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Le Petit Chose

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Le Petit Chose
Название: Le Petit Chose
Автор: Daudet Alphonse
Дата добавления: 16 январь 2020
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Le Petit Chose - читать бесплатно онлайн , автор Daudet Alphonse

'Le Petit Chose' para?t en feuilleton en 1867. Daudet s'inspire des souvenirs d'une jeunesse douloureuse: humiliations ? l'?cole, m?pris pour le petit provencal, exp?rience de r?p?titeur au coll?ge et enfin coup de foudre pour une belle jeune femme. L'?crivain manifeste une tendresse, une piti? et un respect remarquables ? l'?gard des malchanceux et des d?sh?rit?s de la vie.

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Je l'entendais dans le grignotement de la tête d'oiseau qui venait d'entrer avec Mme Lalouette et s'était installé au coin du piano, je l'entendais dans les roulades du joueur de flûte, dans la Rêverie de Rosellen que Mlle Pierrotte ne manqua pas de jouer; je le lisais dans les gestes de toutes ces marionnettes bourgeoises, dans la coupe de leurs vêtements, dans le dessin de la tapisserie, dans l'allégorie de la pendule – Vénus cueillant une rose d'où s'envole un Amour dédoré – dans la forme des meubles, dans les moindres détails de cet affreux salon jonquille où les mêmes gens disaient tous les soirs les mêmes choses, où le même piano jouait tous les soirs la même rêverie, et que l'uniformité de ses soirées faisait ressembler à un tableau à musique. Le salon jonquille, un tableau à musique!… Où vous cachiez-vous donc, beaux yeux noirs?… Lorsque au retour de cette ennuyeuse soirée, je racontai à ma mère Jacques les propositions de Pierrotte, il en fut encore plus indigné que moi:

«Daniel Eyssette, marchand de porcelaine!… Par exemple, je voudrais bien voir cela! disait le brave garçon, tout rouge de colère… C'est comme si on proposait à Lamartine de vendre des paquets d'allumettes, ou à Sainte-Beuve de débiter des petits balais de crin… Vieille bête de Pierrotte, va!… Après tout, il ne faut pas lui en vouloir; il ne sait pas, ce pauvre homme. Quand il verra le succès de ton livre et les journaux tout, remplis de toi, il changera joliment de gamme.

– Sans doute, Jacques; mais pour que les journaux parlent de moi, il faut que mon livre. paraisse, et je vois bien qu'il ne paraîtra pas… Pourquoi?…

Mais, mon cher, parce que je ne peux pas mettre la main sur un éditeur et que ces gens-là ne sont jamais chez eux pour les poètes. Le grand Baghavat lui-même est obligé d'imprimer ses vers à ses frais.

– Eh bien, nous ferons comme lui, dit Jacques en frappant du poing sur la table; nous imprimerons à nos frais.» Je le regarde avec stupéfaction:

«À nos frais…

– Oui, mon petit, à nos frais… Tout juste, le marquis fait imprimer en ce moment le premier volume de ses mémoires… Je vois son imprimeur tous les jours… C'est un Alsacien qui a le nez rouge et l'air bon enfant. Je suis sûr qu'il nous fera crédit… Pardieu! nous le paierons, à mesure que ton volume se vendra… Allons! voilà qui est dit; dès demain je vais voir mon homme.» Effectivement Jacques, le lendemain, va trouver l'imprimeur et revient enchanté: «C'est fait, me dit-il d'un air de triomphe; on met ton livre à l'impression demain. Cela nous coûtera neuf cents francs, une bagatelle. Je ferai des billets de trois cents francs, payables de trois en trois mois. Maintenant, suis bien mon raisonnement. Nous vendons le volume trois francs, nous tirons à mille exemplaires; c'est donc trois mille francs que ton livre doit nous rapporter… tu m'entends bien, trois mille francs. Là-dessus, nous payons l'imprimeur, plus la remise d'un franc par exemplaire aux libraires qui vendront l'ouvrage, plus l'envoi aux journalistes… Il nous restera, clair comme de l'eau de roche, un bénéfice de onze cents francs. Hein? C'est joli pour un début…»

Si c'était joli, je crois bien!… Plus de chasse aux étoiles invisibles, plus de stations humiliantes aux portes des librairies, et par-dessus le marché onze cents francs à mettre de côté pour la reconstruction du foyer… Aussi quelle joie, ce jour-là, dans le clac cher de Saint-Germain! Que de projets, que de rêves! Et puis les jours suivants, que de petits bonheurs savourés goutte à goutte, aller à l'imprimerie, corriger les épreuves, discuter la couleur de la couverture, voir le papier sortir tout humide de la presse avec vos pensées imprimées dessus, courir deux fois, trois fois chez le brocheur, et revenir enfin avec le premier exemplaire qu'on ouvre en tremblant du bout des doigts… Dites! est-il rien de plus délicieux au monde?.

Pensez que le premier exemplaire de La Comédie pastorale revenait de droit aux yeux noirs. Je le leur portai le soir même, accompagné de la mère Jacques qui voulait jouir de mon triomphe. Nous fîmes notre entrée dans le salon jonquille, fiers et radieux. Tout le monde était là.

«Monsieur Pierrotte, dis-je au Cévenol, permettez-moi d'offrir ma première œuvre à Camille.» Et je mis mon volume dans une chère petite main qui frémissait de plaisir. Oh! si vous aviez vu le joli merci que les yeux noirs m'envoyèrent, et comme ils resplendissaient en lisant mon nom sur la couverture.

Pierrotte était moins enthousiasmé, lui. Je l'entendis demander à Jacques combien un volume comme cela pouvait me rapporter:

«Onze cents francs», répondit Jacques avec assurance.

Là-dessus, ils se mirent à causer longuement, à voix basse, mais je ne les écoutai pas. J'étais tout à la joie de voir les yeux noirs abaisser leurs grands cils de soie sur les pages de mon livre et les relever vers moi avec admiration… Mon livre! les yeux noirs! deux bonheurs que je devais à ma mère Jacques…

Ce soir-là, avant de rentrer, nous allâmes rôder dans les galeries de l'Odéon pour juger de l'effet que La Comédie pastorale faisait à l'étalage des librairies.

«Attends-moi, me dit Jacques; je vais voir combien on en a vendu.» Je l'attendis en me promenant de long en large, regardant du coin de l'œil certaine couverture verte à filets noirs qui s'épanouissait au milieu de la devanture. Jacques vint me rejoindre au bout, d'un moment; il était pâle d'émotion.

«Mon cher, me dit-il, on en a déjà vendu un. C'est de bon augure…» Je lui serrai la main silencieusement. J'étais trop ému pour parler; mais, à part moi, je me disais:

«Il y a quelqu'un à Paris qui vient de tirer trois francs de sa bourse pour acheter cette production de ton cerveau, quelqu'un qui te lit, qui te juge… Quel est ce quelqu'un? Je voudrais bien le connaître…» Hélas! pour mon malheur, j'allais bientôt le connaître, ce terrible quelqu'un.

Le lendemain de l'apparition de mon volume, j'étais en train de déjeuner à table d'hôte à côté du farouche penseur, quand Jacques, très essoufflé, se précipita dans la salle:

«Grande nouvelle! me dit-il en m'entraînant dehors; je pars ce soir, à sept heures, avec le marquis… Nous allons à Nice voir sa sœur, qui est mourante… Peut-être resterons-nous longtemps… Ne t'inquiète pas de ta vie… Le marquis double mes appointements. Je pourrai t'envoyer cent francs par mois…

Eh bien, qu'as-tu? Te voilà tout pâle. Voyons! Daniel, pas d'enfantillage. Rentre là-dedans, achève de déjeuner et bois une demi-bordeaux, afin de te donner du courage. Moi, je cours dire adieu à Pierrotte, prévenir l'imprimeur, faire porter les exemplaires aux journalistes… Je n'ai pas une minute… Rendez-vous à la maison à cinq heures.».

Je le regardai descendre la rue Saint-Benoît à grandes enjambées, puis je rentrai dans le restaurant; mais je ne pus rien manger ni boire, et c'est le penseur qui vida la demi-bordeaux. L'idée que dans quelques heures ma mère Jacques serait loin m'étreignait le cœur. J'avais beau songer à mon livre, aux yeux noirs, rien ne pouvait me distraire de cette pensée que Jacques allait partir et que je resterais seul, tout seul dans Paris maître de moi-même et responsable de toutes mes actions.

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