La Reine Margot Tome I
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Sur fond de guerres sanglantes, de Saint Barth?l?my ainsi que de la lutte entre Catherine de M?dicis et Henri de Navarre, la premi?re ?pouse de ce dernier, Marguerite de Valois, appel?e la reine Margot, entretient des intrigues amoureuses notoires et violentes… Roman historique qui reste avant tout un roman, ce livre nous fait sentir l'atmosph?re de cette ?poque et appr?hender l'histoire de notre pays!
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– Au nom du Ciel! répondez, Sire: Sire, si vous étiez à leur place, que feriez-vous?
Henri se recueillit, essuya de sa main tremblante son front où perlaient quelques gouttes de sueur froide, et, se levant de toute sa hauteur, il répondit, au milieu du silence qui suspendait jusqu’à la respiration de René et de Charlotte:
– Si j’étais à leur place et que je fusse sûr d’être roi, c’est-à-dire de représenter Dieu sur la terre, je ferais comme Dieu, je pardonnerais.
– Madame, s’écria René en arrachant l’opiat des mains de madame de Sauve, madame, rendez-moi cette boîte; mon garçon, je le vois, s’est trompé en vous l’apportant: demain je vous en enverrai une autre.
XXIII Un nouveau converti
Le lendemain, il devait y avoir chasse à courre dans la forêt de Saint-Germain.
Henri avait ordonné qu’on lui tînt prêt, pour huit heures du matin, c’est-à-dire tout sellé et tout bridé, un petit cheval du Béarn, qu’il comptait donner à madame de Sauve, mais qu’auparavant il désirait essayer. À huit heures moins un quart, le cheval était appareillé. À huit heures sonnant, Henri descendait.
Le cheval, fier et ardent, malgré sa petite taille, dressait les crins et piaffait dans la cour. Il avait fait froid, et un léger verglas couvrait la terre.
Henri s’apprêta à traverser la cour pour gagner le côté des écuries où l’attendaient le cheval et le palefrenier, lorsqu’en passant devant un soldat suisse, en sentinelle à la porte, ce soldat lui présenta les armes en disant:
– Dieu garde Sa Majesté le roi de Navarre! À ce souhait, et surtout à l’accent de la voix qui venait de l’émettre, le Béarnais tressaillit. Il se retourna et fit un pas en arrière.
– de Mouy! murmura-t-il.
– Oui, Sire, de Mouy.
– Que venez-vous faire ici?
– Je vous cherche.
– Que me voulez-vous?
– Il faut que je parle à Votre Majesté.
– Malheureux, dit le roi en se rapprochant de lui, ne sais-tu pas que tu risques ta tête?
– Je le sais.
– Eh bien?
– Eh bien, me voilà. Henri pâlit légèrement, car ce danger que courait l’ardent jeune homme, il comprit qu’il le partageait. Il regarda donc avec inquiétude autour de lui, et se recula une seconde fois, non moins vivement que la première. Il venait d’apercevoir le duc d’Alençon à une fenêtre. Changeant aussitôt d’allure, Henri prit le mousquet des mains de de Mouy, placé, comme nous l’avons dit, en sentinelle, et tout en ayant l’air de l’examiner:
– de Mouy, lui dit-il, ce n’est pas certainement sans un motif bien puissant que vous êtes venu ainsi vous jeter dans la gueule du loup?
– Non, Sire. Aussi voilà huit jours que je vous guette. Hier seulement, j’ai appris que Votre Majesté devait essayer ce cheval ce matin et j’ai pris poste à la porte du Louvre.
– Mais comment sous ce costume?
– Le capitaine de la compagnie est protestant et de mes amis.
– Voici votre mousquet, remettez-vous à votre faction. On nous examine. En repassant, je tâcherai de vous dire un mot; mais si je ne vous parle point, ne m’arrêtez point. Adieu.
de Mouy reprit sa marche mesurée, et Henri s’avança vers le cheval.
– Qu’est-ce que ce joli petit animal? demanda le duc d’Alençon de sa fenêtre.
– Un cheval que je devais essayer ce matin, répondit Henri.
– Mais ce n’est point un cheval d’homme, cela.
– Aussi était-il destiné à une belle dame.
– Prenez garde, Henri, vous allez être indiscret, car nous allons voir cette belle dame à la chasse; et si je ne sais pas de qui vous êtes le chevalier, je saurai au moins de qui vous êtes l’écuyer.
– Eh! mon Dieu non, vous ne le saurez pas, dit Henri avec sa feinte bonhomie, car cette belle dame ne pourra sortir, étant fort indisposée ce matin.
Et il se mit en selle.
– Ah bah! dit d’Alençon en riant, pauvre madame de Sauve!
– François! François! c’est vous qui êtes indiscret.
– Et qu’a-t-elle donc cette belle Charlotte? reprit le duc d’Alençon.
– Mais, continua Henri en lançant son cheval au petit galop et en lui faisant décrire un cercle de manège, mais je ne sais trop: une grande lourdeur de tête, à ce que m’a dit Dariole, une espèce d’engourdissement par tout le corps, une faiblesse générale enfin.
– Et cela vous empêchera-t-il d’être des nôtres? demanda le duc.
– Moi, et pourquoi? reprit Henri, vous savez que je suis fou de la chasse à courre, et que rien n’aurait cette influence de m’en faire manquer une.
– Vous manquerez pourtant celle-ci, Henri, dit le duc après s’être retourné et avoir causé un instant avec une personne qui était demeurée invisible aux yeux de Henri, attendu qu’elle causait avec son interlocuteur du fond de la chambre, car voici Sa Majesté qui me fait dire que la chasse ne peut avoir lieu.
– Bah! dit Henri de l’air le plus désappointé du monde. Pourquoi cela?
– Des lettres fort importantes de M. de Nevers, à ce qu’il paraît. Il y a conseil entre le roi, la reine mère et mon frère le duc d’Anjou.
– Ah! ah! fit en lui-même Henri, serait-il arrivé des nouvelles de Pologne? Puis tout haut:
– En ce cas, continua-t-il, il est inutile que je me risque plus longtemps sur ce verglas. Au revoir, mon frère! Puis arrêtant le cheval en face de de Mouy:
– Mon ami, dit-il, appelle un de tes camarades pour finir ta faction. Aide le palefrenier à dessangler ce cheval, mets la selle sur ta tête et porte-la chez l’orfèvre de la sellerie; il y a une broderie à y faire qu’il n’avait pas eu le temps d’achever pour aujourd’hui. Tu reviendras me rendre réponse chez moi.
de Mouy se hâta d’obéir, car le duc d’Alençon avait disparu de sa fenêtre, et il est évident qu’il avait conçu quelque soupçon.
En effet, à peine avait-il tourné le guichet que le duc d’Alençon parut. Un véritable Suisse était à la place de de Mouy.
D’Alençon regarda avec grande attention le nouveau factionnaire; puis se retournant du côté de Henri:
– Ce n’est point avec cet homme que vous causiez tout à l’heure, n’est-ce pas, mon frère?
– L’autre est un garçon qui est de ma maison et que j’ai fait entrer dans les Suisses: je lui ai donné une commission et il est allé l’exécuter.
– Ah! fit le duc, comme si cette réponse lui suffisait. Et Marguerite, comment va-t-elle?