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Les Possedes

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Les Possedes
Название: Les Possedes
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Possedes - читать бесплатно онлайн , автор Dosto?evski Fedor Mikha?lovitch

«Est-il possible de croire? S?rieusement et effectivement? Tout est l?.» Stavroguine envo?te tous ceux qui l'approchent, hommes ou femmes. Il ne trouve de limite ? son immense orgueil que dans l'existence de Dieu. Il la nie et tombe dans l'absurdit? de la libert? pour un homme seul et sans raison d'?tre. Tous les personnages de ce grand roman sont poss?d?s par un d?mon, le socialisme ath?e, le nihilisme r?volutionnaire ou la superstition religieuse. Ignorant les limites de notre condition, ces id?ologies sont incapables de rendre compte de l'homme et de la soci?t? et appellent un terrorisme destructeur. Sombre trag?die d'amour et de mort, «Les Poss?d?s» sont l'incarnation g?niale des doutes et des angoisses de Dosto?evski sur l'avenir de l'homme et de la Russie. D?s 1870, il avait pressenti les dangers du totalitarisme au XXe si?cle.

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– Sans doute, sans doute.

– Mais si cette lettre émanait en effet de quelqu’un qui offrit réellement ses services comme dénonciateur?

– C’est invraisemblable, répliqua sèchement Pierre Stépanovitch. – Ce pardon que la troisième section doit envoyer par le télégraphe, cette demande d’une pension, qu’est-ce que cela signifie? La mystification est évidente.

– Oui, oui, reconnut Von Lembke honteux de la supposition qu’il venait d’émettre.

– Savez-vous ce qu’il faut faire? Laissez-moi cette lettre. Je vous en découvrirai certainement l’auteur. Je le trouverai plus vite qu’aucun de vos agents.

– Prenez-là, consentit André Antonovitch, non sans quelque hésitation, il est vrai.

– Vous l’avez montrée à quelqu’un?

– À personne; comment donc?

– Pas même à Julie Mikhaïlovna?

– Ah! Dieu m’en préserve! Et, pour l’amour de Dieu, ne la lui montrez pas non plus! s’écria Von Lembke effrayé. – Elle serait si agitée… et elle se fâcherait terriblement contre moi.

– Oui, vous seriez le premier à avoir sur les doigts, elle dirait que si l’on vous écrit ainsi, c’est parce que vous l’avez mérité. Nous connaissons la logique des femmes. Allons, adieu. D’ici à trois jours peut-être j’aurai découvert votre correspondant anonyme. Surtout n’oubliez pas de quoi nous sommes convenus!

IV

Pierre Stépanovitch n’était peut-être pas bête, mais Fedka l’avait bien jugé en disant qu’il «se représentait l’homme à sa façon, et qu’ensuite il ne démordait plus de son idée». Le jeune homme quitta le gouverneur, persuadé qu’il l’avait pleinement mis en repos au moins pour six jours, délai dont il avait absolument besoin. Or il se trompait, et cela parce que dès l’abord il avait décidé une fois pour toutes qu’André Antonovitch était un fieffé nigaud.

Comme tous les martyrs du soupçon, André Antonovitch croyait toujours volontiers dans le premier moment ce qui semblait de nature à fixer ses incertitudes. La nouvelle tournure des choses commença par s’offrir à lui sous un aspect assez agréable, malgré certaines complications qui ne laissaient pas de le préoccuper. Du moins ses anciens doutes s’évanouirent. D’ailleurs, depuis quelques jours il était si las, il sentait un tel accablement qu’en dépit d’elle-même, son âme avait soif de repos. Mais, hélas! il n’était pas encore tranquille. Un long séjour à Pétersbourg avait laissé dans son esprit des traces ineffaçables. L’histoire officielle et même secrète de la «jeune génération» lui était assez connue, – c’était un homme curieux, et il collectionnait les proclamations, – mais jamais il n’en avait compris le premier mot. À présent il était comme dans un bois: tous ses instincts lui faisaient pressentir dans les paroles de Pierre Stépanovitch quelque chose d’absurde, quelque chose qui était en dehors de toutes les formes et de toutes les conventions, – «pourtant le diable sait ce qui peut arriver dans cette «nouvelle génération», et comment s’y font les affaires», se disait-il fort perplexe.

Sur ces entrefaites, Blum qui avait guetté le départ de Pierre Stépanovitch rentra dans le cabinet de son patron. Ce Blum appartenait à la catégorie, fort restreinte en Russie, des Allemands qui n’ont pas de chance. Parent éloigné et ami d’enfance de Von Lembke, il lui avait voué un attachement sans bornes. Du reste, André Antonovitch était le seul homme au monde qui aimât Blum; il l’avait toujours protégé, et, quoique d’ordinaire très soumis aux volontés de son épouse, il s’était toujours refusé à lui sacrifier cet employé qu’elle détestait. Dans les premiers temps de son mariage Julie Mikhaïlovna avait eu beau jeter feu et flamme, recourir même à l’évanouissement, Von Lembke était resté inébranlable.

Physiquement, Blum était un homme roux, grand, voûté, à la physionomie maussade et triste. Il joignait à une extrême humilité un entêtement de taureau. Chez nous il vivait fort retiré, ne faisait point de visites et ne s’était lié qu’avec un pharmacien allemand. Depuis longtemps Von Lembke l’avait mis dans la confidence de ses peccadilles littéraires. Durant des six heures consécutives le pauvre employé était condamné à entendre la lecture du roman de son supérieur, il suait à grosses gouttes, luttait de son mieux contre le sommeil et s’efforçait de sourire; puis, de retour chez lui, il déplorait avec sa grande perche de femme la malheureuse faiblesse de leur bienfaiteur pour la littérature russe.

Lorsque Blum entra, André Antonovitch le regarda d’un air de souffrance.

– Je te prie, Blum, de me laisser en repos, se hâta-t-il de lui dire, voulant évidemment l’empêcher de reprendre la conversation que l’arrivée de Pierre Stépanovitch avait interrompue.

– Et pourtant cela pourrait se faire de la façon la plus discrète, sans attirer aucunement l’attention; vous avez de pleins pouvoirs, insista avec une fermeté respectueuse l’employé qui, l’échine courbée, s’avançait à petits pas vers le gouverneur.

– Blum, tu m’es tellement dévoué que ton zèle m’épouvante.

– Vous dites toujours des choses spirituelles, et, satisfait de vos paroles, vous vous endormez tranquillement, mais par cela même vous vous nuisez.

– Blum, je viens de me convaincre que ce n’est pas du tout cela, pas du tout.

– N’est-ce pas d’après les paroles de ce jeune homme fourbe et dépravé que vous-même soupçonnez? Il vous a amadoué en faisant l’éloge de votre talent littéraire.

– Blum, tu dérailles; ton projet est une absurdité, te dis-je. Nous ne trouverons rien, nous provoquerons un vacarme terrible, ensuite on se moquera de nous, et puis Julie Mikhaïlovna…

L’employé, la main droite appuyée sur son cœur, s’approcha d’un pas ferme de Von Lembke.

– Nous trouverons incontestablement tout ce que nous cherchons, répondit-il; – la descente se fera à l’improviste, de grand matin; nous aurons tous les ménagements voulus pour la personne, et nous respecterons strictement les formes légales. Des jeunes gens qui sont allés là plus d’une fois, Liamchine et Téliatnikoff, assurent que nous y trouverons tout ce que nous désirons. Personne ne s’intéresse à M. Verkhovensky. La générale Stavroguine lui a ouvertement retiré sa protection, et tous les honnêtes gens, si tant est qu’il en existe dans cette ville de brutes, sont convaincus que là s’est toujours cachée la source de l’incrédulité et du socialisme. Il a chez lui tous les livres défendus, les Pensées de Ryléieff [18], les œuvres complètes de Hertzen… À tout hasard j’ai un catalogue approximatif…

– Ô mon Dieu, ces livres sont dans toutes les bibliothèques; que tu es simple, mon pauvre Blum!

– Et beaucoup de proclamations, continua l’employé sans écouter son supérieur. – Nous finirons par découvrir infailliblement l’origine des écrits séditieux qui circulent maintenant ici. Le jeune Verkhovensky me paraît très sujet à caution.

– Mais tu confonds le père avec le fils. Ils ne s’entendent pas; le fils se moque du père au vu et au su de tout le monde.

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