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Les Possedes

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Les Possedes
Название: Les Possedes
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Possedes - читать бесплатно онлайн , автор Dosto?evski Fedor Mikha?lovitch

«Est-il possible de croire? S?rieusement et effectivement? Tout est l?.» Stavroguine envo?te tous ceux qui l'approchent, hommes ou femmes. Il ne trouve de limite ? son immense orgueil que dans l'existence de Dieu. Il la nie et tombe dans l'absurdit? de la libert? pour un homme seul et sans raison d'?tre. Tous les personnages de ce grand roman sont poss?d?s par un d?mon, le socialisme ath?e, le nihilisme r?volutionnaire ou la superstition religieuse. Ignorant les limites de notre condition, ces id?ologies sont incapables de rendre compte de l'homme et de la soci?t? et appellent un terrorisme destructeur. Sombre trag?die d'amour et de mort, «Les Poss?d?s» sont l'incarnation g?niale des doutes et des angoisses de Dosto?evski sur l'avenir de l'homme et de la Russie. D?s 1870, il avait pressenti les dangers du totalitarisme au XXe si?cle.

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Le visiteur sourit.

– À coup sûr on ne vous laissera pas aller à Pétersbourg, quand même je vous donnerais de l’argent pour faire ce voyage… Mais il est temps que je voie Marie Timoféievna.

Il se leva.

– Nicolas Vsévolodovitch, – et quelles sont vos intentions par rapport à Marie Timoféievna?

– Je vous les ai dites.

– Est-il possible que ce soit vrai?

– Vous ne le croyez pas encore?

– Ainsi vous allez me planter là comme une vieille botte hors d’usage?

– Je verrai, répondit en riant Nicolas Vsévolodovitch, – allons, introduisez-moi.

– Voulez-vous que j’aille sur le perron?… ici je pourrais, sans le faire exprès, entendre votre conversation… parce que les chambres sont toutes petites.

– Soit; allez sur le perron. Prenez le parapluie.

– Le vôtre? Suis-je digne de m’abriter dessous?

– Tout le monde est digne d’un parapluie.

– Vous déterminez du coup le minimum des droits de l’homme.

Mais le capitaine prononça ces mots machinalement: il était écrasé, anéanti par les nouvelles qu’il venait d’apprendre. Et pourtant, à peine arrivé sur le perron, cet homme aussi roué qu’inconsistant se reprit à espérer, l’idée lui revint que Nicolas Vsévolodovitch cherchait à lui donner le change par des mensonges; s’il en était ainsi, ce n’était pas à lui d’avoir peur, puisqu’on le craignait.

– «S’il ment, s’il ruse, quel est son but?» se demandait Lébiadkine. La publication du mariage lui paraissait une absurdité: «Il est vrai que de la part d’un tel monstre rien ne doit étonner; il ne vit que pour faire du mal aux gens. Mais qui sait si lui-même n’a pas peur, depuis l’affront inouï qu’il a reçu l’autre jour? Il craint que je ne révèle son mariage, voilà pourquoi il s’est empressé de venir me dire qu’il allait lui-même le faire connaître. Holà, ne va pas te blouser, Lébiadkine! Et pourquoi venir la nuit, en cachette, quand lui-même désire la publicité? Mais s’il a peur, évidemment c’est depuis peu, son inquiétude doit être toute récente…Eh! gare aux bévues, Lébiadkine!…

«Il m’effraye avec Pierre Stépanovitch. Oh! voilà ce qu’il y a de terrible! Et pourquoi ai-je fait des confidences à Lipoutine? Le diable sait ce que manigancent ces démons, jamais je n’ai pu y voir clair. Ils recommencent à s’agiter comme il y a cinq ans. À qui, il est vrai, les dénoncerais-je? «N’avez-vous pas écrit à quelqu’un par bêtise?» Hum. Ainsi l’on pourrait écrire comme par bêtise? N’est-ce pas un conseil qu’il me donne? «Vous allez pour cela à Pétersbourg.» Le coquin! cette idée ne m’est pas plutôt venue à l’esprit qu’il l’a devinée! On dirait que lui-même, sans en avoir l’air, me pousse à aller là-bas. Il n’y a ici que deux suppositions possibles: ou bien, je le répète, il a peur, parce qu’il s’est mis dans un mauvais cas, ou… ou il ne craint rien pour lui, et il m’excite sourdement à les dénoncer tous! Oh! la conjoncture est délicate, Lébiadkine, prends garde de faire une boulette!…»

Il était si absorbé dans ses réflexions qu’il ne pensa même pas à se mettre aux écoutes. Du reste, il lui aurait été difficile d’entendre la conversation: la porte était massive et à un seul battant; d’autre part, on n’élevait guère la voix; le capitaine ne percevait que des sons indistincts. Il lança un jet de salive et retourna siffler sur le perron.

III

Deux fois plus grande que la pièce occupée par le capitaine, la chambre de Marie Timoféievna ne renfermait pas un mobilier plus élégant; mais la table qui faisait face au divan était couverte d’une nappe de couleur, sur tout le parquet s’étendait un beau tapis, et le lit était masqué par un long rideau vert qui coupait la chambre en deux; il y avait en outre près de la table un grand et moelleux fauteuil sur lequel pourtant Marie Timoféievna n’était pas assise. Ici comme dans le logement de la rue de l’Épiphanie une lampe brûlait dans un coin devant une icône, et sur la table se retrouvaient aussi les mêmes objets: jeu de cartes, miroir, chansonnier, tout jusqu’au petit pain blanc; de plus, on y voyait un album de photographies et deux livres avec des gravures coloriées: l’un était une relation de voyage arrangée à l’usage de la jeunesse, l’autre un recueil d’histoires morales et pour la plupart chevaleresques. Ainsi que l’avait dit le capitaine, sans doute Marie Timoféievna avait attendu le visiteur, mais quand celui-ci entra chez elle, elle dormait, à demi couchée sur le divan. Nicolas Vsévolodovitch ferma sans bruit la porte derrière lui, et, sans bouger de place, se mit à considérer la dormeuse.

Le capitaine avait menti en disant que sa sœur avait fait toilette. Elle portait la robe de couleur sombre que nous lui avons vue chez Barbara Pétrovna. Maintenant comme alors son long cou décharné était à découvert, et ses cheveux étaient réunis sur sa nuque en un chignon minuscule. Le châle noir donné par Barbara Pétrovna était plié soigneusement et reposait sur le divan. Cette fois encore Marie Timoféievna était grossièrement fardée de blanc et de rouge. Moins d’une minute après l’apparition de Nicolas Vsévolodovitch, elle se réveilla soudain comme si elle eût senti son regard sur elle, ouvrit les yeux et se redressa vivement. Mais il est probable que le visiteur éprouvait lui-même une impression étrange: toujours debout près de la porte, il ne proférait pas un mot et ses yeux restaient obstinément fixés sur le visage de Marie Timoféievna. Peut-être avaient-ils quelque chose de particulièrement dur, peut-être exprimaient-ils le dégoût, même une joie maligne de la frayeur ressentie par la folle, ou bien cette dernière, mal éveillée, crut-elle seulement lire cela dans le regard de Nicolas Vsévolodovitch? Quoi qu’il en soit, au bout d’un moment les traits de la pauvre femme prirent une expression de terreur extraordinaire; des convulsions parcoururent son visage, elle leva les bras, les agita, et tout à coup fondit en larmes comme un enfant épouvanté; encore un instant, et elle aurait crié. Mais le visiteur s’arracha à la contemplation, un brusque changement s’opéra dans sa physionomie, et ce fut avec le sourire le plus gracieux qu’il s’approcha de la table:

– Pardon, je vous ai fait peur, Marie Timoféievna, dit-il en lui tendant la main, – j’ai eu tort de venir vous surprendre ainsi au moment de votre réveil.

L’aménité de ce langage produisit son effet. La frayeur de Marie Timoféievna se dissipa, quoiqu’elle continuât à regarder Stavroguine avec appréhension, en faisant de visibles efforts pour comprendre. Elle tendit craintivement sa main. À la fin, un timide sourire se montra sur ses lèvres.

– Bonjour, prince, dit-elle à voix basse, tout en considérant d’un air étrange Nicolas Vsévolodovitch.

– Sans doute vous avez fait un mauvais rêve? reprit-il avec un sourire de plus en plus aimable.

– Mais vous, comment savez-vous que j’ai rêvé de cela?

Et soudain son tremblement de tout à l’heure la ressaisit, elle se rejeta en arrière et leva le bras devant elle comme pour se protéger, peu s’en fallut qu’elle ne fondit de nouveau en larmes.

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