Le Dernier Jour Dun Condamn?
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? la prison de Bic?tre, un condamn? ? mort note heure par heure les ?v?nements d'une journ?e dont il apprend qu'elle sera la derni?re. Il rappelle les circonstances de la sentence, puis de son emprisonnement et la raison qui le fait ?crire, jusqu'au moment o? il lui sera physiquement impossible de continuer. D?crivant sa cellule, d?taillant la progression de la journ?e, ?voquant d'horribles souvenirs comme le ferrement des for?ats, la complainte argotique d'une jeune fille, des r?ves, il en arrive au transfert ? la Conciergerie……
Hugo ne donne pas son nom, ne dit presque rien sur son pass?, ni pourquoi cet homme est emprisonn?. Peu importe! Ce texte est un plaidoyer contre la peine de mort, contre toutes les peines de mort, il n'a pour objet que cette mort qui appara?t dans toute son horreur inou?e et impensable, dans son inhumanit? intrins?que. Ce condamn? «anonyme», n'est personne, et donc tout le monde, et nous vivons sa peur et son Enfer.
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XXXI
Il vient d’entrer un monsieur, le chapeau sur la tête, qui m’a à peine regardé, puis a ouvert un pied-de-roi et s’est mis à mesurer de bas en haut les pierres du mur, parlant d’une voix très haute pour dire tantôt: C’est cela; tantôt: Ce n’est pas cela .
J’ai demandé au gendarme qui c’était. Il paraît que c’est une espèce de sous-architecte employé à la prison.
De son côté, sa curiosité s’est éveillée sur mon compte. Il a échangé quelques demi-mots avec le porte-clefs qui l’accompagnait; puis a fixé un instant les yeux sur moi, a secoué la tête d’un air insouciant, et s’est remis à parler à haute voix et à prendre des mesures.
Sa besogne finie, il s’est approché de moi en me disant avec sa voix éclatante:
– Mon bon ami, dans six mois cette prison sera beaucoup mieux.
Et son geste semblait ajouter:
– Vous n’en jouirez pas, c’est dommage.
Il souriait presque. J’ai cru voir le moment où il allait me railler doucement, comme on plaisante une jeune mariée le soir de ses noces.
Mon gendarme, vieux soldat à chevrons, s’est chargé de la réponse.
– Monsieur, lui a-t-il dit, on ne parle pas si haut dans la chambre d’un mort.
L’architecte s’en est allé.
Moi, j’étais là, comme une des pierres qu’il mesurait.