Les trois mousquetaires
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On ne pr?sente pas Les Trois Mousquetaires. Ce roman, ?crit en 1844, est en effet le plus c?l?bre de Dumas. Rappelons simplement qu’il s’agit du premier d’une trilogie, les deux suivants ?tant Vingt ans apr?s et Le vicomte de Bragelonne.
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– Je le crois.
– Cherchons bien: Buckingham mort ou grièvement blessé; votre entretien avec le cardinal entendu des quatre mousquetaires; Lord de Winter prévenu de votre arrivée à Portsmouth; d’Artagnan et Athos à la Bastille; Aramis l’amant de Mme de Chevreuse; Porthos un fat; Mme Bonacieux retrouvée; vous envoyer la chaise le plus tôt possible; mettre mon laquais à votre disposition; faire de vous une victime du cardinal, pour que l’abbesse ne prenne aucun soupçon; Armentières sur les bords de la Lys. Est-ce cela?
– En vérité, mon cher chevalier, vous êtes un miracle de mémoire. À propos, ajoutez une chose…
– Laquelle?
– J’ai vu de très jolis bois qui doivent toucher au jardin du couvent, dites qu’il m’est permis de me promener dans ces bois; qui sait? j’aurai peut-être besoin de sortir par une porte de derrière.
– Vous pensez à tout.
– Et vous, vous oubliez une chose…
– Laquelle?
– C’est de me demander si j’ai besoin d’argent.
– C’est juste, combien voulez-vous?
– Tout ce que vous aurez d’or.
– J’ai cinq cents pistoles à peu près.
– J’en ai autant: avec mille pistoles on fait face à tout; videz vos poches.
– Voilà, comtesse.
– Bien, mon cher comte! et vous partez…?
– Dans une heure; le temps de manger un morceau, pendant lequel j’enverrai chercher un cheval de poste.
– À merveille! Adieu, chevalier!
– Adieu, comtesse!
– Recommandez-moi au cardinal, dit Milady.
– Recommandez-moi à Satan», répliqua Rochefort.
Milady et Rochefort échangèrent un sourire et se séparèrent.
Une heure après, Rochefort partit au grand galop de son cheval; cinq heures après il passait à Arras.
Nos lecteurs savent déjà comment il avait été reconnu par d’Artagnan, et comment cette reconnaissance, en inspirant des craintes aux quatre mousquetaires, avait donné une nouvelle activité à leur voyage.
CHAPITRE LXIII
À peine Rochefort fut-il sorti, que Mme Bonacieux rentra. Elle trouva Milady le visage riant.
«Eh bien, dit la jeune femme, ce que vous craigniez est donc arrivé; ce soir ou demain le cardinal vous envoie prendre?
– Qui vous a dit cela, mon enfant? demanda Milady.
– Je l’ai entendu de la bouche même du messager.
– Venez vous asseoir ici près de moi, dit Milady.
– Me voici.
– Attendez que je m’assure si personne ne nous écoute.
– Pourquoi toutes ces précautions?
– Vous allez le savoir.»
Milady se leva et alla à la porte, l’ouvrit, regarda dans le corridor, et revint se rasseoir près de Mme Bonacieux.
«Alors, dit-elle, il a bien joué son rôle.
– Qui cela?
– Celui qui s’est présenté à l’abbesse comme l’envoyé du cardinal.
– C’était donc un rôle qu’il jouait?
– Oui, mon enfant.
– Cet homme n’est donc pas…
– Cet homme, dit Milady en baissant la voix, c’est mon frère.
– Votre frère! s’écria Mme Bonacieux.
– Eh bien, il n’y a que vous qui sachiez ce secret, mon enfant; si vous le confiez à qui que ce soit au monde, je serai perdue, et vous aussi peut-être.
– Oh! mon Dieu!
– Écoutez, voici ce qui se passe: mon frère, qui venait à mon secours pour m’enlever ici de force, s’il le fallait, a rencontré l’émissaire du cardinal qui venait me chercher; il l’a suivi. Arrivé à un endroit du chemin solitaire et écarté, il a mis l’épée à la main en sommant le messager de lui remettre les papiers dont il était porteur; le messager a voulu se défendre, mon frère l’a tué.
– Oh! fit Mme Bonacieux en frissonnant.
– C’était le seul moyen, songez-y. Alors mon frère a résolu de substituer la ruse à la force: il a pris les papiers, il s’est présenté ici comme l’émissaire du cardinal lui-même, et dans une heure ou deux, une voiture doit venir me prendre de la part de Son Éminence.
– Je comprends; cette voiture, c’est votre frère qui vous l’envoie.
– Justement; mais ce n’est pas tout: cette lettre que vous avez reçue, et que vous croyez de Mme Chevreuse…
– Eh bien?
– Elle est fausse.
– Comment cela?
– Oui, fausse: c’est un piège pour que vous ne fassiez pas de résistance quand on viendra vous chercher.
– Mais c’est d’Artagnan qui viendra.
– Détrompez-vous, d’Artagnan et ses amis sont retenus au siège de La Rochelle.
– Comment savez-vous cela?
– Mon frère a rencontré des émissaires du cardinal en habits de mousquetaires. On vous aurait appelée à la porte, vous auriez cru avoir affaire à des amis, on vous enlevait et on vous ramenait à Paris.
– Oh! mon Dieu! ma tête se perd au milieu de ce chaos d’iniquités. Je sens que si cela durait, continua Mme Bonacieux en portant ses mains à son front, je deviendrais folle!
– Attendez…
– Quoi?
– J’entends le pas d’un cheval, c’est celui de mon frère qui repart; je veux lui dire un dernier adieu, venez.»
Milady ouvrit la fenêtre et fit signe à Mme Bonacieux de l’y rejoindre. La jeune femme y alla.
Rochefort passait au galop.
«Adieu, frère», s’écria Milady.
Le chevalier leva la tête, vit les deux jeunes femmes, et, tout courant, fit à Milady un signe amical de la main.
«Ce bon Georges!» dit-elle en refermant la fenêtre avec une expression de visage pleine d’affection et de mélancolie.
Et elle revint s’asseoir à sa place, comme si elle eût été plongée dans des réflexions toutes personnelles.
«Chère dame! dit Mme Bonacieux, pardon de vous interrompre! mais que me conseillez-vous de faire? mon Dieu! Vous avez plus d’expérience que moi, parlez, je vous écoute.
– D’abord, dit Milady, il se peut que je me trompe et que d’Artagnan et ses amis viennent véritablement à votre secours.
– Oh! c’eût été trop beau! s’écria Mme Bonacieux, et tant de bonheur n’est pas fait pour moi!
– Alors, vous comprenez; ce serait tout simplement une question de temps, une espèce de course à qui arrivera le premier. Si ce sont vos amis qui l’emportent en rapidité, vous êtes sauvée; si ce sont les satellites du cardinal, vous êtes perdue.
– Oh! oui, oui, perdue sans miséricorde! Que faire donc? que faire?
– Il y aurait un moyen bien simple, bien naturel…
– Lequel, dites?
– Ce serait d’attendre, cachée dans les environs, et de s’assurer ainsi quels sont les hommes qui viendront vous demander.
– Mais où attendre?
– Oh! ceci n’est point une question: moi-même je m’arrête et je me cache à quelques lieues d’ici en attendant que mon frère vienne me rejoindre; eh bien, je vous emmène avec moi, nous nous cachons et nous attendons ensemble.
– Mais on ne me laissera pas partir, je suis ici presque prisonnière.
– Comme on croit que je pars sur un ordre du cardinal, on ne vous croira pas très pressée de me suivre.
– Eh bien?
– Eh bien, la voiture est à la porte, vous me dites adieu, vous montez sur le marchepied pour me serrer dans vos bras une dernière fois; le domestique de mon frère qui vient me prendre est prévenu, il fait un signe au postillon, et nous partons au galop.
– Mais d’Artagnan, d’Artagnan, s’il vient?
– Ne le saurons-nous pas?
– Comment?
– Rien de plus facile. Nous renvoyons à Béthune ce domestique de mon frère, à qui, je vous l’ai dit, nous pouvons nous fier; il prend un déguisement et se loge en face du couvent: si ce sont les émissaires du cardinal qui viennent, il ne bouge pas; si c’est M. d’Artagnan et ses amis, il les amène où nous sommes.
– Il les connaît donc?
– Sans doute, n’a-t-il pas vu M. d’Artagnan chez moi!
– Oh! oui, oui, vous avez raison; ainsi, tout va bien, tout est pour le mieux; mais ne nous éloignons pas d’ici.
– À sept ou huit lieues tout au plus, nous nous tenons sur la frontière par exemple, et à la première alerte, nous sortons de France.