Les trois mousquetaires
Les trois mousquetaires читать книгу онлайн
On ne pr?sente pas Les Trois Mousquetaires. Ce roman, ?crit en 1844, est en effet le plus c?l?bre de Dumas. Rappelons simplement qu’il s’agit du premier d’une trilogie, les deux suivants ?tant Vingt ans apr?s et Le vicomte de Bragelonne.
Внимание! Книга может содержать контент только для совершеннолетних. Для несовершеннолетних чтение данного контента СТРОГО ЗАПРЕЩЕНО! Если в книге присутствует наличие пропаганды ЛГБТ и другого, запрещенного контента - просьба написать на почту [email protected] для удаления материала
– Monsieur le chevalier, de loin ou de près, dit Ketty, je vous aimerai toujours.»
«Où diable la constance va-t-elle se nicher?» murmura Athos.
«Moi aussi, dit d’Artagnan, moi aussi, je t’aimerai toujours, sois tranquille. Mais voyons, réponds-moi. Maintenant j’attache une grande importance à la question que je te fais: n’aurais-tu jamais entendu parler d’une jeune dame qu’on aurait enlevée pendant une nuit.
– Attendez donc… Oh! mon Dieu! monsieur le chevalier, est-ce que vous aimez encore cette femme?
– Non, c’est un de mes amis qui l’aime. Tiens, c’est Athos que voilà.
– Moi! s’écria Athos avec un accent pareil à celui d’un homme qui s’aperçoit qu’il va marcher sur une couleuvre.
– Sans doute, vous! fit d’Artagnan en serrant la main d’Athos. Vous savez bien l’intérêt que nous prenons tous à cette pauvre petite Mme Bonacieux. D’ailleurs Ketty ne dira rien: n’est-ce pas, Ketty? Tu comprends, mon enfant, continua d’Artagnan, c’est la femme de cet affreux magot que tu as vu sur le pas de la porte en entrant ici.
– Oh! mon Dieu! s’écria Ketty, vous me rappelez ma peur; pourvu qu’il ne m’ait pas reconnue!
– Comment, reconnue! tu as donc déjà vu cet homme?
– Il est venu deux fois chez Milady.
– C’est cela. Vers quelle époque?
– Mais il y a quinze ou dix-huit jours à peu près.
– Justement.
– Et hier soir il est revenu.
– Hier soir.
– Oui, un instant avant que vous vinssiez vous-même.
– Mon cher Athos, nous sommes enveloppés dans un réseau d’espions! Et tu crois qu’il t’a reconnue, Ketty?
– J’ai baissé ma coiffe en l’apercevant, mais peut-être était-il trop tard.
– Descendez, Athos, vous dont il se méfie moins que de moi, et voyez s’il est toujours sur sa porte.»
Athos descendit et remonta bientôt.
«Il est parti, dit-il, et la maison est fermée.
– Il est allé faire son rapport, et dire que tous les pigeons sont en ce moment au colombier.
– Eh bien, mais, envolons-nous, dit Athos, et ne laissons ici que Planchet pour nous rapporter les nouvelles.
– Un instant! Et Aramis que nous avons envoyé chercher!
– C’est juste, dit Athos, attendons Aramis.
En ce moment Aramis entra.
On lui exposa l’affaire, et on lui dit comment il était urgent que parmi toutes ses hautes connaissances il trouvât une place à Ketty.
Aramis réfléchit un instant, et dit en rougissant:
«Cela vous rendra-t-il bien réellement service, d’Artagnan.
– Je vous en serai reconnaissant toute ma vie.
– Eh bien, Mme de Bois-Tracy m’a demandé, pour une de ses amies qui habite la province, je crois, une femme de chambre sûre; et si vous pouvez, mon cher d’Artagnan, me répondre de mademoiselle…
– Oh! monsieur, s’écria Ketty, je serai toute dévouée, soyez-en certain, à la personne qui me donnera les moyens de quitter Paris.
– Alors, dit Aramis, cela va pour le mieux.»
Il se mit à une table et écrivit un petit mot qu’il cacheta avec une bague, et donna le billet à Ketty.
«Maintenant, mon enfant, dit d’Artagnan, tu sais qu’il ne fait pas meilleur ici pour nous que pour toi. Ainsi séparons-nous. Nous nous retrouverons dans des jours meilleurs.
– Et dans quelque temps que nous nous retrouvions et dans quelque lieu que ce soit, dit Ketty, vous me retrouverez vous aimant encore comme je vous aime aujourd’hui.»
«Serment de joueur», dit Athos pendant que d’Artagnan allait reconduire Ketty sur l’escalier.
Un instant après, les trois jeunes gens se séparèrent en prenant rendez-vous à quatre heures chez Athos et en laissant Planchet pour garder la maison.
Aramis rentra chez lui, et Athos et d’Artagnan s’inquiétèrent du placement du saphir.
Comme l’avait prévu notre Gascon, on trouva facilement trois cents pistoles sur la bague. De plus, le juif annonça que si on voulait la lui vendre, comme elle lui ferait un pendant magnifique pour des boucles d’oreilles, il en donnerait jusqu’à cinq cents pistoles.
Athos et d’Artagnan, avec l’activité de deux soldats et la science de deux connaisseurs, mirent trois heures à peine à acheter tout l’équipement du mousquetaire. D’ailleurs Athos était de bonne composition et grand seigneur jusqu’au bout des ongles. Chaque fois qu’une chose lui convenait, il payait le prix demandé sans essayer même d’en rabattre. D’Artagnan voulait bien là-dessus faire ses observations, mais Athos lui posait la main sur l’épaule en souriant, et d’Artagnan comprenait que c’était bon pour lui, petit gentilhomme gascon, de marchander, mais non pour un homme qui avait les airs d’un prince.
Le mousquetaire trouva un superbe cheval andalou, noir comme du jais, aux narines de feu, aux jambes fines et élégantes, qui prenait six ans. Il l’examina et le trouva sans défaut. On le lui fit mille livres.
Peut-être l’eût-il eu pour moins; mais tandis que d’Artagnan discutait sur le prix avec le maquignon, Athos comptait les cent pistoles sur la table.
Grimaud eut un cheval picard, trapu et fort, qui coûta trois cents livres.
Mais la selle de ce dernier cheval et les armes de Grimaud achetées, il ne restait plus un sou des cent cinquante pistoles d’Athos. D’Artagnan offrit à son ami de mordre une bouchée dans la part qui lui revenait, quitte à lui rendre plus tard ce qu’il lui aurait emprunté.
Mais Athos, pour toute réponse, se contenta de hausser les épaules.
«Combien le juif donnait-il du saphir pour l’avoir en toute propriété? demanda Athos.
– Cinq cents pistoles.
– C’est-à-dire, deux cents pistoles de plus; cent pistoles pour vous, cent pistoles pour moi. Mais c’est une véritable fortune, cela, mon ami, retournez chez le juif.
– Comment, vous voulez…
– Cette bague, décidément, me rappellerait de trop tristes souvenirs; puis nous n’aurons jamais trois cents pistoles à lui rendre, de sorte que nous perdrions deux mille livres à ce marché. Allez lui dire que la bague est à lui, d’Artagnan, et revenez avec les deux cents pistoles.
– Réfléchissez, Athos.
– L’argent comptant est cher par le temps qui court, et il faut savoir faire des sacrifices. Allez, d’Artagnan, allez; Grimaud vous accompagnera avec son mousqueton.»
Une demi-heure après, d’Artagnan revint avec les deux mille livres et sans qu’il lui fût arrivé aucun accident.
Ce fut ainsi qu’Athos trouva dans son ménage des ressources auxquelles il ne s’attendait pas.
CHAPITRE XXXIX
À quatre heures, les quatre amis étaient donc réunis chez Athos. Leurs préoccupations sur l’équipement avaient tout à fait disparu, et chaque visage ne conservait plus l’expression que de ses propres et secrètes inquiétudes; car derrière tout bonheur présent est cachée une crainte à venir.
Tout à coup Planchet entra apportant deux lettres à l’adresse de d’Artagnan.
L’une était un petit billet gentiment plié en long avec un joli cachet de cire verte sur lequel était empreinte une colombe rapportant un rameau vert.
L’autre était une grande épître carrée et resplendissante des armes terribles de Son Éminence le cardinal-duc.
À la vue de la petite lettre, le cœur de d’Artagnan bondit, car il avait cru reconnaître l’écriture; et quoiqu’il n’eût vu cette écriture qu’une fois, la mémoire en était restée au plus profond de son cœur.
Il prit donc la petite épître et la décacheta vivement.
«Promenez-vous, lui disait-on, mercredi prochain, de six heures à sept heures du soir, sur la route de Chaillot, et regardez avec soin dans les carrosses qui passeront, mais si vous tenez à votre vie et à celle des gens qui vous aiment, ne dites pas un mot, ne faites pas un mouvement qui puisse faire croire que vous avez reconnu celle qui s’expose à tout pour vous apercevoir un instant.»
Pas de signature.