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Le Chevalier De Maison-Rouge

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Le Chevalier De Maison-Rouge
Название: Le Chevalier De Maison-Rouge
Автор: Dumas Alexandre
Дата добавления: 16 январь 2020
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Le Chevalier De Maison-Rouge - читать бесплатно онлайн , автор Dumas Alexandre

Un des livres consacr?s par Dumas ? la R?volution Fran?aise. L'action se passe en 1793. Le jacobin Maurice Lindey, officier dans la garde civique, sauve des investigations d'une patrouille une jeune et belle inconnue, qui garde l'anonymat. Prisonni?re au Temple, o? r?gne le cordonnier Simon, ge?lier du dauphin, Marie-Antoinette re?oit un billet lui annon?ant que le chevalier de Maison-Rouge pr?pare son enl?vement…

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Maurice poussa un soupir; il était évident que sa pensée divergeait.

– Te rappelles-tu la mort de Louis XVI? dit-il. Je me vois encore pâle d’émotion et d’orgueil. J’étais un des chefs de cette foule dans les plis de laquelle je me cache aujourd’hui. J’étais plus grand au pied de cet échafaud que ne l’avait jamais été le roi qui montait dessus. Quel changement, Lorin! et lorsqu’on pense que neuf mois ont suffi pour amener cette terrible réaction!

– Neuf mois d’amour, Maurice!… Amour, tu perdis Troie!

Maurice soupira; sa pensée vagabonde prenait une autre route et envisageait un autre horizon.

– Ce pauvre Maison-Rouge, murmura-t-il, voilà un triste jour pour lui.

– Hélas! dit Lorin, ce que je vois de plus triste dans les révolutions, Maurice, veux-tu que je te le dise?

– Oui.

– C’est que l’on a souvent pour ennemis des gens qu’on voudrait avoir pour amis, et pour amis des gens…

– J’ai peine à croire une chose, interrompit Maurice.

– Laquelle?

– C’est qu’il n’inventera pas quelque projet, fût-il insensé, pour sauver la reine.

– Un homme plus fort que cent mille?

– Je te dis: fût-il insensé… Moi, je sais que, pour sauver Geneviève…

Lorin fronça le sourcil.

– Je te le redis, Maurice, reprit-il, tu t’égares; non, même s’il fallait que tu sauvasses Geneviève, tu ne deviendrais pas mauvais citoyen. Mais assez là-dessus, Maurice, on nous écoute. Tiens, voici les têtes qui ondulent; tiens, voici le valet du citoyen Sanson qui se lève de dessus son panier, et qui regarde au loin. L’Autrichienne arrive.

En effet, comme pour accompagner cette ondulation qu’avait remarquée Lorin, un frémissement prolongé et croissant envahissait la foule. C’était comme une de ces rafales qui commencent par siffler et qui finissent par mugir.

Maurice, élevant encore sa grande taille à l’aide des poteaux du réverbère, regarda vers la rue Saint-Honoré.

– Oui, dit-il en frissonnant, la voilà!

En effet, on commençait à voir apparaître une autre machine presque aussi hideuse que la guillotine, c’était la charrette.

À droite et à gauche reluisaient les armes de l’escorte, et devant elle Grammont répondait avec les flamboiements de son sabre aux cris poussés par quelques fanatiques.

Mais, à mesure que la charrette s’avançait, ces cris s’éteignaient subitement sous le regard froid et sombre de la condamnée.

Jamais physionomie n’imposa plus énergiquement le respect; jamais Marie-Antoinette n’avait été plus grande et plus reine. Elle poussa l’orgueil de son courage jusqu’à imprimer aux assistants des idées de terreur.

Indifférente aux exhortations de l’abbé Girard, qui l’avait accompagnée malgré elle, son front n’oscillait ni à droite ni à gauche; la pensée vivante au fond de son cerveau semblait immuable comme son regard; le mouvement saccadé de la charrette sur le pavé inégal faisait, par sa violence même, ressortir la rigidité de son maintien; on eût dit une de ces statues de marbre qui cheminent sur un chariot; seulement, la statue royale avait l’œil lumineux, et ses cheveux s’agitaient au vent.

Un silence pareil à celui du désert s’abattit soudain sur les trois cent mille spectateurs de cette scène, que le ciel voyait pour la première fois à la clarté de son soleil.

Bientôt, de l’endroit où se tenaient Maurice et Lorin, on entendit crier l’essieu de la charrette et souffler les chevaux des gardes.

La charrette s’arrêta au pied de l’échafaud.

La reine, qui, sans doute, ne songeait pas à ce moment, se réveilla et comprit: elle étendit son regard hautain sur la foule, et le même jeune homme pâle qu’elle avait vu debout sur un canon lui apparut de nouveau debout sur une borne.

De cette borne, il lui envoya le même salut respectueux qu’il lui avait déjà adressé au moment où elle sortait de la Conciergerie; puis aussitôt il sauta à bas de la borne.

Plusieurs personnes le virent, et, comme il était vêtu de noir, de là le bruit se répandit qu’un prêtre avait attendu Marie-Antoinette afin de lui envoyer l’absolution au moment où elle monterait sur l’échafaud. Au reste, personne n’inquiéta le chevalier. Il y a dans les moments suprêmes un suprême respect pour certaines choses.

La reine descendit avec précaution les trois degrés du marchepied; elle était soutenue par Sanson, qui, jusqu’au dernier moment, tout en accomplissant la tâche à laquelle il semblait lui-même condamné, lui témoigna les plus grands égards.

Pendant qu’elle marchait vers les degrés de l’échafaud, quelques chevaux se cabrèrent, quelques gardes à pied, quelques soldats, semblèrent osciller et perdre l’équilibre; puis on vit comme une ombre se glisser sous l’échafaud; mais le calme se rétablit presque à l’instant même: personne ne voulait quitter sa place dans ce moment solennel, personne ne voulait perdre le moindre détail du grand drame qui allait s’accomplir; tous les yeux se portèrent vers la condamnée.

La reine était déjà sur la plate-forme de l’échafaud. Le prêtre lui parlait toujours; un aide la poussait doucement par derrière; un autre dénouait le fichu qui couvrait ses épaules.

Marie-Antoinette sentit cette main infâme qui effleurait son cou, elle fit un brusque mouvement et marcha sur le pied de Sanson, qui, sans qu’elle le vît, était occupé à l’attacher à la planche fatale.

Sanson retira son pied.

– Excusez-moi, monsieur, dit la reine, je ne l’ai point fait exprès.

Ce furent les dernières paroles que prononça la fille des Césars, la reine de France, la veuve de Louis XVI.

Le quart après midi sonna à l’horloge des Tuileries; en même temps que lui Marie-Antoinette tombait dans l’éternité.

Un cri terrible, un cri qui résumait toutes les patiences: joie, épouvante, deuil, espoir, triomphe, expiation, couvrit comme un ouragan un autre cri faible et lamentable qui, au même moment, retentissait sous l’échafaud.

Les gendarmes l’entendirent pourtant, si faible qu’il fût; ils firent quelques pas en avant; la foule, moins serrée, s’épandit comme un fleuve dont on élargit la digue, renversa la haie, dispersa les gardes, et vint comme une marée battre les pieds de l’échafaud, qui en fut ébranlé.

Chacun voulait voir de près les restes de la royauté, que l’on croyait à tout jamais détruite en France.

Mais les gendarmes cherchaient autre chose: ils cherchaient cette ombre qui avait dépassé leurs lignes, et qui s’était glissée sous l’échafaud.

Deux d’entre eux revinrent, amenant par le collet un jeune homme dont la main pressait sur son cœur un mouchoir teint de sang.

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