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Les trois mousquetaires

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Les trois mousquetaires
Название: Les trois mousquetaires
Автор: Dumas Alexandre
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les trois mousquetaires - читать бесплатно онлайн , автор Dumas Alexandre

On ne pr?sente pas Les Trois Mousquetaires. Ce roman, ?crit en 1844, est en effet le plus c?l?bre de Dumas. Rappelons simplement qu’il s’agit du premier d’une trilogie, les deux suivants ?tant Vingt ans apr?s et Le vicomte de Bragelonne.

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Une lumière apparut sous la porte; cette lumière annonçait le retour de ses geôliers. Milady, qui s’était levée, se rejeta vivement sur son fauteuil, la tête renversée en arrière, ses beaux cheveux dénoués et épars, sa gorge demi-nue sous ses dentelles froissées, une main sur son cœur et l’autre pendante.

On ouvrit les verrous, la porte grinça sur ses gonds, des pas retentirent dans la chambre et s’approchèrent.

«Posez là cette table», dit une voix que la prisonnière reconnut pour celle de Felton.

L’ordre fut exécuté.

«Vous apporterez des flambeaux et ferez relever la sentinelle», continua Felton.

Ce double ordre que donna aux mêmes individus le jeune lieutenant prouva à Milady que ses serviteurs étaient les mêmes hommes que ses gardiens, c’est-à-dire des soldats.

Les ordres de Felton étaient, au reste, exécutés avec une silencieuse rapidité qui donnait une bonne idée de l’état florissant dans lequel il maintenait la discipline.

Enfin, Felton, qui n’avait pas encore regardé Milady, se retourna vers elle.

«Ah! ah! dit-il, elle dort, c’est bien: à son réveil elle soupera.»

Et il fit quelques pas pour sortir.

«Mais, mon lieutenant, dit un soldat moins stoïque que son chef, et qui s’était approché de Milady, cette femme ne dort pas.

– Comment, elle ne dort pas? dit Felton, que fait-elle donc, alors?

– Elle est évanouie; son visage est très pâle, et j’ai beau écouter, je n’entends pas sa respiration.

– Vous avez raison, dit Felton après avoir regardé Milady de la place où il se trouvait, sans faire un pas vers elle, allez prévenir Lord de Winter que sa prisonnière est évanouie, car je ne sais que faire, le cas n’ayant pas été prévu.»

Le soldat sortit pour obéir aux ordres de son officier; Felton s’assit sur un fauteuil qui se trouvait par hasard près de la porte et attendit sans dire une parole, sans faire un geste. Milady possédait ce grand art, tant étudié par les femmes, de voir à travers ses longs cils sans avoir l’air d’ouvrir les paupières: elle aperçut Felton qui lui tournait le dos, elle continua de le regarder pendant dix minutes à peu près, et pendant ces dix minutes, l’impassible gardien ne se retourna pas une seule fois.

Elle songea alors que Lord de Winter allait venir et rendre, par sa présence, une nouvelle force à son geôlier: sa première épreuve était perdue, elle en prit son parti en femme qui compte sur ses ressources; en conséquence elle leva la tête, ouvrit les yeux et soupira faiblement.

À ce soupir, Felton se retourna enfin.

«Ah! vous voici réveillée, madame! dit-il, je n’ai donc plus affaire ici! Si vous avez besoin de quelque chose, vous appellerez.

– Oh! mon Dieu, mon Dieu! que j’ai souffert!» murmura Milady avec cette voix harmonieuse qui, pareille à celle des enchanteresses antiques, charmait tous ceux qu’elle voulait perdre.

Et elle prit en se redressant sur son fauteuil une position plus gracieuse et plus abandonnée encore que celle qu’elle avait lorsqu’elle était couchée.

Felton se leva.

«Vous serez servie ainsi trois fois par jour, madame, dit-il: le matin à neuf heures, dans la journée à une heure, et le soir à huit heures. Si cela ne vous convient pas, vous pouvez indiquer vos heures au lieu de celles que je vous propose, et, sur ce point, on se conformera à vos désirs.

– Mais vais-je donc rester toujours seule dans cette grande et triste chambre? demanda Milady.

– Une femme des environs a été prévenue, elle sera demain au château, et viendra toutes les fois que vous désirerez sa présence.

– Je vous rends grâce, monsieur», répondit humblement la prisonnière.

Felton fit un léger salut et se dirigea vers la porte. Au moment où il allait en franchir le seuil, Lord de Winter parut dans le corridor, suivi du soldat qui était allé lui porter la nouvelle de l’évanouissement de Milady. Il tenait à la main un flacon de sels. «Eh bien! qu’est-ce? et que se passe-t-il donc ici? dit-il d’une voix railleuse en voyant sa prisonnière debout et Felton prêt à sortir. Cette morte est-elle donc déjà ressuscitée? Pardieu, Felton, mon enfant, tu n’as donc pas vu qu’on te prenait pour un novice et qu’on te jouait le premier acte d’une comédie dont nous aurons sans doute le plaisir de suivre tous les développements?

– Je l’ai bien pensé, Milord, dit Felton; mais, enfin, comme la prisonnière est femme, après tout, j’ai voulu avoir les égards que tout homme bien né doit à une femme, sinon pour elle, du moins pour lui-même.»

Milady frissonna par tout son corps. Ces paroles de Felton passaient comme une glace par toutes ses veines.

«Ainsi, reprit de Winter en riant, ces beaux cheveux savamment étalés, cette peau blanche et ce langoureux regard ne t’ont pas encore séduit, cœur de pierre?

– Non, Milord, répondit l’impassible jeune homme, et croyez-moi bien, il faut plus que des manèges et des coquetteries de femme pour me corrompre.

– En ce cas, mon brave lieutenant, laissons Milady chercher autre chose et allons souper; ah! sois tranquille, elle a l’imagination féconde et le second acte de la comédie ne tardera pas à suivre le premier.»

Et à ces mots Lord de Winter passa son bras sous celui de Felton et l’emmena en riant.

«Oh! je trouverai bien ce qu’il te faut, murmura Milady entre ses dents; sois tranquille, pauvre moine manqué, pauvre soldat converti qui t’es taillé ton uniforme dans un froc.»

«À propos, reprit de Winter en s’arrêtant sur le seuil de la porte, il ne faut pas, Milady, que cet échec vous ôte l’appétit. Tâtez de ce poulet et de ces poissons que je n’ai pas fait empoisonner, sur l’honneur. Je m’accommode assez de mon cuisinier, et comme il ne doit pas hériter de moi, j’ai en lui pleine et entière confiance. Faites comme moi. Adieu, chère sœur! à votre prochain évanouissement.»

C’était tout ce que pouvait supporter Milady: ses mains se crispèrent sur son fauteuil, ses dents grincèrent sourdement, ses yeux suivirent le mouvement de la porte qui se fermait derrière Lord de Winter et Felton; et, lorsqu’elle se vit seule, une nouvelle crise de désespoir la prit; elle jeta les yeux sur la table, vit briller un couteau, s’élança et le saisit; mais son désappointement fut cruel: la lame en était ronde et d’argent flexible.

Un éclat de rire retentit derrière la porte mal fermée, et la porte se rouvrit.

«Ah! ah! s’écria Lord de Winter; ah! ah! vois-tu bien, mon brave Felton, vois-tu ce que je t’avais dit: ce couteau, c’était pour toi; mon enfant, elle t’aurait tué; vois-tu, c’est un de ses travers, de se débarrasser ainsi, d’une façon ou de l’autre, des gens qui la gênent. Si je t’eusse écouté, le couteau eût été pointu et d’acier: alors plus de Felton, elle t’aurait égorgé et, après toi, tout le monde. Vois donc, John, comme elle sait bien tenir son couteau.»

En effet, Milady tenait encore l’arme offensive dans sa main crispée, mais ces derniers mots, cette suprême insulte, détendirent ses mains, ses forces et jusqu’à sa volonté.

Le couteau tomba par terre.

«Vous avez raison, Milord, dit Felton avec un accent de profond dégoût qui retentit jusqu’au fond du cœur de Milady, vous avez raison et c’est moi qui avais tort.»

Et tous deux sortirent de nouveau.

Mais cette fois, Milady prêta une oreille plus attentive que la première fois, et elle entendit leurs pas s’éloigner et s’éteindre dans le fond du corridor.

«Je suis perdue, murmura-t-elle, me voilà au pouvoir de gens sur lesquels je n’aurai pas plus de prise que sur des statues de bronze ou de granit; ils me savent par cœur et sont cuirassés contre toutes mes armes.

«Il est cependant impossible que cela finisse comme ils l’ont décidé.»

En effet, comme l’indiquait cette dernière réflexion, ce retour instinctif à l’espérance, dans cette âme profonde la crainte et les sentiments faibles ne surnageaient pas longtemps. Milady se mit à table, mangea de plusieurs mets, but un peu de vin d’Espagne, et sentit revenir toute sa résolution.

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