Les Enfants Du Capitaine Grant
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Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…
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Si l’ombre n’est pas épaisse ni l’obscurité profonde sous ces dômes de verdure, cela tient à ce que les arbres présentent une anomalie curieuse dans la disposition de leurs feuilles. Aucune n’offre sa face au soleil, mais bien sa tranche acérée. L’œil n’aperçoit que des profils dans ce singulier feuillage. Aussi, les rayons du soleil glissent-ils jusqu’à terre, comme s’ils passaient entre les lames relevées d’une persienne.
Chacun fit cette remarque et parut surpris. Pourquoi cette disposition particulière? Cette question s’adressait naturellement à Paganel. Il répondit en homme que rien n’embarrasse.
«Ce qui m’étonne ici, dit-il, ce n’est pas la bizarrerie de la nature; la nature sait ce qu’elle fait, mais les botanistes ne savent pas toujours ce qu’ils disent. La nature ne s’est pas trompée en donnant à ces arbres ce feuillage spécial, mais les hommes se sont fourvoyés en les appelant des «eucalyptus.»
– Que veut dire ce mot? demanda Mary Grant.
– Il vient de (…), et signifie je couvre bien. On a eu soin de commettre l’erreur en grec afin qu’elle fût moins sensible, mais il est évident que l’eucalyptus couvre mal.
– Accordé, mon cher Paganel, répondit Glenarvan, et maintenant, apprenez-nous pourquoi les feuilles poussent ainsi.
– Par une raison purement physique, mes amis, répondit Paganel, et que vous comprendrez sans peine. Dans cette contrée où l’air est sec, où les pluies sont rares, où le sol est desséché, les arbres n’ont besoin ni de vent ni de soleil. L’humidité manquant, la sève manque aussi. De là ces feuilles étroites qui cherchent à se défendre elles-mêmes contre le jour et à se préserver d’une trop grande évaporation. Voilà pourquoi elles se présentent de profil et non de face à l’action des rayons solaires. Il n’y a rien de plus intelligent qu’une feuille.
– Et rien de plus égoïste! répliqua le major. Celles-ci n’ont songé qu’à elles, et pas du tout aux voyageurs.»
Chacun fut un peu de l’avis de Mac Nabbs, moins Paganel, qui, tout en s’essuyant le front, se félicitait de marcher sous des arbres sans ombre.
Cependant, cette disposition du feuillage était regrettable; la traversée de ces forêts est souvent très longue, et pénible par conséquent, puisque rien ne protège le voyageur contre les ardeurs du jour.
Pendant toute la journée, le chariot roula sous ces interminables travées d’eucalyptus. On ne rencontra ni un quadrupède, ni un indigène. Quelques kakatoès habitaient les cimes de la forêt; mais, à cette hauteur, on les distinguait à peine, et leur babillage se changeait en imperceptible murmure.
Parfois, un essaim de perruches traversait une allée lointaine et l’animait d’un rapide rayon multicolore.
Mais, en somme, un profond silence régnait dans ce vaste temple de verdure, et le pas des chevaux, quelques mots échangés dans une conversation décousue, les roues du chariot qui grinçaient, et, de temps en temps, un cri d’Ayrton excitant son indolent attelage, troublaient seuls ces immenses solitudes.
Le soir venu, on campa au pied d’eucalyptus qui portaient la marque d’un feu assez récent. Ils formaient comme de hautes cheminées d’usines, car la flamme les avait creusés intérieurement dans toute leur longueur. Avec le seul revêtement d’écorce qui leur restait, ils ne s’en portaient pas plus mal.
Cependant, cette fâcheuse habitude des squatters ou des indigènes finira par détruire ces magnifiques arbres, et ils disparaîtront comme ces cèdres du Liban, vieux de quatre siècles, que brûle la flamme maladroite des campements. Olbinett, suivant le conseil de Paganel, alluma le feu du souper dans un de ces troncs tubulaires; il obtint aussitôt un tirage considérable, et la fumée alla se perdre dans le massif assombri du feuillage. On prit les précautions voulues pour la nuit, et Ayrton, Mulrady, Wilson, John Mangles, se relayant tour à tour, veillèrent jusqu’au lever du soleil.
Pendant toute la journée du 3 janvier l’interminable forêt multiplia ses longues avenues symétriques.
C’était à croire qu’elle ne finirait pas. Cependant, vers le soir, les rangs des arbres s’éclaircirent, et à quelques milles, dans une petite plaine, apparut une agglomération de maisons régulières.
«Seymour! s’écria Paganel. Voilà la dernière ville que nous devons rencontrer avant de quitter la province de Victoria.
– Est-elle importante? demanda lady Helena.
– Madame, répondit Paganel, c’est une simple paroisse qui est en train de devenir une municipalité.
– Y trouverons-nous un hôtel convenable? dit Glenarvan.
– Je l’espère, répondit le géographe.
– Eh bien, entrons dans la ville, car nos vaillantes voyageuses ne seront pas fâchées, j’imagine, de s’y reposer une nuit.
– Mon cher Edward, répondit lady Helena, Mary et moi nous acceptons, mais à la condition que cela ne causera ni un dérangement, ni un retard.
– Aucunement, répondit lord Glenarvan; notre attelage est fatigué; d’ailleurs, demain, nous repartirons à la pointe du jour.»
Il était alors neuf heures. La lune s’approchait de l’horizon et ne jetait plus que des rayons obliques, noyés dans la brume. L’obscurité se faisait peu à peu. Toute la troupe pénétra dans les larges rues de Seymour sous la direction de Paganel, qui semblait toujours parfaitement connaître ce qu’il n’avait jamais vu. Mais son instinct le guidait, et il arriva droit à Campbell’s north british hôtel.
Chevaux et bœufs furent menés à l’écurie, le chariot remisé, et les voyageurs conduits à des chambres assez confortables. À dix heures, les convives prenaient place à une table, sur laquelle Olbinett avait jeté le coup d’œil du maître. Paganel venait de courir la ville en compagnie de Robert, et il raconta son impression nocturne d’une très laconique façon. Il n’avait absolument rien vu.
Cependant, un homme moins distrait eût remarqué certaine agitation dans les rues de Seymour: des groupes étaient formés çà et là, qui se grossissaient peu à peu; on causait à la porte des maisons; on s’interrogeait avec une inquiétude réelle; quelques journaux du jour étaient lus à haute voix, commentés, discutés. Ces symptômes ne pouvaient échapper à l’observateur le moins attentif. Cependant Paganel n’avait rien soupçonné.
Le major, lui, sans aller si loin, sans même sortir de l’hôtel, se rendit compte des craintes qui préoccupaient justement la petite ville. Dix minutes de conversation avec le loquace Dickson, le maître de l’hôtel, et il sut à quoi s’en tenir.
Mais il n’en souffla mot. Seulement, quand le souper fut terminé, lorsque lady Glenarvan, Mary et Robert Grant eurent regagné leurs chambres, le major retint ses compagnons et leur dit:
«On connaît les auteurs du crime commis sur le chemin de fer de Sandhurst.
– Et ils sont arrêtés? demanda vivement Ayrton.