Cyteen, vol. 1
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— Grant, fit-il en s’asseyant au bord du lit. Grant, c’est moi. Tout va s’arranger.
L’azi ne cilla même pas.
— Sortez, ordonna-t-il à Ivanov qu’il foudroya du regard par-dessus son épaule.
Le médecin obtempéra.
Il se pencha vers son ami, afin de desserrer les sangles qui l’immobilisaient toujours. Son calme le surprenait. Il souleva le bras de Grant et le posa sur ses cuisses, afin d’avoir la place de s’asseoir, puis il redressa le lit. Il s’inclina et prit la mâchoire de l’azi entre le pouce et l’index, pour tourner son visage vers lui. Il lui semblait manipuler un mannequin. Mais ce dernier cilla.
— Grant ? C’est Justin.
Un autre battement de paupières.
Ô Seigneur ! Il s’était attendu à voir Grant dans le coma. Il avait cru trouver un mort en sursis pour lequel ils ne pourraient rien faire, hormis le liquider. Il s’y était apprêté. Au cours des cinq minutes nécessaires pour gagner cette chambre, il était passé de l’espoir de repartir avec son ami à la résignation de le perdre.
Et à présent, il avait peur. Il eût été moins en danger, si son ami n’avait pas survécu.
Maudite pensée ! D’où me viennent de tels raisonnements ? Depuis quand suis-je devenu indifférent à ce point ?
Un flash-bande ?
Que m’a-t-elle fait ?
Il lui semblait qu’il se désagrégeaitc il sentait l’hystérie enfler en lui comme un raz de marée. Et c’était bien la dernière des choses dont Grant avait besoin. Il prit la main de l’azi dans la sienne. Il tremblait. Il revoyait l’appartement d’Ari, sa chambre. Il parla, pour se changer les idées, sans savoir ce qu’il disait ; dans le seul but d’empêcher le retour de l’horrible pensée qui avait traversé son esprit contre son gré, comme si ce dernier ne lui appartenait plus. Il savait qu’il ne pourrait plus toucher un être humain sans que ce contact eût une connotation sexuelle. Il lui était impossible d’étreindre un ami, ou d’embrasser son père. Il y pensait sans cesse, jour et nuit, et il savait qu’il serait pour lui dangereux d’aimer qui que ce soit à cause de la laideur de son esprit, de ses pensées abjectes.
Parce que cette maudite femme avait eu raison : le fait d’aimer quelqu’un rendait vulnérable. Comme Jordan, Grant constituait sonpoint faible. Naturellement. C’était pour cette raison qu’ils le lui rendaient.
Il n’était plus seul, désormais. Un jour, cet azi le livrerait à ses ennemis. Peut-être mourrait-il à cause de lui. Ou pirec peut-être connaîtrait-il le même destin que son père.
Mais en attendant cet instant il ne serait plus seul. D’ici-là, pendant quelques années, il bénéficierait d’une chose inestimable. Jusqu’au jour où Grant découvrirait la laideur qui se tapissait en lui. Même après, sans doute. Étant un azi, il lui pardonnerait.
— Grant, je suis ici. Je t’avais dit que je reviendrais. Je suis là.
Son ami pouvait toujours se croire le soir de son départ. Peut-être réussirait-il à remonter le temps jusqu’à leur séparation et à reprendre son existence le lendemain matin.
Un nouveau clin d’œil, un autre.
— Allons, Grant. Cesse tes enfantillages. Tu les as bien eus. Serre ma main. Tu peux le faire.
Les doigts se raidirent. La respiration devint plus rapide. Justin secoua l’azi avec douceur et se pencha pour donner une pichenette à sa joue.
— Eh, tu l’as sentie ? Allons. Ne me fais pas marcher. C’est Justin. Je veux te parler. Prête-moi attention, bordel !
La bouche de Grant cessa d’être aussi flasquec le redevint. Il prenait désormais des inspirations hachées. Il cilla.
— Tu m’écoutes ?
Un hochement de tête.
— Parfait.
Justin tremblait, et il dut prendre sur lui-même pour se détendre.
— Nous avons un problème. Mais j’ai obtenu l’autorisation de te faire sortir d’ici. À condition que tu réussisses à te réveiller, cela va de soi.
— C’est le matin ?
Il inspira, alla pour fournir une réponse affirmative, puis se ravisa. Le moindre mensonge serait dangereux. Grant se méfiait. Il risquait de comprendre qu’il ne lui disait pas la vérité.
— Un certain temps s’est écoulé. Nous avons des ennuis. Assez sérieux. Je t’expliquerai plus tard. Peux-tu bouger le bras ?
Un mouvement spasmodique agita imperceptiblement le membre. La main se souleva.
— Je suis faible. Très faible.
— Ça va aller. Ils vont te ramener à la Maison. Ce soir, tu dormiras dans ton lit. À condition que tu leur prouves que tu es capable de t’asseoir.
La poitrine de l’azi se dilata puis redescendit. Le bras bougea et rampa sur le drap, avant de tomber sur le côté du lit ; aussi flasque qu’un serpent mort. Il avala de l’air et déplaça la totalité de son corps. Ses épaules se soulevèrent et l’oreiller glissa dans son dos.
— Ça y était presque, l’encouragea Justin.
La nourriture lui paraissait étrange. Trop consistante. Même la bouillie de céréales était difficile à mastiquer. Son ami lui avait fait manger à la cuillère la moitié du bol, quand il leva la main.
— Assez.
Justin parut ennuyé.
— C’est déjà beaucoup pour moi, précisa-t-il.
Parler lui était pénible, mais il devait le rassurer. Il se pencha et posa sa main sur la sienne. C’était plus facile que de s’exprimer. Son compagnon le regardait et l’enfer paraissait se refléter dans ses yeux. Il aurait voulu pouvoir dissiper ses craintes.
La nuit précédente, Justin avait mis son épuisement à profit pour tout lui expliquer, en précisant : Ça m’a secoué, et je suppose que le choc sera moins violent si tu es encore à moitié sonné.
Ensuite, ils avaient pleuré. Justin ne voulait pas le laisser seul et s’était allongé près de lui, pour s’endormir tout habillé sur le lit.
Grant essaya de le couvrir, mais les forces lui manquaient. Il dut se contenter de rouler de côté, pour laisser la couverture sous son ami, avant de reprendre sa place.
Ensuite, il eut froid, très froid, jusqu’au moment où Justin se réveilla et alla chercher une couverture supplémentaire, avant de l’étreindre et de pleurer sur son épaule, pendant un long moment.
— J’ai tant besoin de toi, lui dit-il.
Et, parce qu’il était un azi ou parce qu’il était un humain – il n’aurait pu se prononcer –, il considéra cet aveu comme la chose la plus importante qu’on lui avait jamais dite. Il pleura à son tour, sans savoir pour quelle raison. Il avait seulement conscience que Justin était toute sa vie, qu’il était tout,pour lui.
— J’ai moi aussi besoin de toi, répondit-il.
À la faveur de l’obscurité des heures qui précèdent l’aube, quand il est possible d’exprimer des choses trop profondes pour pouvoir être dites en plein jour.
Grant s’éveilla le premier et resta allongé sans bouger, heureux d’avoir son compagnon près de lui. Puis Justin ouvrit les yeux à son tour, se leva, et lui demanda de l’excuser d’avoir dormi dans son lit.
Comme s’il avait été incommodé par sa présence, comme si Justin n’était pas ce qu’il considérait comme le plus important au monde, la seule personne capable de le rassurer. Pour lui, Grant eût fait n’importe quoi.
Il l’aimait, bien plus qu’aucune femme ou quoi que ce soit qu’il eût jamais désiré.
13
— La série d’Ari est positive,annonça la voix qui provenait du labo.
Soulagé, Giraud Nye prit une inspiration profonde.
— C’est merveilleux. Absolument merveilleux. Et les deux autres ?
— C’est positif, dans toutes les matrices.
— Formidable.
Schwartz coupa la liaison. Giraud Nye se pencha en arrière dans son fauteuil et soupira.
Ils utilisaient neuf cuves utérines, dans le cadre du projet. Trois essais par sujet, ce qui lui valait de subir les récriminations continuelles de Strassen. Il était rare que Reseune prît de telles précautions pour des duplications de CIT. Si une série rejetait l’implant ou si des problèmes se présentaient, il suffisait de tout reprendre de zéro et le planning n’était retardé que de quelques semaines. Le client n’avait qu’à attendre, hormis s’il souhaitait payer le double d’une somme déjà astronomique pour avoir un exemplaire de rechange. Dans le cas d’une commande d’azis ou d’un programme de recherche, on prévoyait pour chaque paire un double qui était vidé après cinquante jours.