouzille ne s’était pas encore avancé dans la cellule.

Lorsqu’il fut en possession de son dîner et aussi de la cruche d’eau destinée à le désaltérer, deux tours de clef donnés vigoureusement lui apprirent qu’il était désormais incarcéré et dès lors Bouzille se préoccupa de lier conversation avec son compagnon :

— J’ai bien l’honneur, fit-il, de saluer monsieur et je dois dire à monsieur que je m’appelle Bouzille, des fois qu’il aurait entendu parler de moi.

L’homme, qu’interpellait ainsi le chemineau se retournait d’une pièce et Bouzille en l’apercevant poussa un cri de stupéfaction.

— Ah, par exemple, s’écria-t-il, comme on se retrouve, mais c’est le signor Mario Isolino. Vrai, ça me fait plaisir de vous revoir. Décidément, il n’y a pas comme les prisons pour y retrouver les aminches.

Le bonneteur, après avoir été surpris de cette brusque et cordiale apostrophe reconnut, lui aussi, son interlocuteur.

— Io souis bien content de vous voir, Bouzille, io souis bien content.

Le bonneteur expliqua au chemineau que depuis huit jours il se trouvait sur la paille humide du cachot, représentée d’ailleurs par un parquet bien ciré et un lit de sangle, un peu étroit, sans doute, mais propre et confortable.

Toutefois, Bouzille s’évertuait en vain à obtenir les confidences du bonneteur.

Celui-ci ne tenait pas à raconter les motifs pour lesquels il avait été incarcéré et au surplus, il paraissait tellement soucieux, qu’évidemment aucune autre idée nette et précise que celle qui le préoccupait ne pouvait alimenter son esprit :

— Mario, insista cependant Bouzille qui désormais adoptait le tutoiement, Mario, tu me caches quelque chose, jamais je ne t’ai vu aussi lugubre.

Pris d’une crainte subite, le chemineau demanda :

— Est-ce que par hasard les gens d’ici sont sévères ou désagréables ? Est-ce qu’on vous fait des misères ?

— Io souis ici comme le coq dedans la pâte. Io souis plus heureux qu’un roi, dit Mario, mais io souis triste pour une autre raison.

— Laquelle ?

Mario Isolino se leva, mit un doigt sur sa bouche, puis mystérieusement vint confier à l’oreille du chemineau :

— Io souis obligé de m’évader cette nouit.

— De t’évader, s’écria Bouzille, mais c’est très agréable.

— Hélas, proféra le bonneteur, en levant les yeux au ciel et en joignant les mains dans une attitude de prière désespérée, io souis zépouvanté à cette idée car oune chose terrible m’attend après mon évasion.

— Raconte.

Le récit de Mario revenait à ceci :

À peine entrait-il en prison qu’il avait reçu dans sa cellule la visite d’une dame appartenant, disait-elle, à la Société de Relèvement des Criminels Endurcis. Elle était autorisée à visiter ceux-ci dans leurs cachots et à leur prodiguer des principes de Morale et de Devoir destinés à faciliter leur réhabilitation.

Pendant quarante-huit heures, Mario Isolino avait dû écouter en silence des sermons édifiants, qui l’avaient fait bâiller.

Une fois qu’il s’était profondément endormi pendant le discours de la dame, il avait été réveillé en sursaut par une sensation étrange et assurément inattendue.

— Cette dame, déclarait alors Mario Isolino, elle venait de me donner oune baiser sur la bouche.

— Était-elle jolie au moins la dame de Relèvement des Criminels Endurcis ?

Isolino leva les bras au ciel :

— Zolie, fit-il, non pas, elle est vieille, grosse, laide, affreuse. Peut-être, Bouzille, que tu la connais ? c’est M meHéberlauf.

— M meHéberlauf, répondit le chemineau, mon pauv’ vieux.

L’épouse de l’ex-pasteur éprouvait pour Mario une furieuse passion et dès le surlendemain du jour où ils avaient fait connaissance, Mario Isolino n’avait plus eu à affronter les sermons, mais bien à se défendre désespérément des entreprises de la terrible personne.

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