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LAiguille creuse

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LAiguille creuse
Название: LAiguille creuse
Автор: Leblanc Maurice
Дата добавления: 16 январь 2020
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LAiguille creuse - читать бесплатно онлайн , автор Leblanc Maurice

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Quevillon frappa du pied dans un subit accès de rage.

– Mais où, sacrédié ? Par où sont-ils passés ? Par où l’ont-ils enlevé ? Et lui, le gredin, où se cachait-il ? Car enfin, quoi ! on a battu le terrain toute la journée, et un individu ne se cache pas dans une touffe d’herbe, surtout quand il est blessé. C’est de la magie, ces histoires-là !…

Le brigadier Quevillon n’était pas au bout de ses étonnements. À l’aube, quand on pénétra dans l’oratoire qui servait de cellule au jeune Beautrelet, on constata que le jeune Beautrelet avait disparu. Sur une chaise, courbé, dormait le garde champêtre. À côté de lui, il y avait une carafe et deux verres. Au fond de l’un de ces verres, on apercevait un peu de poudre blanche.

Après examen, il fut prouvé, d’abord que Beautrelet avait administré un narcotique au garde champêtre, qu’il n’avait pu s’échapper que par une fenêtre, située à deux mètres cinquante de hauteur – et enfin, détail charmant, qu’il n’avait pu atteindre cette fenêtre qu’en utilisant comme marchepied le dos de son gardien.

Extrait du Grand Journal :

NOUVELLES DE LA NUIT

Enlèvement du docteur Delattre.

Un coup d’une audace folle.

« Au moment de mettre sous presse, on nous apporte une nouvelle dont nous n’osons pas garantir l’authenticité, tellement elle nous paraît invraisemblable. Nous la donnons donc sous toutes réserves.

« Hier soir, le docteur Delattre, le célèbre chirurgien, assistait avec sa femme et sa fille à la représentation d’Hernani, à la Comédie-Française. Au début du troisième acte, c’est-à-dire vers dix heures, la porte de sa loge s’ouvrit ; un monsieur, que deux autres accompagnaient, se pencha vers le docteur, et lui dit assez haut pour que Mme Delattre entendît :

« – Docteur, j’ai une mission des plus pénibles à remplir, et je vous serais très reconnaissant de me faciliter ma tâche.

« – Qui êtes-vous, Monsieur ?

« – M. Thézard, commissaire de police, et j’ai ordre de vous conduire auprès de M. Dudouis, à la Préfecture.

« – Mais, enfin…

« – Pas un mot, Docteur, je vous en supplie, pas un geste… Il y a là une erreur lamentable, et c’est pourquoi nous devons agir en silence et n’attirer l’attention de personne. Avant la fin de la représentation vous serez de retour, je n’en doute pas.

« Le docteur se leva et suivit le commissaire. À la fin de la représentation, il n’était pas revenu.

« Très inquiète, Mme Delattre se rendit au commissariat de police. Elle y trouva le véritable M. Thézard, et reconnut, à son grand effroi, que l’individu qui avait emmené son mari n’était qu’un imposteur.

« Les premières recherches ont révélé que le docteur était monté dans une automobile et que cette automobile s’était éloignée dans la direction de la Concorde.

« Notre seconde édition tiendra nos lecteurs au courant de cette incroyable aventure. »

Si incroyable qu’elle fût, l’aventure était véridique. Le dénouement d’ailleurs ne devait pas tarder et Le Grand Journal, en même temps qu’il la confirmait dans son édition de midi, annonçait en quelques mots le coup de théâtre qui la terminait.

LA FIN DE L’HISTOIRE

et le commencement des suppositions.

« Ce matin, à neuf heures, le docteur Delattre a été ramené devant la porte du numéro 78 de la rue Duret, par une automobile qui, aussitôt, s’est éloignée rapidement. Le numéro 78 de la rue Duret n’est autre que la clinique même du docteur Delattre, clinique où chaque matin il arrive à cette même heure.

« Quand nous nous sommes présentés, le docteur, qui était en conférence avec le chef de la Sûreté, a bien voulu cependant nous recevoir.

« – Tout ce que je puis vous dire, a-t-il répondu, c’est que l’on m’a traité avec les plus grands égards. Mes trois compagnons sont les gens les plus charmants que je connaisse, d’une politesse exquise, spirituels et bons causeurs, ce qui n’était pas à dédaigner, étant donné la longueur du voyage.

« – Combien de temps dura-t-il ?

« – Environ quatre heures.

« – Et le but de ce voyage ?

« – J’ai été conduit auprès d’un malade dont l’état nécessitait une intervention chirurgicale immédiate.

« – Et cette opération a réussi ?

« – Oui, mais les suites sont à craindre. Ici, je répondrais du malade. Là-bas… dans les conditions où il se trouve…

« – De mauvaises conditions ?

« – Exécrables… Une chambre d’auberge… et l’impossibilité, pour ainsi dire absolue, de recevoir des soins.

« – Alors, qui peut le sauver ?

« – Un miracle… et puis sa constitution d’une force exceptionnelle.

« – Et vous ne pouvez en dire davantage sur cet étrange client ?

« – Je ne le puis. D’abord, j’ai juré, et ensuite j’ai reçu la somme de dix mille francs [1], au profit de ma clinique populaire. Si je ne garde pas le silence, cette somme me sera reprise.

« – Allons donc ! Vous croyez ?

« – Ma foi, oui, je le crois. Tous ces gens-là m’ont l’air extrêmement sérieux.

« Telles sont les déclarations que nous a faites le docteur.

« Et nous savons d’autre part que le chef de la Sûreté n’est pas encore parvenu à tirer de lui des renseignements plus précis sur l’opération qu’il a pratiquée, sur le malade qu’il a soigné, et sur les régions que l’automobile a parcourues. Il semble donc difficile de connaître la vérité. »

Cette vérité que le rédacteur de l’interview s’avouait impuissant à découvrir, les esprits un peu clairvoyants la devinèrent par un simple rapprochement des faits qui s’étaient passés la veille au château d’Ambrumésy, et que tous les journaux rapportaient ce même jour dans leurs moindres détails. Il y avait évidemment là, entre cette disparition d’un cambrioleur blessé et cet enlèvement d’un chirurgien célèbre, une coïncidence dont il fallait tenir compte.

L’enquête, d’ailleurs, démontra la justesse de l’hypothèse. En suivant la piste du pseudo-chauffeur qui s’était enfui sur une bicyclette, on établit qu’il avait gagné la forêt d’Arques, située à une quinzaine de kilomètres ; que, de là, après avoir jeté sa bicyclette dans un fossé, il s’était rendu au village de Saint-Nicolas, et qu’il avait envoyé une dépêche ainsi conçue :

« A.L.N., BUREAU 45, PARIS

« Situation désespérée. Opération urgente. Expédiez célébrité par nationale quatorze. »

La preuve était irréfutable. Prévenus, les complices de Paris s’empressaient de prendre leurs dispositions. À dix heures du soir ils expédiaient la célébrité par la route nationale numéro 14 qui côtoie la forêt d’Arques et aboutit à Dieppe. Pendant ce temps, à la faveur de l’incendie allumé par elle-même, la bande des cambrioleurs enlevait son chef et le transportait dans une auberge où l’opération avait lieu dès l’arrivée du docteur, vers deux heures du matin.

Là-dessus aucun doute. À Pontoise, à Gournay, à Forges, l’inspecteur principal Ganimard, envoyé spécialement de Paris, avec l’inspecteur Folenfant, constata le passage d’une automobile au cours de la nuit précédente… De même sur la route de Dieppe à Ambrumésy ; et si l’on perdait soudain la trace de la voiture à une demi-lieue environ du château, du moins on nota de nombreux vestiges de pas entre la petite porte du parc et les ruines du cloître. En outre, Ganimard fit remarquer que la serrure de la petite porte avait été forcée.

Donc tout s’expliquait. Restait à déterminer l’auberge dont le docteur avait parlé. Besogne aisée pour un Ganimard, fureteur, patient, et vieux routier de police. Le nombre des auberges est limité, et celle-ci, étant donné l’état du blessé, ne pouvait être que dans le voisinage d’Ambrumésy, Ganimard et le brigadier se mirent en campagne. À cinq cents mètres, à mille mètres, à cinq mille mètres à la ronde, ils visitèrent et fouillèrent tout ce qui pouvait passer pour une auberge. Mais, contre toute attente, le moribond s’obstina à demeurer invisible.

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