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Les Enfants Du Capitaine Grant

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Les Enfants Du Capitaine Grant
Название: Les Enfants Du Capitaine Grant
Автор: Verne Jules
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Enfants Du Capitaine Grant - читать бесплатно онлайн , автор Verne Jules

Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…

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– Les sauvages, répondit Paganel.

– Les sauvages! répliqua Glenarvan. Ne peut-on les éviter, en suivant la côte? D’ailleurs, une attaque de quelques misérables ne peut préoccuper dix européens bien armés et décidés à se défendre.

– Il ne s’agit pas de misérables, répondit Paganel en secouant la tête. Les néo-zélandais forment des tribus terribles, qui luttent contre la domination anglaise, contre les envahisseurs, qui les vainquent souvent, qui les mangent toujours!

– Des cannibales! s’écria Robert, des cannibales!»

Puis on l’entendit qui murmurait ces deux noms:

«Ma sœur! Madame Helena!

– Ne crains rien, mon enfant, lui répondit Glenarvan, pour rassurer le jeune enfant. Notre ami Paganel exagère!

– Je n’exagère rien, reprit Paganel. Robert a montré qu’il était un homme, et je le traite en homme, en ne lui cachant pas la vérité. Les néo-zélandais sont les plus cruels, pour ne pas dire les plus gourmands des anthropophages. Ils dévorent tout ce qui leur tombe sous la dent. La guerre n’est pour eux qu’une chasse à ce gibier savoureux qui s’appelle l’homme, et il faut l’avouer, c’est la seule guerre logique. Les européens tuent leurs ennemis et les enterrent. Les sauvages tuent leurs ennemis et les mangent, et, comme l’a fort bien dit mon compatriote Toussenel, le mal n’est pas tant de faire rôtir son ennemi quand il est mort, que de le tuer quand il ne veut pas mourir.

– Paganel, répondit le major, il y a matière à discussion, mais ce n’est pas le moment. Qu’il soit logique ou non d’être mangé, nous ne voulons pas qu’on nous mange. Mais comment le christianisme n’a-t-il pas encore détruit ces habitudes d’anthropophagie?

– Croyez-vous donc que tous les néo-zélandais soient chrétiens? Répliqua Paganel. C’est le petit nombre, et les missionnaires sont encore et trop souvent victimes de ces brutes. L’année dernière, le révérend Walkner a été martyrisé avec une horrible cruauté. Les maoris l’ont pendu. Leurs femmes lui ont arraché les yeux. On a bu son sang, on a mangé sa cervelle. Et ce meurtre a eu lieu en 1864, à Opotiki, à quelques lieues d’Auckland, pour ainsi dire sous les yeux des autorités anglaises. Mes amis, il faut des siècles pour changer la nature d’une race d’hommes. Ce que les maoris ont été, ils le seront longtemps encore. Toute leur histoire est faite de sang. Que d’équipages ils ont massacrés et dévorés, depuis les matelots de Tasman jusqu’aux marins du Hawes! et ce n’est pas la chair blanche qui les a mis en appétit. Bien avant l’arrivée des européens, les zélandais demandaient au meurtre l’assouvissement de leur gloutonnerie.

Maints voyageurs vécurent parmi eux, qui ont assisté à des repas de cannibales, où les convives n’étaient poussés que par le désir de manger d’un mets délicat, comme la chair d’une femme ou d’un enfant!

– Bah! fit le major, ces récits ne sont-ils pas dus pour la plupart à l’imagination des voyageurs?

On aime volontiers à revenir des pays dangereux et de l’estomac des anthropophages!

– Je fais la part de l’exagération, répondit Paganel. Mais des hommes dignes de foi ont parlé, les missionnaires Kendall, Marsden, les capitaines Dillon, d’Urville, Laplace, d’autres encore, et je crois à leurs récits, je dois y croire. Les zélandais sont cruels par nature. À la mort de leurs chefs, ils immolent des victimes humaines. Ils prétendent par ces sacrifices apaiser la colère du défunt, qui pourrait frapper les vivants, et en même temps lui offrir des serviteurs pour l’autre vie! Mais comme ils mangent ces domestiques posthumes, après les avoir massacrés, on est fondé à croire que l’estomac les y pousse plus que la superstition.

– Cependant, dit John Mangles, j’imagine que la superstition joue un rôle dans les scènes du cannibalisme. C’est pourquoi, si la religion change, les mœurs changeront aussi.

– Bon, ami John, répondit Paganel. Vous soulevez là cette grave question de l’origine de l’anthropophagie. Est-ce la religion, est-ce la faim qui a poussé les hommes à s’entre-dévorer? Cette discussion serait au moins oiseuse en ce moment. Pourquoi le cannibalisme existe? La question n’est pas encore résolue; mais il existe, fait grave, dont nous n’avons que trop de raisons de nous préoccuper.»

Paganel disait vrai. L’anthropophagie est passée à l’état chronique dans la Nouvelle-Zélande, comme aux îles Fidji ou au détroit de Torrès. La superstition intervient évidemment dans ces odieuses coutumes, mais il y a des cannibales, parce qu’il y a des moments où le gibier est rare et la faim grande. Les sauvages ont commencé par manger de la chair humaine pour satisfaire les exigences d’un appétit rarement rassasié; puis, les prêtres ont ensuite réglementé et sanctifié ces monstrueuses habitudes. Le repas est devenu cérémonie, voilà tout.

D’ailleurs, aux yeux des maoris, rien de plus naturel que de se manger les uns les autres. Les missionnaires les ont souvent interrogés à propos du cannibalisme. Ils leur ont demandé pourquoi ils dévoraient leurs frères. À quoi les chefs répondaient que les poissons mangent les poissons, que les chiens mangent les hommes, que les hommes mangent les chiens, et que les chiens se mangent entre eux. Dans leur théogonie même, la légende rapporte qu’un dieu mangea un autre dieu. Avec de tels précédents, comment résister au plaisir de manger son semblable?

De plus, les zélandais prétendent qu’en dévorant un ennemi mort on détruit sa partie spirituelle. On hérite ainsi de son âme, de sa force, de sa valeur, qui sont particulièrement renfermés dans la cervelle. Aussi, cette portion de l’individu figure-t-elle dans les festins comme plat d’honneur et de premier choix.

Cependant, Paganel soutint, non sans raison, que la sensualité, le besoin surtout, excitaient les zélandais à l’anthropophagie, et non seulement les sauvages de l’Océanie, mais les sauvages de l’Europe.

«Oui, ajouta-t-il, le cannibalisme a longtemps régné chez les ancêtres des peuples les plus civilisés, et ne prenez point cela pour une personnalité, chez les écossais particulièrement.

– Vraiment? dit Mac Nabbs.

– Oui, major, reprit Paganel. Quand vous lirez certains passages de saint Jérôme sur les atticoli de l’écosse, vous verrez ce qu’il faut penser de vos aïeux! Et sans remonter au delà des temps historiques, sous le règne d’Élisabeth, à l’époque même où Shakespeare rêvait à son Shylock, Sawney Bean, bandit écossais, ne fut-il pas exécuté pour crime de cannibalisme? Et quel sentiment l’avait porté à manger de la chair humaine? La religion? Non, la faim.

– La faim? dit John Mangles.

– La faim, répondit Paganel, mais surtout cette nécessité pour le carnivore de refaire sa chair et son sang par l’azote contenu dans les matières animales. C’est bien de fournir au travail des poumons au moyen des plantes tubéreuses et féculentes. Mais qui veut être fort et actif doit absorber ces aliments plastiques qui réparent les muscles. Tant que les maoris ne seront pas membres de la société des légumistes, ils mangeront de la viande, et, pour viande, de la chair humaine.

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