Sapho

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Sapho
Название: Sapho
Автор: Daudet Alphonse
Дата добавления: 16 январь 2020
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Sapho читать книгу онлайн

Sapho - читать бесплатно онлайн , автор Daudet Alphonse

Alphonse Daudet n'a pas seulement chant? la Provence perdue de son enfance. Dans Sapho, c'est un Paris bien incarn? qu'il met en sc?ne, celui de la boh?me artistique de son temps, se consumant dans l'ivresse de la f?te et des conqu?tes d'un soir. Jean, jeune proven?al fra?chement mont? ? Paris, s'?prend d'une tr?s belle femme – mod?le – connue sous le nom de Sapho. Sera-ce une de ces liaisons sans lendemain? Sapho n'est plus jeune et pressent qu'elle vit son dernier amour, mais, pour Jean, c'est le premier. D?calage du temps, d?saccord des ?mes… Trente ans avant le Ch?ri de Colette, Daudet a l'intuition magistrale de " ce genre d'amours auxquels le sentiment maternel ajoute une dimension d?licieuse et dangereuse "

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Ce fut une révélation dans un éclair. Il revit, comprit tout, depuis la lettre du coffret où le beau graveur confiait à sa maîtresse un enfant qu’il avait en province, jusqu’à l’arrivée mystérieuse du petit, et la mine gênée d’Hettéma pour parler de cette adoption, et les regards de Fanny à Olympe; car ils s’étaient tous entendus pour lui faire nourrir le fils du faussaire. Oh! le joli niais, et comme ils avaient dû rire!… Un dégoût lui en vint de tout ce passé de honte, une envie de fuir bien loin; mais des choses le troublaient qu’il aurait voulu savoir. L’homme et l’enfant partis, pourquoi pas elle? Et puis ses lettres, il lui fallait ses lettres, ne rien laisser de lui dans ce coin de souillure et de malheur.

– Madame?… Voilà monsieur!…

– Qui, monsieur?… demanda naïvement une voix du fond de la chambre.

– Moi…

On entendit un cri, un bond précipité, puis:

– Attends, je me lève… je viens…

Encore au lit à midi passé! Jean se doutait bien pourquoi, il connaissait les causes de ces lendemains brisés, harassés; et pendant qu’il l’attendait dans la salle aux moindres objets familiers, le sifflet du train montant, le «mé» grelottant d’une chèvre dans un jardinet voisin, les couverts épars sur la table le reportaient aux matins d’autrefois, le petit déjeuner en hâte avant le départ.

Fanny entra avec un élan vers lui, puis, s’arrêtant devant sa froideur, ils restèrent une seconde étonnés, hésitants, comme lorsqu’on se retrouve après ces intimités brisées, de chaque côté d’un pont rompu, d’une distance de rive à rive, et entre soi l’espace immense des flots roulants et engloutissants.

– Bonjour… dit-elle tout bas, sans bouger.

Elle le trouvait changé, pâli. Lui s’étonnait de la revoir si jeune, un peu grossie seulement, moins grande qu’il ne se la figurait, mais baignée de ce rayonnement spécial, cet éclat du teint et des yeux, cette douceur de pelouse fraîche que lui laissaient les nuits de grandes caresses. Elle était donc restée dans le bois, au fond du ravin encombré de feuilles mortes, celle dont le souvenir le rongeait de pitié.

– On se lève tard à la campagne… fit-il d’un accent ironique.

Elle s’excusait, prétextait une migraine, et, comme lui, employait des formes impersonnelles, ne sachant dire ni toi, ni vous; puis à l’interrogation muette qui lui montrait le repas desservi:

– C’est l’enfant… il a déjeuné là ce matin avant de s’en aller…

– S’en aller?… Où donc?

Il affectait une suprême indifférence du bout des lèvres, mais l’éclair de ses yeux le trahissait. Et Fanny:

– Le père a reparu… il est venu le reprendre…

– En sortant de Mazas, n’est-ce pas?

Elle tressaillit, mais n’essaya pas de mentir.

– Eh bien, oui… J’avais promis, je l’ai fait… Que de fois l’envie me tenait de te le dire, mais je n’osais pas, j’avais peur que tu le renvoies, le pauvre petit…

Et elle ajouta timidement:

– Tu étais si jaloux…

Il eut un beau rire de dédain. Jaloux, lui, de ce forçat… allons donc!… Et sentant monter sa colère il coupa court, dit vivement ce qui l’amenait. Ses lettres!… Pourquoi ne les avait-elle pas données à Césaire, cela leur eût évité une entrevue pénible pour tous deux.

– C’est vrai, dit-elle, toujours très douce, mais je vais te les rendre, elles sont là…

Il la suivit dans la chambre, aperçut le lit défait, recouvert en hâte sur les deux oreillers, respira cette odeur de cigarettes brûlées mêlée à des parfums de toilette de femme, qu’il reconnaissait comme le petit coffret nacré posé sur la table. Et la même pensée leur venant à tous deux:

– Il n’y en a pas lourd, dit-elle en ouvrant la boîte… nous ne risquerions pas de mettre le feu…

Il se taisait, troublé, la bouche sèche, hésitant à se rapprocher de ce lit saccagé, devant lequel elle feuilletait les lettres une dernière fois, la tête penchée, la nuque solide et blanche sous la torsade relevée de ses cheveux, et dans le flottant vêtement de laine la taille épaissie et molle, à l’abandon…

– Voilà!… Elles y sont toutes.

Le paquet pris, mis brusquement dans sa poche, car ses préoccupations avaient changé, Jean demanda:

– Alors il emmène son enfant?… Où vont-ils?…

– Au Morvan, dans son pays, pour se cacher, faire sa gravure qu’il enverra à Paris sous un faux nom.

– Et toi?… Est-ce que tu comptes rester ici?…

Elle détourna les yeux pour lui échapper, balbutiant que ce serait bien triste. Aussi elle pensait… elle partirait peut-être bientôt… un petit voyage.

– Dans le Morvan, sans doute?… En famille!…

Et lâchant sa fureur jalouse:

– Dis donc tout de suite que tu rejoindras ton voleur, que vous allez vous mettre en ménage… Il y a assez longtemps que tu en as envie… Allons. Retourne à ta bauge… Fille et faussaire ça va ensemble, j’étais bien bon de vouloir te tirer de cette boue.

Elle gardait son mutisme immobile, un éclair de triomphe filtrant entre ses cils baissés. Et plus il la cinglait d’une ironie féroce, outrageante, plus elle semblait fière, et s’accentuait le frisson au coin de sa bouche. Maintenant il parlait de son bonheur à lui, l’amour honnête et jeune, le seul amour. Oh! le doux oreiller pour dormir qu’un cœur d’honnête femme… Puis, brusquement, la voix baissée, comme s’il avait honte:

– Je viens de le rencontrer, ton Flamant, il a passé la nuit ici?

– Oui, il était tard, il neigeait… On lui a fait un lit sur le divan.

– Tu mens, il a couché là… il n’y a qu’à voir le lit, qu’à te regarder.

– Et après?

Elle approchait son visage du sien, ses grands yeux gris éclairés de flammes libertines…

– Est-ce que je savais que tu viendrais?… Et toi perdu, qu’est-ce que ça pouvait me faire, tout le reste? J’étais triste, seule, dégoûtée…

– Et puis le bouquet du bagne!… Depuis le temps que tu vivais avec un honnête homme… ça t’a semblé bon, hein?… Avez-vous dû vous en fourrer de ces caresses… Ah! saleté!… tiens…

Elle vit venir le coup sans l’éviter, le reçut en pleine figure, puis avec un grondement sourd de douleur, de joie, de victoire, elle sauta sur lui, l’empoigna à pleins bras: «M’ami, m’ami… tu m’aimes encore…» et ils roulèrent ensemble sur le lit.

Le passage à grand fracas d’un express le réveilla en sursaut vers le soir; et les yeux ouverts, il resta quelques instants sans se reconnaître, tout seul au fond de ce grand lit où ses membres rompus comme par une marche excessive semblaient posés les uns à côté des autres, sans attaches ni ressorts. L’après-midi, il était tombé beaucoup de neige. Dans un silence de désert, on l’entendait fondre, ruisseler contre les murs, le long des vitres, s’égoutter dans les combles du toit, et, par moments, sur le feu de coke de la cheminée qu’elle éclaboussait.

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