Anna Karenine Tome I

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Anna Karenine Tome I
Название: Anna Karenine Tome I
Автор: Tolstoi Leon
Дата добавления: 16 январь 2020
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Anna Karenine Tome I - читать бесплатно онлайн , автор Tolstoi Leon

Russie, 1880. Anna Kar?nine, est une jeune femme de la haute soci?t? de Saint-P?tersbourg. Elle est mari?e ? Alexis Kar?nine un haut fonctionnaire de l'administration imp?riale, un personnage aust?re et orgueilleux. Ils ont un gar?on de huit ans, Serge. Anna se rend ? Moscou chez son fr?re Stiva Oblonski. En descendant du train, elle croise le comte Vronski, venu ? la rencontre de sa m?re. Elle tombe amoureuse de Vronski, cet officier brillant, mais frivole. Ce n'est tout d'abord qu'un ?clair, et la joie de retrouver son mari et son fils lui font croire que ce sera un vertige sans lendemain. Mais lors d'un voyage en train, quand Vronski la rejoint et lui d?clare son amour, Anna r?alise que la frayeur m?l?e de bonheur qu'elle ressent ? cet instant va changer son existence. Anna lutte contre cette passion. Elle finit pourtant par s'abandonner avec un bonheur coupable au courant qui la porte vers ce jeune officier. Puis Anna tombe enceinte. Se sentant coupable et profond?ment d?prim?e par sa faute, elle d?cide d'avouer son infid?lit? ? son mari…

Cette magnifique et tragique histoire d'amour s'inscrit dans un vaste tableau de la soci?t? russe contemporaine. En parall?le, Tolsto? brosse le portrait de deux autres couples: Kitty et L?vine, Daria et Oblonski. Il y ?voque les diff?rentes facettes de l'?mancipation de la femme, et dresse un tableau critique de la Russie de la fin du XIXe si?cle.

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– Eh bien après? fallait-il compter mes arbres un à un?

– Certainement, si tu ne les a pas comptés, sois sûr que le marchand l’a fait pour toi; et ses enfants auront le moyen de vivre et de s’instruire: ce que les tiens n’auront peut-être pas.

– Que veux-tu? à mes yeux, il y a mesquinerie à cette façon de calculer. Nous avons nos affaires, ils ont les leurs, et il faut bien qu’ils fassent leurs bénéfices. Au demeurant, c’est une chose sur laquelle il n’y a plus à revenir… Et voilà mon omelette favorite qui arrive, puis Agathe Mikhaïlovna nous donnera certainement un verre de sa bonne eau-de-vie.»

Stépane Arcadiévitch se mit à table, plaisanta gaiement Agathe Mikhaïlovna et assura n’avoir pas mangé de longtemps un dîner et un souper pareils.

«Au moins vous avez, vous, une bonne parole à donner, dit Agathe Mikhaïlovna, tandis que Constantin Dmitritch, ne trouvât-il qu’une croûte de pain, la mangerait sans rien dire, et s’en irait.»

Levine, malgré ses efforts pour dominer son humeur triste et sombre, restait morose; il y avait une question qu’il ne se décidait pas à faire, ne trouvant ni l’occasion de la poser à son ami, ni la forme à lui donner. Stépane Arcadiévitch était rentré dans sa chambre, s’était déshabillé, lavé, revêtu d’une belle chemise tuyautée et enfin couché, que Levine rôdait encore autour de lui, causant de cent bagatelles, sans avoir le courage de demander ce qui lui tenait à cœur.

«Comme c’est bien arrangé, dit-il en sortant du papier qui l’enveloppait un morceau de savon parfumé, attention d’Agathe Mikhaïlovna dont Oblonsky ne profitait pas. Regarde donc, c’est vraiment une œuvre d’art.

– Oui, tout se perfectionne, de notre temps, dit Stépane Arcadiévitch avec un bâillement plein de béatitude. Les théâtres, par exemple, et – bâillant encore – ces amusantes lumières électriques.

– Oui, les lumières électriques, répéta Levine… Et ce Wronsky, où est-il maintenant? demanda-t-il tout à coup en déposant son savon.

– Wronsky? dit Stépane Arcadiévitch en cessant de bâiller, il est à Pétersbourg. Il est parti peu après toi, et n’est plus revenu à Moscou. Sais-tu, Kostia, continua-t-il en s’accoudant à la table placée près de son lit, et en appuyant sur sa main un visage qu’éclairaient comme deux étoiles ses yeux caressants et un peu somnolents, si tu veux que je te le dise, tu es en partie coupable de toute cette histoire: tu as eu peur d’un rival, et je te répète ce que je te disais alors, je ne sais lequel de vous deux avait le plus de chances. Pourquoi n’avoir pas été de l’avant? je te disais bien que…, – et il bâilla intérieurement tâchant de ne pas ouvrir la bouche.

– Sait-il ou ne sait-il pas la démarche que j’ai faite? se demanda Levine en le regardant. Il y a de la ruse et de la diplomatie dans sa physionomie; – et, se sentant rougir, il regarda Oblonsky sans parler.

– Si elle a éprouvé un sentiment quelconque, continua celui-ci, c’était un entraînement très superficiel, un éblouissement de cette haute aristocratie et de cette position dans le monde, éblouissement que sa mère a subi plus qu’elle.»

Levine fronça le sourcil. L’injure du refus lui revint au cœur comme une blessure toute fraîche. Heureusement, il était chez lui, dans sa propre maison, et chez soi on se sent plus fort.

«Attends, attends, interrompit-il. Tu parles d’aristocratie? Veux-tu me dire en quoi consiste celle de Wronsky ou de tout autre, et en quoi elle autorise le mépris que l’on a eu de moi? Tu le considères comme un aristocrate. Je ne suis pas de cet avis. Un homme dont le père est sorti de la poussière grâce à l’intrigue, dont la mère a été en liaison Dieu sait avec qui. Oh non! Les aristocrates sont pour moi des hommes qui peuvent montrer dans leur passé trois ou quatre générations honnêtes, appartenant aux classes les plus cultivées (ne parlons pas de dons intellectuels remarquables, c’est une autre affaire), n’ayant jamais fait de platitudes devant personne, et n’ayant eu besoin de personne, comme mon père et mon grand-père. Et je connais beaucoup de familles semblables. Pour toi, tu fais des cadeaux de 30 000 roubles à un coquin, et tu me trouves mesquin de compter mes arbres; mais tu recevras des appointements, et que sais-je encore, ce que je ne ferai jamais. Voilà pourquoi j’apprécie ce que m’a laissé mon père et ce que me donne mon travail, et je dis que c’est nous qui sommes les aristocrates, et non pas ceux qui vivent aux dépens des puissants de ce monde, et qui se laissent acheter pour 20 kopecks!

– À qui en as-tu? je suis de ton avis, – répondit gaiement Oblonsky en s’amusant de la sortie de son ami, tout en sentant qu’elle le visait. – Tu n’es pas juste pour Wronsky; mais il n’est pas question de lui. Je te le dis franchement: à ta place, je partirais pour Moscou et…

– Non; je ne sais si tu as connaissance de ce qui s’est passé, et du reste cela m’est égal… J’ai demandé Catherine Alexandrovna, et j’ai reçu un refus qui me rend son souvenir pénible et humiliant.

– Pourquoi cela? quelle folie!

– N’en parlons plus. Excuse-moi si tu m’as trouvé malhonnête avec toi. Maintenant tout est expliqué.»

Et, reprenant ses allures ordinaires:

«Tu ne m’en veux pas, Stiva? Je t’en prie, ne me garde pas rancune, dit-il en lui prenant la main.

– Je n’y songe pas; je suis bien aise, au contraire, que nous nous soyons ouverts l’un à l’autre. Et sais-tu? la chasse est bonne le matin. Si nous y retournions? je me passerais bien de dormir et j’irais ensuite tout droit à la gare.

– Parfaitement.»

XVIII

Wronsky, quoique absorbé par sa passion, n’avait rien changé au cours extérieur de sa vie. Il avait conservé toutes ses relations mondaines et militaires. Son régiment gardait une place importante dans son existence, d’abord parce qu’il l’aimait, et plus encore parce qu’il y était adoré; on ne se contentait pas de l’y admirer, on le respectait, on était fier de voir un homme de son rang et de sa valeur intellectuelle placer les intérêts de son régiment et de ses camarades au-dessus des succès de vanité ou d’amour-propre auxquels il avait droit. Wronsky se rendait compte des sentiments qu’il inspirait et se croyait, en quelque sorte, tenu de les entretenir. D’ailleurs la vie militaire lui plaisait par elle-même.

Il va sans dire qu’il ne parlait à personne de son amour; jamais un mot imprudent ne lui échappait, même lorsqu’il prenait part à quelque débauche entre camarades (il buvait, du reste, très modérément), et il savait fermer la bouche aux indiscrets qui se permettaient la moindre allusion à ses affaires de cœur. Sa passion était cependant connue de la ville entière, et les jeunes gens enviaient précisément ce qui pesait le plus lourdement à son amour, la haute position de Karénine, qui contribuait à mettre sa liaison en évidence.

La plupart des jeunes femmes, jalouses d’Anna, qu’elles étaient lasses d’entendre toujours nommer «juste», n’étaient pas fâchées de voir leurs prédictions vérifiées, et n’attendaient que la sanction de l’opinion publique pour l’accabler de leur mépris: elles tenaient déjà en réserve la boue qui lui serait jetée quand le moment serait venu. Les personnes d’expérience et celles d’un rang élevé voyaient à regret se préparer un scandale mondain.

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