Les Enfants Du Capitaine Grant

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Les Enfants Du Capitaine Grant
Название: Les Enfants Du Capitaine Grant
Автор: Verne Jules
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Enfants Du Capitaine Grant - читать бесплатно онлайн , автор Verne Jules

Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…

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Il n’en fut rien. Les heures se passèrent sans amener une modification dans l’état du ciel. Le vent fraîchit vers midi et accrut encore la bourrasque.

Ce contre-temps eût impatienté le plus patient des hommes. Mais qu’y faire? ç’eût été folie de braver sans véhicule une pareille tempête. D’ailleurs, quelques jours devaient suffire pour gagner Auckland, et un retard de douze heures ne pouvait préjudicier à l’expédition, si les indigènes n’arrivaient pas.

Pendant cette halte forcée, la conversation roula sur les incidents de la guerre dont la Nouvelle-Zélande était alors le théâtre. Mais pour comprendre et estimer la gravité des circonstances au milieu desquelles se trouvaient jetés les naufragés du Macquarie, il faut connaître l’histoire de cette lutte qui ensanglantait alors l’île d’Ika-Na-Maoui.

Depuis l’arrivée d’Abel Tasman au détroit de Cook, le 16 décembre 1642, les néo-zélandais, souvent visités par les navires européens, étaient demeurés libres dans leurs îles indépendantes. Nulle puissance européenne ne songeait à s’emparer de cet archipel qui commande les mers du Pacifique. Seuls, les missionnaires, établis sur ces divers points, apportaient à ces nouvelles contrées les bienfaits de la civilisation chrétienne. Quelques-uns d’entre eux, cependant, et spécialement les anglicans, préparaient les chefs zélandais à se courber sous le joug de l’Angleterre. Ceux-ci, habilement circonvenus, signèrent une lettre adressée à la reine Victoria pour réclamer sa protection. Mais les plus clairvoyants pressentaient la sottise de cette démarche, et l’un d’eux, après avoir appliqué sur la lettre l’image de son tatouage, fit entendre ces prophétiques paroles: «Nous avons perdu notre pays; désormais, il n’est plus à nous; bientôt l’étranger viendra s’en emparer et nous serons ses esclaves.»

En effet, le 29 janvier 1840, la corvette Herald arrivait à la Baie des Îles, au nord d’Ika-Na-Maoui. Le capitaine de vaisseau Hobson débarqua au village de Korora-Reka. Les habitants furent invités à se réunir en assemblée générale dans l’église protestante. Là, lecture fut donnée des titres que le capitaine Hobson tenait de la reine d’Angleterre.

Le 5 janvier suivant, les principaux chefs zélandais furent appelés chez le résident anglais au village de Païa. Le capitaine Hobson chercha à obtenir leur soumission, disant que la reine avait envoyé des troupes et des vaisseaux pour les protéger, que leurs droits restaient garantis, que leur liberté demeurait entière. Toutefois, leurs propriétés devaient appartenir à la reine Victoria, à laquelle ils étaient obligés de les vendre.

La majorité des chefs, trouvant la protection trop chère, refusa d’y acquiescer. Mais les promesses et les présents eurent plus d’empire sur ces sauvages natures que les grands mots du capitaine Hobson, et la prise de possession fut confirmée. Depuis cette année 1840 jusqu’au jour où le Duncan quitta le golfe de la Clyde, que se passa-t-il? Rien que ne sût Jacques Paganel, rien dont il ne fût prêt à instruire ses compagnons.

«Madame, répondit-il aux questions de lady Helena, je vous répéterai ce que j’ai déjà eu l’occasion de dire, c’est que les néo-zélandais forment une population courageuse qui, après avoir cédé un instant, résiste pied à pied aux envahissements de l’Angleterre. Les tribus des maoris sont organisées comme les anciens clans de l’écosse. Ce sont autant de grandes familles qui reconnaissent un chef très soucieux d’une complète déférence à son égard. Les hommes de cette race sont fiers et braves, les uns grands, aux cheveux lisses, semblables aux maltais ou aux juifs de Bagdad et de race supérieure, les autres plus petits, trapus, pareils aux mulâtres, mais tous robustes, hautains et guerriers. Ils ont eu un chef célèbre nommé Hihi, un véritable Vercingétorix. Vous ne vous étonnerez donc pas si la guerre avec les anglais s’éternise sur le territoire d’Ika-Na-Maoui, car là se trouve la fameuse tribu des Waikatos, que William Thompson entraîne à la défense du sol.

– Mais les anglais, demanda John Mangles, ne sont-ils pas maîtres des principaux points de la Nouvelle-Zélande?

– Sans doute, mon cher John, répondit Paganel. Après la prise de possession du capitaine Hobson, devenu depuis gouverneur de l’île, neuf colonies se sont peu à peu fondées, de 1840 à 1862, dans les positions les plus avantageuses. De là, neuf provinces, quatre dans l’île du nord, les provinces d’Auckland, de Taranaki, de Wellington et de Hawkes-Bay; cinq dans l’île du sud, les provinces de Nelson, de Marlborough, de Canterbury, d’Otago et de Southland, avec une population générale de cent quatre-vingt mille trois cent quarante-six habitants, au 30 juin 1864. Des villes importantes et commerçantes se sont élevées de toutes parts. Quand nous arriverons à Auckland, vous serez forcés d’admirer sans réserve la situation de cette Corinthe du sud, dominant son isthme étroit jeté comme un pont sur l’océan Pacifique, et qui compte déjà douze mille habitants. À l’ouest, New-Plymouth; à l’est, Ahuhiri; au sud, Wellington, sont déjà des villes florissantes et fréquentées. Dans l’île de Tawai-Pounamou, vous auriez l’embarras du choix entre Nelson, ce Montpellier des antipodes, ce jardin de la Nouvelle-Zélande, Picton sur le détroit de Cook, Christchurch, Invercargill et Dunedin, dans cette opulente province d’Otago où affluent les chercheurs d’or du monde entier. Et remarquez qu’il ne s’agit point ici d’un assemblage de quelques cahutes, d’une agglomération de familles sauvages, mais bien de villes véritables, avec ports, cathédrales, banques, docks, jardins botaniques, muséums d’histoire naturelle, sociétés d’acclimatation, journaux, hôpitaux, établissements de bienfaisance, instituts philosophiques, loges de francs-maçons, clubs, sociétés chorales, théâtres et palais d’exposition universelle, ni plus ni moins qu’à Londres ou à Paris! Et si ma mémoire est fidèle, c’est en 1865, cette année même, et peut-être au moment où je vous parle, que les produits industriels du globe entier sont exposés dans un pays d’anthropophages!

– Quoi! Malgré la guerre avec les indigènes? demanda lady Helena.

– Les anglais, madame, se préoccupent bien d’une guerre! répliqua Paganel. Ils se battent et ils exposent en même temps. Cela ne les trouble pas. Ils construisent même des chemins de fer sous le fusil des néo-zélandais. Dans la province d’Auckland, le railway de Drury et le railway de Mere-Mere coupent les principaux points occupés par les révoltés. Je gagerais que les ouvriers font le coup de feu du haut des locomotives.

– Mais où en est cette interminable guerre? demanda John Mangles.

– Voilà six grands mois que nous avons quitté l’Europe, répondit Paganel, je ne puis donc savoir ce qui s’est passé depuis notre départ, sauf quelques faits, toutefois, que j’ai lus dans les journaux de Maryboroug et de Seymour, pendant notre traversée de l’Australie. Mais, à cette époque, on se battait fort dans l’île d’Ikana-Maoui.

– Et à quelle époque cette guerre a-t-elle commencé? dit Mary Grant.

– Vous voulez dire «recommencé», ma chère miss, répondit Paganel, car une première insurrection eut lieu en 1845. C’est vers la fin de 1863; mais longtemps avant, les maoris se préparaient à secouer le joug de la domination anglaise. Le parti national des indigènes entretenait une active propagande pour amener l’élection d’un chef maori. Il voulait faire un roi du vieux Potatau, et de son village situé entre les fleuves Waikato et Waipa, la capitale du nouveau royaume. Ce Potatau n’était qu’un vieillard plus astucieux que hardi, mais il avait un premier ministre énergique et intelligent, un descendant de la tribu de ces Ngatihahuas qui habitaient l’isthme d’Auckland avant l’occupation étrangère. Ce ministre, nommé William Thompson devint l’âme de cette guerre d’indépendance. Il organisa habilement des troupes maories. Sous son inspiration, un chef de Taranaki réunit dans une même pensée les tribus éparses; un autre chef du Waikato forma l’association du «land league», une vraie ligue du bien public, destinée à empêcher les indigènes de vendre leurs terres au gouvernement anglais; des banquets eurent lieu, comme dans les pays civilisés qui préludent à une révolution. Les journaux britanniques commencèrent à relever ces symptômes alarmants, et le gouvernement s’inquiéta sérieusement des menées de la «land league.» Bref, les esprits étaient montés, la mine prête à éclater. Il ne manquait plus que l’étincelle, ou plutôt le choc de deux intérêts pour la produire.

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