Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
Les souliers du mort (Ботинки мертвеца) читать книгу онлайн
продолжение серии книг про Фантомаса
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Près de lui, Michel, souriant, mâchonnait un crayon sans s’en apercevoir. Plus loin le chef de gare, en brave homme qu’il était, sanglotait d’émotion.
Mais ceux que l’on remarquait d’abord étaient Fandor et Juve, qui, dans un coin, discutaient avec animation, cependant qu’à côté d’eux, sanglotant, s’embrassant, échangeant des propos peu clairs, car ils s’interrompaient les uns les autres, Fernand Ricard, Alice Ricard et l’oncle Baraban se tenaient enlacés.
— Enfin, disait Fernand Ricard, enfin, vous voilà, mon bon oncle.
— Mais que vous est-il donc arrivé ? criait Alice.
L’oncle Baraban, qui avait une grosse voix de stentor, dominait le tumulte en répétant :
— Ah nom d’un chien, si j’avais pensé ? Tout ça, c’est de ma faute. Alors quoi, on vous arrêtait ? Mais ils sont fous, à la police !
Il fallut près d’une grande heure pour que l’émotion de ces divers personnages pût enfin se calmer. C’est alors seulement que Juve, souriant et triomphant s’approcha de l’oncle Baraban, sur l’épaule duquel il frappa :
— Voyons, dit-il, finissons-en. Votre neveu et votre nièce ont besoin de repos. Répondez-nous, monsieur Baraban, dites-nous la vérité, où étiez-vous ?
L’oncle Baraban se retourna, considéra Juve avec émotion.
— Mais figurez-vous, répondait-il, que je ne me doutais de rien moi. C’est tout à l’heure, en lisant les journaux, bien par hasard, que j’ai appris toute cette abominable histoire.
Il s’interrompit pour demander brusquement :
— Mais d’abord, vous, qui êtes-vous ?
— Le policier Juve.
À ces mots, l’oncle Baraban tomba dans les bras de Juve.
— Ah, que je vous remercie ! Vous, au moins, vous aviez deviné la vérité. Parbleu. Oui, j’étais en fugue avec une poule ! Dame, pour avoir soixante ans, je ne suis pas moins capable de m’amuser un peu. Mais cela, je l’expliquerai plus tard.
Et, s’interrompant pour embrasser sa nièce, l’oncle Baraban déjà avait repris :
— Par exemple, un bonhomme que je voudrais voir pour lui dire son fait, et ne pas lui mâcher ses vérités à cet imbécile-là, à ce crétin-là, à cet âne bâté-là, c’est le dénommé Havard.
Juve se mordit les lèvres pour ne pas éclater de rire.
— Hum, Hum, toussa Juve, ne parlez pas comme cela, monsieur Baraban. D’abord, savez-vous que vous avez eu grand tort de feindre une mise en scène de cette nature ? Vous vous êtes moqué de la police.
Mais l’oncle Baraban, à ces mots, se releva, irascible.
— Eh bien, vous en avez un culot ! riposta-t-il. Moi, me moquer de la police ? Mais est-ce que je lui demande quelque chose à la police, moi ? Est-ce que je l’ai priée de venir chez moi ? Est-ce que ça me regarde si le chef de la Sûreté veut absolument prouver que je suis mort ? D’abord, qu’est-ce que vous avez à parler de mise en scène ? Où avez-vous vu de la mise en scène ? Quand je suis rentré chez moi, après avoir quitté ma nièce, j’étais soûl, sapristi c’est mon droit je suppose ? Étant gris, je me suis flanqué par terre, et j’ai saigné du nez, j’en ai même collé partout, du sang. Qu’est-ce qui me le défend, cela ? Et si, étant toujours ivre, j’ai cassé des meubles chez moi, qui est-ce qui a le droit de m’en faire un reproche ? Ça ne regarde personne, tout de même !
À bout de souffle l’oncle Baraban se tut. Juve, souriant toujours, alla frapper sur l’épaule de M. Havard, toujours complètement ahuri.
— Patron, commença-t-il, je crois que nous n’avons plus rien à faire ici. Le mieux serait de nous en aller. Demain, je reviendrai voir les époux Ricard et je tirerai définitivement cette affaire au clair.
M. Havard se levait déjà :
— En effet, allons-nous-en.
Et, avec peine, il reconnut :
— Juve, je me suis bêtement trompé. Mes félicitations.
Les deux hommes sortirent du bureau du chef de gare, voulurent traverser le quai. Par malheur, le chef de gare avait déjà parlé, la foule connaissait déjà l’extraordinaire arrivée de l’oncle Baraban.
À peine Juve et M. Havard apparaissaient-ils sur le quai de la gare que la population, massée dans la cour, éclatait en nouvelles vociférations :
— Hou, hou, la police, criait-on, allons, la rousse ! À mort les flics, vivent les Ricard. Vive l’oncle Baraban ! Hou, hou, la police !
Il fallut que le chef de la Sûreté et Juve auxquels s’était joint Fandor, prissent la fuite par une porte dérobée pour éviter d’expier chèrement l’erreur qui avait failli être commise.
19 – MARCHE AU POING
Cependant, après l’arrivée par le train de Paris de l’oncle Baraban à Vernon, les époux Ricard, naturellement, avaient aussitôt été mis en liberté et on avait fait honneur au retour du disparu :
— Encore un verre de vin, oncle Baraban, je vous assure que c’est du meilleur, de la première qualité. J’en ai placé un pareil dans toute la région et on m’en redemande.
Avec un sourire contraint et forcé, Fernand Ricard remplissait d’une main tremblante l’un des nombreux verres qui encombraient la table de sa salle à manger.
Il le tendait au gros homme à la face réjouie, à la barbe blanche et aux yeux pétillants dont la réapparition imprévue avait déterminé dans Vernon une si vive émotion.
La foule, si prompte au revirement, après avoir accompagné les époux Ricard de leur domicile jusqu’à la gare du chemin de fer en les couvrant d’injures, leur avait fait lorsqu’ils étaient revenus de la gare, une conduite enthousiaste qui prouvait que, si le public était absolument indigné à l’idée qu’un crime avait pu se commettre, il l’était désormais également, en songeant que l’on avait pu prendre pour des assassins deux charmantes personnes comme Alice et Fernand Ricard.
À présent, chez lui, Fernand Ricard était tout souriant et d’une gaieté exubérante. On forçait sa porte et il avait voulu que tout le monde pût rentrer, et le courtier en vins ne négligeait pas ces occasions inespérées pour faire apprécier à ses hôtes la qualité de ses échantillons, et naturellement, il trinquait avec l’oncle Baraban qui, au milieu de tous ces gens surpris, étonnés, semblait demeurer très calme, encore que légèrement ironique.
Quant à Fernand Ricard, ses propos enthousiastes démentaient, à coup sûr, ses secrètes pensées. Il avait beau déclarer que tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes depuis que l’oncle Baraban était retrouvé, revenu, il avait beau dire que cette réception familiale lui rappelait les scènes de l’Histoire sainte, et notamment l’histoire de l’Enfant prodigue, il restait pâle et tremblant. À deux ou trois reprises, on lui avait demandé s’il n’était pas souffrant, et Fernand Ricard avait répondu :
— Non, non, c’est l’émotion. Vous comprenez bien qu’à ma place, vous seriez tout aussi retourné que moi.
Le fait est qu’on était bien de son avis. Il y avait de quoi troubler l’homme le plus impassible du monde.
Alice Ricard se montrait aussi enjouée que son mari, en surface, aussi inquiète par en dessous. Assurément, elle s’était précipitée au cou du brave rescapé et sa chevelure brune s’était mêlée à la toison abondante et toute blanche que le beau vieillard portait sur la tête. Mais la jeune femme, pendant ses effusions, avait senti son cœur battre à tout rompre.
On la regardait avec une curiosité malveillante. Deux de leurs amis causaient justement dans un angle du salon. C’était le percepteur, M. Nortier, et le père Lebrenet, un retraité :
— Je ne suis pas bien malin, mon cher, mais les histoires d’amour et de femmes, ça me connaît. J’ai été longtemps dans le Midi, où les cœurs sont chauds et les têtes promptes. Eh bien, on ne m’ôtera pas de l’idée que toute cette aventure, c’est une histoire de cœur.
— Parbleu, répliquait Lebrenet, c’est pas bien malin. Tous les journaux l’ont raconté. Il y a deux versions. Certains prétendaient qu’il s’agissait d’un crime, mais d’autres, voyant qu’on n’avait pas retrouvé le cadavre, étaient sûrs qu’il s’agissait simplement d’une fugue amoureuse. C’était même la théorie du célèbre policier Juve.