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Le Crime De Sylvestre Bonnard

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Le Crime De Sylvestre Bonnard
Название: Le Crime De Sylvestre Bonnard
Автор: France Anatole
Дата добавления: 16 январь 2020
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Le Crime De Sylvestre Bonnard - читать бесплатно онлайн , автор France Anatole

Sylvestre Bonnard, membre de l'Institut, est un historien et un philologue, dot? d'une ?rudition non d?nu?e d'ironie. «Savoir n'est rien – dit-il un jour – imaginer est tout.» Il m?ne une vie aust?re au milieu de ses livres. Mais il consacre ?galement tous ses efforts ? trouver un manuscrit du XIVe si?cle, la L?gende dor?e de Jacques de Voragine, dont il r?ve comme un enfant peut convoiter quelque jouet extraordinaire. Au cours d'un voyage en Sicile, il fait la connaissance du prince et de la princesse Tr?pof, mais ne parvient pas ? mettre la main sur l'ouvrage. ? son retour ? Paris, il a la douleur de voir le pr?cieux livre lui ?chapper encore, lors d'une vente aux ench?res. Mais il obtiendra finalement l'objet convoit?, d'une mani?re que le soin au lecteur de d?couvrir…

Le hasard lui fait rencontrer la petite fille d'une femme qu'il a jadis aim?e et, pour prot?ger l'enfant d'un tuteur abusif, il l'enl?ve…

Ce roman, spirituel, g?n?reux et tendre, fit conna?tre Anatole France.

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Et pourtant je suis las, et je sens qu’on ne peut se reposer au sein de cette ville qui pense tant, qui m’a appris à penser et qui m’invite sans cesse à penser. Comment n’être point agité au milieu de ces livres qui sollicitent sans cesse ma curiosité et la fatiguent sans la satisfaire? Tantôt, c’est une date qu’il faut chercher, tantôt un lieu qu’il importe de déterminer précisément ou quelque vieux terme dont il est intéressant de connaître le vrai sens. Des mots? – Eh! oui, des mots. Philologue, je suis leur souverain, ils sont mes sujets, et je leur donne, en bon roi, ma vie entière. Ne pourrai-je abdiquer un jour? Je devine qu’il y a quelque part, loin d’ici, à l’orée d’un bois, une maisonnette où je trouverais le calme dont j’ai besoin, en attendant qu’un plus grand calme, irrévocable celui-là, m’enveloppe tout entier. Je rêve un banc sur le seuil et des champs à perte de vue. Mais il faudrait qu’un frais visage sourît près de moi pour refléter et concentrer toute cette fraîcheur; je me croirais grand-père, et tout le vide de ma vie serait comblé.

Je ne suis point un homme violent et pourtant je m’irrite aisément, et tous mes ouvrages m’ont causé autant de chagrins que de plaisirs. Je ne sais comment il se fit que je songeai alors à la très vaine et très négligeable impertinence que se permit, à mon égard, voilà trois mois, mon jeune ami du Luxembourg. Je ne lui donne pas par ironie ce nom d’ami, car j’aime la jeunesse studieuse avec ses témérités et ses écarts d’esprit. Toutefois mon jeune ami passa les bornes. Maître Ambroise Paré, qui procéda le premier à la ligature des artères et qui, ayant trouvé la chirurgie exercée par des barbiers empiriques, l’éleva à la hauteur où elle est aujourd’hui, fut attaqué dans sa vieillesse par tous les apprentis porte-lancette. Pris à partie en termes injurieux par un jeune étourdi qui pouvait être le meilleur fils du monde, mais qui n’avait pas le sentiment du respect, le vieux maître lui répondit dans son traité de la Mumie, de la Licorne, des Venins et de la Peste. «Je le prie, lui dit le grand homme, je le prie, s’il a envie d’opposer quelques contredits à ma réplique, qu’il quitte les animosités et qu’il traite plus doucement le bon vieillard.» Cette réponse est admirable sous la plume d’Ambroise Paré; mais, vînt-elle d’un rebouteux de village, blanchi dans le travail et moqué par un jouvenceau, elle serait louable encore.

On croira peut-être que ce souvenir n’était que l’éveil d’une basse rancune. Je le crus aussi et je m’accusai de m’attacher misérablement aux propos d’un enfant qui ne sait ce qu’il dit. Par bonheur, mes réflexions à ce sujet prirent ensuite un meilleur cours; c’est pourquoi je les note sur mon cahier. Je me rappelai qu’un beau jour de ma vingtième année (il y a de cela près d’un demi-siècle), je me promenais dans ce même jardin du Luxembourg avec quelques camarades. Nous parlâmes de nos vieux maîtres, et un de nous vint à nommer M. Petit-Radel, érudit estimable qui jeta le premier quelque lumière sur les origines étrusques, mais qui eut le malheur de dresser un tableau chronologique des amants d’Hélène. Ce tableau nous fit beaucoup rire, et je m’écriai: «Petit-Radel est un sot, non pas en trois lettres, mais bien en douze volumes.»

Cette parole d’adolescent est trop légère pour peser sur la conscience d’un vieillard. Puissé-je n’avoir lancé dans la bataille de la vie que des traits aussi innocents! Mais je me demande aujourd’hui si, dans mon existence, je n’ai pas fait, sans m’en douter, quelque chose d’aussi ridicule que le tableau chronologique des amants d’Hélène. Le progrès des sciences rend inutiles les ouvrages qui ont le plus aidé à ce progrès. Comme ces ouvrages ne servent plus à grand-chose, la jeunesse croit de bonne foi qu’ils n’ont jamais servi à rien; elle les méprise et, pour peu qu’il s’y trouve quelque idée trop surannée, elle en rit. Voilà comment, à vingt ans, je m’amusai de M. Petit-Radel et de son tableau de chronologie galante; voilà comment hier, au Luxembourg, mon jeune et irrévérencieux ami…

Rentre en toi-même, Octave, et cesse de te plaindre.

Quoi! tu veux qu’on t’épargne et n’as rien épargné.

6 juin.

C’était le premier jeudi de juin. Je fermai mes livres et pris congé du saint abbé Droctovée, qui, jouissant de la béatitude céleste, n’est pas bien pressé, je pense, de voir son nom et ses travaux glorifiés, sur cette terre, dans une humble compilation sortie de mes mains. Le dirai-je? Ce pied de mauve que je vis l’autre semaine visité par une abeille m’occupe plus que tous les vieux abbés crossés et mitrés. Et tantôt encore, ma gouvernante me surprit à la fenêtre de la cuisine examinant à la loupe des fleurs de giroflée. Il y a dans un livre de Sprengel que j’ai lu dans ma première jeunesse, alors que je lisais tout, quelques idées sur les amours des fleurs qui me reviennent à l’esprit après un demi-siècle d’oubli et qui, aujourd’hui, m’intéressent à ce point que je regrette de n’avoir pas consacré les humbles facultés de mon âme à l’étude des insectes et des plantes.

C’était en cherchant ma cravate que je faisais ces réflexions. Mais, ayant fouillé inutilement un très grand nombre de tiroirs, j’eus recours à ma gouvernante. Thérèse vint clopin-clopant:

– Monsieur, me dit-elle, il fallait me dire que vous sortiez et je vous aurais donné votre cravate.

– Mais, Thérèse, répondis-je, ne serait-il pas meilleur de la placer dans un endroit où je pusse la trouver sans votre aide?

Thérèse ne daigna pas me répondre.

Thérèse ne me laisse plus la disposition de rien. Je ne puis avoir un mouchoir sans le lui demander, et, comme elle est sourde, impotente et que, de plus, elle perd tout à fait la mémoire, je languis dans un perpétuel dénuement. Cependant elle jouit avec un si tranquille orgueil de son autorité domestique, que je ne me sens pas le courage de tenter un coup d’État contre le gouvernement de mes armoires.

– Ma cravate, Thérèse! m’entendez-vous? ma cravate! ou, si vous me désespérez par de nouvelles lenteurs, ce n’est pas une cravate qu’il me faudra, c’est une corde pour me pendre.

– Vous êtes donc bien pressé, monsieur, me répond Thérèse. Votre cravate n’est pas perdue. Rien ne se perd ici, car j’ai soin de tout. Mais laissez-moi au moins le temps de la trouver.

» Voilà pourtant, pensai-je, voilà le résultat d’un demi-siècle de dévouement. Ah! si, par bonheur, cette inexorable Thérèse avait, une fois, une seule fois dans sa vie, manqué à ses devoirs de servante, si elle s’était trouvée une minute en faute, elle n’aurait pas pris sur moi cet empire inflexible et j’oserais du moins lui résister. Mais résiste-t-on à la vertu? Les gens qui n’eurent point de faiblesses sont terribles; on n’a point de prise sur eux. Voyez plutôt Thérèse: pas un vice par où la prendre. Elle ne doute ni d’elle, ni de Dieu, ni du monde. C’est la femme forte, c’est la vierge sage de l’Écriture et, si les hommes l’ignorent, je la connais. Elle apparaît dans mon âme tenant à la main une lampe, une humble lampe de ménage qui brille sous les solives d’un toit rustique et qui ne s’éteindra jamais au bout de ce bras maigre, tors et fort comme un sarment.»

– Thérèse, ma cravate! Ne savez-vous pas, malheureuse, que c’est aujourd’hui le premier jeudi de juin et que mademoiselle Jeanne m’attend? La maîtresse du pensionnat a dû faire cirer à point le plancher du parloir; je suis sûr qu’on s’y mire à l’heure qu’il est, et ce sera une distraction pour moi, quand je m’y romprai les os, ce qui ne peut tarder, d’y voir comme dans une glace ma triste figure. Prenant alors pour modèle l’aimable et admirable héros dont l’image est ciselée sur la canne de l’oncle Victor, je m’efforcerai de montrer un visage riant et une âme constante. Voyez ce beau soleil. Les quais en sont tout dorés et la Seine sourit par d’innombrables petites rides étincelantes. La ville est d’or; une poussière blonde flotte sur ses beaux contours comme une chevelure… Thérèse, ma cravate!… Ah! je comprends aujourd’hui le bonhomme Chrysale, qui serrait ses rabats dans un gros Plutarque. À son exemple, je mettrai désormais toutes mes cravates entre les feuillets des Acta sanctorum .

Thérèse me laissait dire et cherchait en silence. J’entendis qu’on sonnait doucement à la porte.

– Thérèse, dis-je, on sonne. Donnez-moi ma cravate et allez ouvrir; ou bien allez ouvrir et, avec l’aide du ciel, vous me donnerez ensuite ma cravate. Mais ne restez pas ainsi, je vous en prie, entre ma commode et notre porte, comme une haquenée, si j’ose dire, entre deux selles.

Thérèse marcha vers la porte comme à l’ennemi. Mon excellente gouvernante est devenue très inhospitalière. L’étranger lui est suspect. À l’entendre, cette disposition procède d’une longue expérience des hommes. Je n’eus pas le temps de considérer si la même expérience faite par un autre expérimentateur donnerait le même résultat. Maître Mouche m’attendait dans mon cabinet.

Maître Mouche est encore plus jaune que je n’avais cru. Il a des lunettes bleues, et ses prunelles trottent dessous, comme des souris derrière un paravent.

Maître Mouche s’excuse d’être venu me déranger dans un moment… Il ne caractérise pas ce moment, mais je pense qu’il veut dire un moment où je n’ai pas de cravate. Ce n’est pas de ma faute, comme vous savez. Maître Mouche, qui n’en sait rien, n’en paraît d’ailleurs nullement offensé. Il craint seulement d’être importun. Je le rassure à demi. Il me dit que c’est comme tuteur de mademoiselle Alexandre qu’il est venu causer avec moi. Tout d’abord il m’invite à ne tenir aucun compte des restrictions qu’il a cru devoir apporter primitivement à l’autorisation à nous accordée de voir mademoiselle Jeanne dans son pensionnat. Désormais l’établissement de mademoiselle Préfère me serait ouvert tous les jours de midi à quatre heures. Sachant l’intérêt que je porte à cette jeune fille, il croit de son devoir de me renseigner sur la personne à laquelle il a confié sa pupille. Mademoiselle Préfère, qu’il connaît depuis longtemps, est en possession de toute sa confiance. Mademoiselle Préfère est, selon lui, une personne éclairée, de bon conseil et de bonnes mœurs.

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