Les Enfants Du Capitaine Grant
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Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…
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– Soixante-quinze milles? Répliqua le major d’un ton peu convaincu.
– Tout autant, affirma Paganel. Mais j’ajoute que ces conflagrations se propagent sur une grande échelle et atteignent souvent un développement considérable.
– Qui met le feu aux prairies? demanda Robert.
– Quelquefois la foudre, quand l’herbe est desséchée par les chaleurs; quelquefois aussi la main des indiens.
– Et dans quel but?
– Ils prétendent, – je ne sais jusqu’à quel point cette prétention est fondée, – qu’après un incendie des pampas les graminées y poussent mieux. Ce serait alors un moyen de revivifier le sol par l’action des cendres. Pour mon compte, je crois plutôt que ces incendies sont destinés à détruire des milliards d’ixodes, sorte d’insectes parasites qui incommodent particulièrement les troupeaux.
– Mais ce moyen énergique, dit le major, doit coûter la vie à quelques-uns des bestiaux qui errent par la plaine?
– Oui, il en brûle; mais qu’importe dans le nombre?
– Je ne réclame pas pour eux, reprit Mac Nabbs, c’est leur affaire, mais pour les voyageurs qui traversent la pampa. Ne peut-il arriver qu’ils soient surpris et enveloppés par les flammes?
– Comment donc! s’écria Paganel avec un air de satisfaction visible, cela arrive quelquefois, et, pour ma part, je ne serais pas fâché d’assister à un pareil spectacle.
– Voilà bien notre savant, répondit Glenarvan, il pousserait la science jusqu’à se faire brûler vif.
– Ma foi non, mon cher Glenarvan, mais on a lu son Cooper, et Bas De Cuir nous a enseigné le moyen d’arrêter la marche des flammes en arrachant l’herbe autour de soi dans un rayon de quelques toises. Rien n’est plus simple. Aussi, je ne redoute pas l’approche d’un incendie, et je l’appelle de tous mes vœux!»
Mais les désirs de Paganel ne devaient pas se réaliser, et s’il rôtit à moitié, ce fut uniquement à la chaleur des rayons du soleil, qui versait une insoutenable ardeur. Les chevaux haletaient sous l’influence de cette température tropicale. Il n’y avait pas d’ombre à espérer, à moins qu’elle ne vînt de quelque rare nuage voilant le disque enflammé; l’ombre courait alors sur le sol uni, et les cavaliers, poussant leur monture, essayaient de se maintenir dans la nappe fraîche que les vents d’ouest chassaient devant eux. Mais les chevaux, bientôt distancés, demeuraient en arrière, et l’astre dévoilé arrosait d’une nouvelle pluie de feu le terrain calciné des pampas.
Cependant, quand Wilson avait dit que la provision d’eau ne manquerait pas, il comptait sans la soif inextinguible qui dévora ses compagnons pendant cette journée; quand il avait ajouté que l’on rencontrerait quelque rio sur la route, il s’était trop avancé. En effet, non seulement les rios manquaient, car la planéité du sol ne leur offrait aucun lit favorable, mais les mares artificielles creusées de la main des indiens étaient également taries.
En voyant les symptômes de sécheresse s’accroître de mille en mille, Paganel fit quelques observations à Thalcave, et lui demanda où il comptait trouver de l’eau.
«Au lac Salinas, répondit l’indien.
– Et quand y arriverons-nous?
– Demain soir.»
Le soir, on fit halte après une traite de trente milles. Chacun comptait sur une bonne nuit pour se remettre des fatigues du jour, et elle fut précisément troublée par une nuée de moustiques et de maringouins. Leur présence indiquait un changement du vent, qui, en effet, tourna d’un quart et passa dans le nord. Ces maudits insectes disparaissent généralement avec les brises du sud ou du sud-ouest.
Si le major gardait son calme, même au milieu des petites misères de la vie, Paganel, au contraire, s’indignait des taquineries du sort. Il donna au diable moustiques et maringouins, et regretta fort l’eau acidulée qui eût calmé les mille cuissons de ses piqûres. Bien que le major essayât de le consoler en lui disant que sur les trois cent mille espèces d’insectes que comptent les naturalistes on devait s’estimer heureux de n’avoir affaire qu’à deux seulement, il se réveilla de fort mauvaise humeur.
Cependant, il ne se fit point prier pour repartir dès l’aube naissante, car il s’agissait d’arriver le jour même au lac Salinas. Les chevaux étaient très fatigués; ils mouraient de soif, et quoique leurs cavaliers se fussent privés pour eux, leur ration avait été très restreinte. La sécheresse était encore plus forte, et la chaleur non moins intolérable sous le souffle poussiéreux du vent du nord, ce simoun des pampas.
Pendant cette journée, la monotonie du voyage fut un instant interrompue. Mulrady, qui marchait en avant, revint sur ses pas en signalant l’approche d’un parti d’indiens. Cette rencontre fut appréciée diversement. Glenarvan songea aux renseignements que ces indigènes pourraient lui fournir sur les naufragés du Britannia. Thalcave, pour son compte, ne se réjouit guère de trouver sur sa route les indiens nomades de la prairie; il les tenait pour pillards et voleurs, et ne cherchait qu’à les éviter. Suivant ses ordres, la petite troupe se massa, et les armes furent mises en état.
Bientôt, on aperçut le détachement indien. Il se composait seulement d’une dizaine d’indigènes, ce qui rassura le patagon. Les indiens s’approchèrent à une centaine de pas. On pouvait facilement les distinguer. C’étaient des naturels appartenant à cette race pampéenne, balayée en 1833 par le général Rosas. Leur front élevé, bombé et non fuyant, leur haute taille, leur couleur olivâtre, en faisaient de beaux types de la race indienne.
Ils étaient vêtus de peaux de guanaques ou de mouffettes, et portaient avec la lance, longue de vingt pieds, couteaux, frondes, bolas et lazos.
Leur dextérité à manier le cheval indiquait d’habiles cavaliers.
Ils s’arrêtèrent à cent pas et parurent conférer, criant et gesticulant. Glenarvan s’avança vers eux.
Mais il n’avait pas franchi deux toises, que le détachement, faisant volte-face, disparut avec une incroyable vélocité.
«Les lâches! s’écria Paganel.
– Ils s’enfuient trop vite pour d’honnêtes gens, dit Mac Nabbs.
– Quels sont ces indiens? demanda Paganel à Thalcave.
– Gauchos, répondit le patagon.
– Des gauchos! reprit Paganel, en se tournant vers ses compagnons, des gauchos! Alors nous n’avions pas besoin de prendre tant de précautions!
– Pourquoi cela? dit le major.
– Parce que les gauchos sont des paysans inoffensifs.
– Vous croyez, Paganel?
– Sans doute, ceux-ci nous ont pris pour des voleurs et ils se sont enfuis.
– Je crois plutôt qu’ils n’ont pas osé nous attaquer, répondit Glenarvan, très vexé de n’avoir pu communiquer avec ces indigènes, quels qu’ils fussent.