Les Enfants Du Capitaine Grant
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Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…
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Avant de commencer son récit, il mit lady Helena au courant des choses qu’elle ignorait, c’est-à-dire l’évasion d’une bande de condamnés de Perth, leur apparition dans les contrées de la Victoria, leur complicité dans la catastrophe du chemin de fer. Il lui remit le numéro de l’Australian and New Zealand gazette acheté à Seymour, et il ajouta que la police avait mis à prix la tête de ce Ben Joyce, redoutable bandit, auquel dix-huit mois de crimes avaient fait une funeste célébrité.
Mais comment Mac Nabbs avait-il reconnu ce Ben Joyce dans le quartier-maître Ayrton? Là était le mystère que tous voulaient éclaircir, et le major s’expliqua.
Depuis le jour de sa rencontre, Mac Nabbs, par instinct, se défiait d’Ayrton. Deux ou trois faits presque insignifiants, un coup d’œil échangé entre le quartier-maître et le forgeron à la Wimerra-river, l’hésitation d’Ayrton à traverser les villes et les bourgs, son insistance à mander le Duncan à la côte, la mort étrange des animaux confiés à ses soins, enfin un manque de franchise dans ses allures, tous ces détails peu à peu groupés avaient éveillé les soupçons du major.
Cependant, il n’aurait pu formuler une accusation directe, sans les événements qui s’étaient passés la nuit précédente.
Mac Nabbs, se glissant entre les hautes touffes d’arbrisseaux, arriva près des ombres suspectes qui venaient d’éveiller son attention à un demi-mille du campement. Les plantes phosphorescentes jetaient de pâles lueurs dans l’obscurité.
Trois hommes examinaient des traces sur le sol, des empreintes de pas fraîchement faites, et, parmi eux, Mac Nabbs reconnut le maréchal ferrant de Black-Point. «ce sont eux, disait l’un. – oui, répondait l’autre, voilà le trèfle des fers. – c’est comme cela depuis la Wimerra. – tous les chevaux sont morts. – le poison n’est pas loin. – en voilà de quoi démonter une cavalerie tout entière. Une plante utile que ce gastrolobium!»
«Puis ils se turent, ajouta Mac Nabbs, et s’éloignèrent. Je n’en savais pas assez. Je les suivis. Bientôt la conversation recommença: «un habile homme, Ben Joyce, dit le forgeron, un fameux quartier-maître avec son invention de naufrage! Si son projet réussit, c’est un coup de fortune! Satané Ayrton! – appelle-le Ben Joyce, car il a bien gagné son nom!» en ce moment, ces coquins quittèrent le bois de gommiers. Je savais ce que je voulais savoir, et je revins au campement, avec la certitude que tous les convicts ne se moralisent pas en Australie, n’en déplaise à Paganel!»
Le major se tut.
Ses compagnons, silencieux, réfléchissaient.
«Ainsi, dit Glenarvan dont la colère faisait pâlir la figure, Ayrton nous a entraînés jusqu’ici pour nous piller et nous assassiner!
– Oui, répondit le major.
– Et depuis la Wimerra, sa bande suit nos traces et nous épie, guettant une occasion favorable?
– Oui.
– Mais ce misérable n’est donc pas un matelot du Britannia? Il a donc volé son nom d’Ayrton, volé son engagement à bord?»
Les regards se dirigèrent vers Mac Nabbs, qui avait dû se poser ces questions à lui-même.
«Voici, répondit-il de sa voix toujours calme, les certitudes que l’on peut dégager de cette obscure situation. À mon avis, cet homme s’appelle réellement Ayrton. Ben Joyce est son nom de guerre. Il est incontestable qu’il connaît Harry Grant et qu’il a été quartier-maître à bord du Britannia. Ces faits, prouvés déjà par les détails précis que nous a donnés Ayrton, sont de plus corroborés par les paroles des convicts que je vous ai rapportées. Ne nous égarons donc pas dans de vaines hypothèses, et tenons pour certain que Ben Joyce est Ayrton, comme Ayrton est Ben Joyce, c’est-à-dire un matelot du Britannia devenu chef d’une bande de convicts.»
Les explications de Mac Nabbs furent acceptées sans discussion.
«Maintenant, répondit Glenarvan, me direz-vous comment et pourquoi le quartier-maître d’Harry Grant se trouve en Australie?
– Comment? Je l’ignore, répondit Mac Nabbs, et la police déclare ne pas en savoir plus long que moi à ce sujet. Pourquoi? Il m’est impossible de le dire.
Il y a là un mystère que l’avenir expliquera.
– La police ne connaît pas même cette identité d’Ayrton et de Ben Joyce, dit John Mangles.
– Vous avez raison, John, répondit le major, et une semblable particularité serait de nature à éclairer ses recherches.
– Ainsi, dit lady Helena, ce malheureux s’était introduit à la ferme de Paddy O’Moore dans une intention criminelle?
– Ce n’est pas douteux, répondit Mac Nabbs. Il préparait quelque mauvais coup contre l’irlandais, quand une occasion meilleure s’est offerte à lui. Le hasard nous a mis en présence. Il a entendu le récit de Glenarvan, l’histoire du naufrage, et, en homme audacieux, il s’est promptement décidé à en tirer parti. L’expédition a été décidée. À la Wimerra, il a communiqué avec l’un des siens, le forgeron de Black-Point, et a laissé des traces reconnaissables de notre passage. Sa bande nous a suivis. Une plante vénéneuse lui a permis de tuer peu à peu nos bœufs et nos chevaux. Puis, le moment venu, il nous a embourbés dans les marais de la Snowy et livrés aux convicts qu’il commande.»
Tout était dit sur Ben Joyce. Son passé venait d’être reconstitué par le major, et le misérable apparaissait tel qu’il était, un audacieux et redoutable criminel. Ses intentions, clairement démontrées, exigeaient de la part de Glenarvan une vigilance extrême. Heureusement, il y avait moins à craindre du bandit démasqué que du traître.
Mais de cette situation nettement élucidée ressortait une conséquence grave. Personne n’y avait encore songé. Seule Mary Grant, laissant discuter tout ce passé, regardait l’avenir. John Mangles, d’abord, la vit ainsi pâle et désespérée. Il comprit ce qui se passait dans son esprit.
«Miss Mary! Miss Mary! s’écria-t-il. Vous pleurez!
– Tu pleures, mon enfant? dit lady Helena.
– Mon père! Madame, mon père!» répondit la jeune fille.
Elle ne put continuer. Mais une révélation subite se fit dans l’esprit de chacun. On comprit la douleur de miss Mary, pourquoi les larmes tombaient de ses yeux, pourquoi le nom de son père montait de son cœur à ses lèvres.
La découverte de la trahison d’Ayrton détruisait tout espoir. Le convict, pour entraîner Glenarvan, avait supposé un naufrage. Dans leur conversation surprise par Mac Nabbs, les convicts l’avaient clairement dit. Jamais le Britannia n’était venu se briser sur les écueils de Twofold-Bay! Jamais Harry Grant n’avait mis le pied sur le continent australien!
Pour la seconde fois, l’interprétation erronée du document venait de jeter sur une fausse piste les chercheurs du Britannia!
Tous, devant cette situation, devant la douleur des deux enfants, gardèrent un morne silence. Qui donc eût encore trouvé quelques paroles d’espoir? Robert pleurait dans les bras de sa sœur. Paganel murmurait d’une voix dépitée: