La Dame de Monsoreau Tome III
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Le dimanche gras de l'ann?e 1578, apr?s la f?te du populaire, et tandis que s'?teignaient dans les rues les rumeurs de la joyeuse journ?e, commen?ait une f?te splendide dans le magnifique h?tel que venait de se faire b?tir, de l'autre c?t? de l'eau et presque en face du Louvre, cette illustre famille de Montmorency qui, alli?e ? la royaut? de France, marchait l'?gale des familles princi?res. Cette f?te particuli?re, qui succ?dait ? la f?te publique, avait pour but de c?l?brer les noces de Fran?ois d'Epinay de Saint-Luc, grand ami du roi Henri III et l'un des favoris les plus intimes, avec Jeanne de Coss?-Brissac, fille du mar?chal de France de ce nom. Le repas avait eu lieu au Louvre, et le roi, qui avait consenti ? grand-peine au mariage, avait paru au festin avec un visage s?v?re qui n'avait rien d'appropri? ? la circonstance …' 'La Dame de Monsoreau' est, ? la suite de 'La Reine Margot', le deuxi?me volet du somptueux ensemble historique que Dumas ?crivit sur la Renaissance.
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Le roi sentit passer en lui comme un frisson de terreur.
En ce moment même, on entendit au dehors une vague rumeur, puis des pas précipités, puis des interrogatoires empressés.
Il se fit un grand, un profond silence.
Au milieu de ce silence, et comme si une voix du ciel venait donner raison à Saint-Luc, trois coups, frappés avec lenteur et solennité, ébranlèrent la porte sous le poing vigoureux de Crillon.
Une sueur froide inonda les tempes de Henri et bouleversa les traits de son visage.
– Vaincus! s'écria-t-il; mes pauvres amis vaincus!
– Que vous disais-je, sire? s'écria Saint-Luc.
Le duc joignit les mains avec terreur.
– Vois-tu, lâche! s'écria le jeune homme avec un superbe effort, voilà comme les assassinats sauvent l'honneur des princes! Viens donc m'égorger aussi, je n'ai pas d'épée!
Et il lança son gant de soie au visage du duc.
François poussa un cri de rage et devint livide.
Mais le roi ne vit rien, n'entendit rien: il avait laissé tomber son front entre ses mains.
– Oh! murmura-t-il, mes pauvres amis, ils sont vaincus, blessés! Oh! qui me donnera d'eux des nouvelles certaines?
– Moi, sire, dit Chicot.
Le roi reconnut cette voix amie, et tendit ses bras en avant.
– Eh bien? dit-il.
– Deux sont déjà morts, et le troisième va rendre le dernier soupir.
– Quel est ce troisième qui n'est pas encore mort?
– Quélus, sire.
– Et où est-il?
– À l'hôtel Boissy, où je l'ai fait transporter.
Le roi n'en écouta point davantage, et s'élança hors de l'appartement en poussant des cris lamentables.
Saint-Luc avait conduit Diane chez son amie, Jeanne de Brissac, de là son retard à se présenter au Louvre.
Jeanne passa trois jours et trois nuits à veiller la malheureuse femme, en proie au plus atroce délire.
Le quatrième jour, Jeanne, brisée de fatigue, alla prendre un peu de repos; mais, lorsqu'elle rentra, deux heures après, dans la chambre de son amie, elle ne la trouva plus. [4]
On sait que Quélus, le seul des trois combattants défenseurs de la cause du roi qui ait survécu à dix-neuf blessures, mourut dans ce même hôtel de Boissy, où Chicot l'avait fait transporter, après une agonie de trente jours, et entre les bras du roi.
Henri fut inconsolable. Il fit faire à ses trois amis de magnifiques tombeaux, où ils étaient taillés en marbre et dans leur grandeur naturelle.
Il fonda des messes à leur intention, les recommanda aux prières des prêtres, et ajouta à ses oraisons habituelles ce distique, qu'il répéta toute sa vie après ses prières du matin et du soir:
Que Dieu reçoive en son giron
Quélus, Schomberg et Maugiron,
Pendant près de trois mois, Crillon garda à vue le duc d'Anjou, que le roi avait pris dans une haine profonde, et auquel il ne pardonna jamais.
On atteignit ainsi le mois de septembre, époque à laquelle Chicot, qui ne quittait pas son maître, et qui eût consolé Henri, si Henri eût pu être consolé, reçut la lettre suivante, datée du prieuré de Beaune. Elle était écrite de la main d'un clerc.
«Cher seigneur Chicot,
«L'air est doux dans notre pays, et les vendanges promettent d'être belles en Bourgogne, cette année.
«On dit que le roi, notre sire, à qui j'ai sauvé la vie, à ce qu'il paraît, a toujours beaucoup de chagrin; amenez-le au prieuré, cher monsieur Chicot, nous lui ferons boire d'un vin de 1550, que j'ai découvert dans mon cellier, et qui est capable de faire oublier les plus grandes douleurs; cela le réjouira, je n'en doute point, car j'ai trouvé, dans les livres saints, cette phrase admirable: «Le bon vin réjouit le cœur de l'homme!» C'est très beau en latin; je vous le ferai lire. Venez donc, cher monsieur Chicot, venez avec le roi, venez avec M. d'Épernon, venez avec M. de Saint-Luc; et vous verrez que nous engraisserons tous.
«Le révérend prieur DOM GORENFLOT, qui se dit votre humble serviteur et ami.
«P.S. Vous direz au roi que je n'ai pas encore eu le temps de prier pour l'âme de ses amis, comme il me l'avait recommandé, à cause des embarras que m'a donnés mon installation; mais, aussitôt les vendanges faites, je m'occuperai certainement d'eux.»
– Amen! dit Chicot, voilà de pauvres diables bien recommandés à Dieu!
(1846)
[1] Perroquet
[2] Comédiens italiens qui donnaient leurs représentations à l'hôtel de Bourgogne.
[3] Quélus avait eu, dans un duel précédent, l'œil gauche crevé d'un coup d'épée.
[4] Peut-être l'auteur nous racontera-t-il ce qu'elle était devenue dans son prochain roman intitulé les Quarante-Cinq, où nous retrouverons une partie des personnages qui ont pris part à l'intrigue de la Dame de Monsoreau. [Note de l'éditeur]