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Les Contemplations

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Les Contemplations
Название: Les Contemplations
Автор: Hugo Victor
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Contemplations читать книгу онлайн

Les Contemplations - читать бесплатно онлайн , автор Hugo Victor

Les 11 000 vers des Contemplations furent ?crits d?s 1834, mais surtout pendant l'exil ? Jersey, puis ? Guernesey, en particulier ? partir de 1853 alors que Hugo composait les Ch?timents. Mettant fin au silence lyrique qu'il observait depuis les Rayons et les Ombres (1840), le recueil, sommet de sa production po?tique, somme de sa vie, de sa sensibilit? et de sa pens?e, se pr?sente comme «les M?moires d'une ?me» (Pr?face). Si «une destin?e est ?crite l? jour ? jour», le recueil s'?rige aussi en expression d'une exp?rience, celle d'un homme qui se veut comme les autres: «Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous.»

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Et vous faites, sans peur, sans pitié, sans regrets,

À la jeunesse, aux cœurs vierges, à l’espérance,

Boire dans votre nuit ce vieil opium rance!

Ô fermoirs de la bible humaine! sacristains

De l’art, de la science, et des maîtres lointains,

Et de la vérité que l’homme aux cieux épèle,

Vous changez ce grand temple en petite chapelle!

Guichetiers de l’esprit, faquins dont le goût sûr

Mène en laisse le beau; porte-clefs de l’azur,

Vous prenez Théocrite, Eschyle aux sacrés voiles,

Tibulle plein d’amour, Virgile plein d’étoiles;

Vous faites de l’enfer avec ces paradis!

Et, ma rage croissant, je reprenais:

– Maudits,

Ces monastères sourds! bouges! prisons haïes!

Oh! comme on fit jadis au pédant de Veïes,

Culotte bas, vieux tigre! Écoliers! écoliers!

Accourez par essaims, par bandes, par milliers,

Du gamin de Paris au grœculus de Rome,

Et coupez du bois vert, et fouaillez-moi cet homme!

Jeunes bouches, mordez le metteur de bâillons!

Le mannequin sur qui l’on drape des haillons

A tout autant d’esprit que ce cuistre en son antre,

Et tout autant de cœur; et l’un a dans le ventre

Du latin et du grec comme l’autre a du foin.

Ah! je prends Phyllodoce et Xanthis à témoin

Que je suis amoureux de leurs claires tuniques;

Mais je hais l’affreux tas des vils pédants iniques!

Confier un enfant, je vous demande un peu,

À tous ces êtres noirs! autant mettre, morbleu!

La mouche en pension chez une tarentule!

Ces moines, expliquer Platon, lire Catulle,

Tacite racontant le grand Agricola,

Lucrèce! eux, déchiffrer Homère, ces gens-là!

Ces diacres! ces bedeaux dont le groin renifle!

Crânes d’où sort la nuit, pattes d’où sort la gifle,

Vieux dadais à l’air rogue, au sourcil triomphant,

Qui ne savent pas même épeler un enfant!

Ils ignorent comment l’âme naît et veut croître.

Cela vous a Laharpe et Nonotte pour cloître!

Ils en sont à l’A, B, C, D, du cœur humain;

Ils sont l’horrible Hier qui veut tuer Demain;

Ils offrent à l’aiglon leurs règles d’écrevisses.

Et puis ces noirs tessons ont une odeur de vices.

Ô vieux pots égueulés des soifs qu’on ne dit pas!

Le pluriel met une S à leurs meas culpas,

Les boucs mystérieux, en les voyant, s’indignent,

Et, quand on dit: «Amour!» terre et cieux! ils se signent.

Leur vieux viscère mort insulte au cœur naissant.

Ils le prennent de haut avec l’adolescent,

Et ne tolèrent pas le jour entrant dans l’âme

Sous la forme pensée ou sous la forme femme.

Quand la muse apparaît, ces hurleurs de holà

Disent: «Qu’est-ce que c’est que cette folle-là?»

Et, devant ses beautés, de ses rayons accrues,

Ils reprennent: «Couleurs dures, nuances crues;

Vapeurs, illusions, rêves; et quel travers

Avez-vous de fourrer l’arc-en-ciel dans vos vers?»

Ils raillent les enfants, ils raillent les poëtes;

Ils font aux rossignols leurs gros yeux de chouettes;

L’enfant est l’ignorant, ils sont l’ignorantin;

Ils raturent l’esprit, la splendeur, le matin;

Ils sarclent l’idéal ainsi qu’un barbarisme,

Et ces culs de bouteille ont le dédain du prisme!

Ainsi l’on m’entendait dans ma geôle crier.

Le monologue avait le temps de varier.

Et je m’exaspérais, faisant la faute énorme,

Ayant raison au fond, d’avoir tort dans la forme.

Après l’abbé Tuet, je maudissais Bezout;

Car, outre les pensums où l’esprit se dissout,

J’étais alors en proie à la mathématique.

Temps sombre! enfant ému du frisson poétique,

Pauvre oiseau qui heurtais du crâne mes barreaux,

On me livrait tout vif aux chiffres, noirs bourreaux;

On me faisait de force ingurgiter l’algèbre;

On me liait au fond d’un Boisbertrand funèbre;

On me tordait, depuis les ailes jusqu’au bec,

Sur l’affreux chevalet des X et des Y;

Hélas! on me fourrait sous les os maxillaires

Le théorème orné de tous ses corollaires;

Et je me débattais, lugubre patient

Du diviseur prêtant main-forte au quotient.

De là mes cris.

Un jour, quand l’homme sera sage,

Lorsqu’on n’instruira plus les oiseaux par la cage,

Quand les sociétés difformes sentiront

Dans l’enfant mieux compris se redresser leur front,

Que, des libres essors ayant sondé les règles,

On connaîtra la loi de croissance des aigles,

Et que le plein midi rayonnera pour tous,

Savoir étant sublime, apprendre sera doux.

Alors, tout en laissant au sommet des études

Les grands livres latins et grecs, ces solitudes

Où l’éclair gronde, où luit la mer, où l’astre rit,

Et qu’emplissent les vents immenses de l’esprit,

C’est en les pénétrant d’explication tendre,

En les faisant aimer, qu’on les fera comprendre.

Homère emportera dans son vaste reflux

L’écolier ébloui; l’enfant ne sera plus

Une bête de somme attelée à Virgile;

Et l’on ne verra plus ce vif esprit agile

Devenir, sous le fouet d’un cuistre ou d’un abbé,

Le lourd cheval poussif du pensum embourbé.

Chaque village aura, dans un temple rustique,

Dans la lumière, au lieu du magister antique,

Trop noir pour que jamais le jour y pénétrât,

L’instituteur lucide et grave, magistrat

Du progrès, médecin de l’ignorance, et prêtre

De l’idée; et dans l’ombre on verra disparaître

L’éternel écolier et l’éternel pédant.

L’aube vient en chantant, et non pas en grondant.

Nos fils riront de nous dans cette blanche sphère;

Ils se demanderont ce que nous pouvions faire

Enseigner au moineau par le hibou hagard.

Alors, le jeune esprit et le jeune regard

Se lèveront avec une clarté sereine

Vers la science auguste, aimable et souveraine;

Alors, plus de grimoire obscur, fade, étouffant;

Le maître, doux apôtre incliné sur l’enfant,

Fera, lui versant Dieu, l’azur et l’harmonie,

Boire la petite âme à la coupe infinie.

Alors, tout sera vrai, lois, dogmes, droits, devoirs.

Tu laisseras passer dans tes jambages noirs

Une pure lueur, de jour en jour moins sombre,

Ô nature, alphabet des grandes lettres d’ombre!

Paris, mai 1831.

XIV. À Granville, en 1836

Voici juin. Le moineau raille

Dans les champs les amoureux;

Le rossignol de muraille

Chante dans son nid pierreux.

Les herbes et les branchages,

Pleins de soupirs et d’abois,

Font de charmants rabâchages

Dans la profondeur des bois.

La grive et la tourterelle

Prolongent, dans les nids sourds,

La ravissante querelle

Des baisers et des amours.

Sous les treilles de la plaine,

Dans l’antre où verdit l’osier,

Virgile enivre Silène,

Et Rabelais Grandgousier.

Ô Virgile, verse à boire!

Verse à boire, ô Rabelais!

La forêt est une gloire;

La caverne est un palais!

Il n’est pas de lac ni d’île

Qui ne nous prenne au gluau,

Qui n’improvise une idylle,

Ou qui ne chante un duo.

Car l’amour chasse aux bocages,

Et l’amour pêche aux ruisseaux,

Car les belles sont les cages

Dont nos cœurs sont les oiseaux.

De la source, sa cuvette,

La fleur, faisant son miroir,

Dit: «Bonjour», à la fauvette,

Et dit au hibou: «Bonsoir.»

Le toit espère la gerbe,

Pain d’abord et chaume après;

La croupe du bœuf dans l’herbe

Semble un mont dans les forêts.

L’étang rit à la macreuse,

Le pré rit au loriot,

Pendant que l’ornière creuse

Gronde le lourd chariot.

L’or fleurit en giroflée;

L’ancien zéphyr fabuleux

Souffle avec sa joue enflée

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