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Les Possedes

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Les Possedes
Название: Les Possedes
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Possedes - читать бесплатно онлайн , автор Dosto?evski Fedor Mikha?lovitch

«Est-il possible de croire? S?rieusement et effectivement? Tout est l?.» Stavroguine envo?te tous ceux qui l'approchent, hommes ou femmes. Il ne trouve de limite ? son immense orgueil que dans l'existence de Dieu. Il la nie et tombe dans l'absurdit? de la libert? pour un homme seul et sans raison d'?tre. Tous les personnages de ce grand roman sont poss?d?s par un d?mon, le socialisme ath?e, le nihilisme r?volutionnaire ou la superstition religieuse. Ignorant les limites de notre condition, ces id?ologies sont incapables de rendre compte de l'homme et de la soci?t? et appellent un terrorisme destructeur. Sombre trag?die d'amour et de mort, «Les Poss?d?s» sont l'incarnation g?niale des doutes et des angoisses de Dosto?evski sur l'avenir de l'homme et de la Russie. D?s 1870, il avait pressenti les dangers du totalitarisme au XXe si?cle.

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Le prédicateur était au milieu de son sermon, et tout le monde l’écoutait avec l’attention la plus recueillie; cependant quelques regards curieux se portèrent furtivement vers la nouvelle venue. Elle se prosterna jusqu’à terre, inclina son visage fardé sur le pavement de la cathédrale et resta longtemps dans cette position; on aurait dit qu’elle pleurait. Ensuite elle se releva et ne tarda pas à recouvrer sa bonne humeur. Gaiement, avec tous les signes d’une extrême satisfaction, elle commença à promener ses yeux autour d’elle, contemplant les murs de l’église, examinant les figures des assistants, parfois même se haussant sur la pointe des pieds pour mieux voir certaines dames; à deux reprises elle eut un petit rire étrange. Le sermon fini, la croix fut offerte à la vénération des fidèles. La gouvernante s’approcha la première pour la baiser, mais elle n’avait pas fait deux pas qu’elle s’arrêta avec l’intention évidente de laisser passer Barbara Pétrovna, qui, de son côté, s’avançait bravement sans paraître remarquer qu’il y avait quelqu’un devant elle. Sans doute l’excessive politesse de Julie Mikhaïlovna cachait une arrière-pensée maligne; personne ne s’y trompa, la générale Stavroguine pas plus que les autres; néanmoins son assurance ne se démentit point: imperturbable, elle s’approcha de la croix, et, après l’avoir baisée, se dirigea vers la sortie. Son laquais en livrée la précédait pour lui ouvrir un chemin, ce qui, du reste, était inutile, car tous s’écartaient respectueusement devant elle. Mais, arrivée sur le parvis, Barbara Pétrovna dut s’arrêter un instant en face d’un épais rassemblement qui lui barrait le passage. Soudain une créature d’un aspect bizarre, une femme portant sur la tête une rose artificielle, fendit la foule et vint s’agenouiller devant la générale. Celle-ci, qui ne perdait pas facilement sa présence d’esprit, surtout en public, la regarda d’un air sévère et imposant.

Il faut noter que, tout en étant devenue dans ces dernières années fort économe et même avare, Barbara Pétrovna ne laissait pas, à l’occasion de faire l’aumône d’une façon très large. Elle était membre d’une société de bienfaisance établie dans la capitale, et, récemment, lors d’une famine, elle avait envoyé à Pétersbourg cinq cents roubles pour les indigents. Enfin, tout dernièrement, avant la nomination du nouveau gouverneur, elle avait entrepris de créer chez nous un comité de dames charitables, afin de venir en aide aux femmes en couches les plus nécessiteuses de la ville et de la province. Notre société lui reprochait de faire le bien avec trop d’ostentation, mais la fougue de son caractère, jointe à une rare opiniâtreté, avaient presque triomphé de tous les obstacles; le comité était à peu près organisé, et l’idée primitive prenait des proportions de plus en plus vaste dans l’esprit enthousiasmé de la fondatrice; déjà elle rêvait d’établir une société semblable à Moscou et d’en étendre l’action dans toute la Russie. Les choses en étaient là, quand tout à coup, Von Lembke fut nommé gouverneur en remplacement d’Ivan Osipovitch. La nouvelle gouvernante ne tarda pas, dit-on, à s’exprimer en termes moqueurs au sujet des visées philanthropiques de Barbara Pétrovna, qui n’étaient, suivant elle, que d’ambitieuses chimères. Ces propos, considérablement amplifiés, comme il arrive toujours, furent rapportés à Barbara Pétrovna. Dieu seul connaît le fond des cœurs, mais je suppose que dans la circonstance présente, la générale était bien aise d’être ainsi arrêtée à la porte de la cathédrale sachant que la gouvernante passerait tout à l’heure à côté d’elle. «Tant mieux! devait-elle se dire, que tout le monde voie, qu’elle voie elle-même combien me sont indifférentes ses critiques sur ma façon de faire la charité!»

– Eh bien, ma chère, que demandez-vous? commença Barbara Pétrovna après avoir examiné plus attentivement la femme agenouillée devant elle.

Troublée, confuse, la solliciteuse regarda timidement celle qui lui parlait, puis tout à coup partit d’un éclat de rire.

– Qu’est-ce qu’elle a? Qui est-elle? fit la générale en promenant un regard interrogateur sur le groupe qui l’entourait.

Personne ne répondit.

– Vous êtes malheureuse? Vous avez besoin d’un secours?

– J’ai besoin… je suis venue… balbutia la «malheureuse» d’une voix entrecoupée. Je suis venue seulement pour vous baiser la main… Et elle se remit à rire. Avec le regard câlin des enfants qui veulent obtenir quelque chose, elle tendit le bras pour saisir la main de Barbara Pétrovna; ensuite, comme effrayée, elle ramena brusquement son bras en arrière.

– Vous n’êtes venue que pour cela? dit avec un sourire de compassion Barbara Pétrovna, et, tirant de son porte-monnaie de nacre un assignat de dix roubles, elle l’offrit à l’inconnue. Celle-ci le prit. Cette rencontre intriguait fort la générale, qui, évidemment, se doutait bien qu’elle n’avait pas affaire à une mendiante de profession.

– Eh! voyez donc, elle lui a donné dix roubles, remarqua quelqu’un dans la foule.

– Donnez-moi votre main, reprit d’une voix hésitante l’étrange créature qui serrait avec force entre les doigts de sa main gauche le billet qu’elle venait de recevoir. Comme elle ne le tenait que par un coin, l’assignat flottait au vent.

Barbara Pétrovna fronça le sourcil, et, d’un air sérieux, presque sévère, tendit sa main. La «malheureuse» la baisa avec le plus profond respect, tandis qu’une reconnaissance exaltée mettait une flamme dans ses yeux. Sur ces entrefaites s’approcha la gouvernante accompagnée d’un grand nombre de dames et de hauts fonctionnaires. Force fut à Julie Mikhaïlovna de s’arrêter durant une minute, tant était compact le groupe qui encombrait le parvis de la cathédrale.

– Vous tremblez, vous avez froid? observa soudain Barbara Pétrovna; puis se débarrassant de son bournous que le laquais saisit au vol, elle ôta de dessus ses épaules un châle noir d’un assez grand prix, et en enveloppa elle-même la solliciteuse toujours agenouillée.

– Mais levez-vous donc, levez-vous, je vous prie!

L’inconnue obéit.

– Où demeurez-vous? Se peut-il que personne ne sache où elle demeure? fit impatiemment la générale en promenant de nouveau ses yeux autour d’elle. Mais le rassemblement n’était plus composé des mêmes personnes que tout à l’heure; c’étaient maintenant des connaissances de Barbara Pétrovna, des gens du monde qui contemplaient cette scène, les uns d’un air aussi étonné que sévère, les autres avec une curiosité narquoise et l’espoir d’un petit scandale; plusieurs même commençaient à rire.

Parmi les assistants se trouvait notre respectable marchand Andréieff; il était là en costume russe, avec ses lunettes, sa barbe blanche et un chapeau rond qu’il tenait à la main.

– Je crois que cette personne est une Lébiadkine, dit enfin le brave homme en réponse à la question de Barbara Pétrovna; – elle habite dans la maison Philippoff, rue de l’Épiphanie.

– Lébiadkine? la maison Philippoff? J’en ai entendu parler… je vous remercie, Nikon Séménitch, mais qu’est-ce que c’est que Lébiadkine?

– Il se donne pour capitaine, c’est un homme inconsidéré, on peut le dire. Cette femme est certainement sa sœur; il faut croire qu’elle a réussi à tromper sa surveillance, reprit Nikon Séménitch en baissant la voix, et il adressa à Barbara Pétrovna un regard qui complétait sa pensée.

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