La Dame de Monsoreau Tome II
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Le dimanche gras de l'ann?e 1578, apr?s la f?te du populaire, et tandis que s'?teignaient dans les rues les rumeurs de la joyeuse journ?e, commen?ait une f?te splendide dans le magnifique h?tel que venait de se faire b?tir, de l'autre c?t? de l'eau et presque en face du Louvre, cette illustre famille de Montmorency qui, alli?e ? la royaut? de France, marchait l'?gale des familles princi?res. Cette f?te particuli?re, qui succ?dait ? la f?te publique, avait pour but de c?l?brer les noces de Fran?ois d'Epinay de Saint-Luc, grand ami du roi Henri III et l'un des favoris les plus intimes, avec Jeanne de Coss?-Brissac, fille du mar?chal de France de ce nom. Le repas avait eu lieu au Louvre, et le roi, qui avait consenti ? grand-peine au mariage, avait paru au festin avec un visage s?v?re qui n'avait rien d'appropri? ? la circonstance …' 'La Dame de Monsoreau' est, ? la suite de 'La Reine Margot', le deuxi?me volet du somptueux ensemble historique que Dumas ?crivit sur la Renaissance.
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XI Comment se tint le conseil du roi.
Le jour même, M. de Monsoreau avait, selon son désir manifesté au duc d'Anjou, présenté sa femme au cercle de la reine mère et à celui de la reine.
Henri, soucieux comme à son ordinaire, avait été se coucher, prévenu par M. de Morvilliers que le lendemain il faudrait tenir un grand conseil.
Henri ne fit pas même de questions au chancelier; il était tard, Sa Majesté avait envie de dormir. On prit l'heure la plus commode pour ne déranger ni le repos ni le sommeil du roi.
Ce digne magistrat connaissait parfaitement son maître, et savait qu'au contraire de Philippe de Macédoine le roi endormi ou à jeun n'écouterait pas avec une lucidité suffisante les communications qu'il avait à lui faire.
Il savait aussi que Henri, dont les insomnies étaient fréquentes, – c'est l'apanage de l'homme qui doit veiller sur le sommeil d'autrui de ne pas dormir lui-même, – songerait au milieu de la nuit à l'audience demandée, et la donnerait avec une curiosité aiguillonnée selon la gravité de la circonstance.
Tout se passa comme M. de Morvilliers l'avait prévu.
Après un premier sommeil de trois ou quatre heures, Henri se réveilla; la demande du chancelier lui revint en tête, il s'assit sur son lit, se mit à penser, et, las de penser tout seul, il se laissa glisser le long de ses matelas, passa ses caleçons de soie, chaussa ses pantoufles, et, sans rien changer à sa toilette de nuit, qui le rendait pareil à un fantôme, il s'achemina, à la lueur de sa lampe, qui, depuis que le souffle de l'Éternel était passé dans l'Anjou avec Saint-Luc, ne s'éteignait plus; il s'achemina, disons-nous, vers la chambre de Chicot, la même où s'étaient si heureusement célébrées les noces de mademoiselle de Brissac.
Le Gascon dormait à plein sommeil et ronflait comme une forge.
Henri le tira trois fois par le bras sans parvenir à le réveiller.
À la troisième fois cependant, le roi ayant accompagné le geste de la voix et appelé Chicot à tue-tête, le Gascon ouvrit un œil.
– Chicot! répéta le roi.
– Qu'y a-t-il encore? demanda Chicot.
– Eh! mon ami, dit Henri, comment peux-tu dormir ainsi quand ton roi veille?
– Ah! mon Dieu! s'écria Chicot, feignant de ne pas reconnaître le roi, est-ce que Sa Majesté a pris une indigestion?
– Chicot, mon ami, dit Henri, c'est moi!
– Qui, toi?
– Moi, Henri.
– Décidément, mon fils, ce sont les bécassines qui t'étouffent. Je t'avais cependant prévenu; tu en as trop mangé hier soir, comme aussi de ces bisques aux écrevisses.
– Non, dit Henri, car à peine y ai-je goûté.
– Alors, dit Chicot, c'est qu'on t'a empoisonné. Ventre de biche! que tu es pâle! Henri.
– C'est mon masque de toile, mon ami, dit le roi.
– Tu n'es donc pas malade?
– Non.
– Alors pourquoi me réveilles-tu?
– Parce que le chagrin me persécute.
– Tu as du chagrin?
– Beaucoup.
– Tant mieux.
– Comment, tant mieux?
– Oui, le chagrin fait réfléchir; et tu réfléchiras qu'on ne réveille un honnête homme à deux heures du matin que pour lui faire un cadeau. Que m'apportes-tu, voyons?
– Rien, Chicot; je viens causer avec toi.
– Ce n'est point assez.
– Chicot, M. de Morvilliers est venu hier soir à la cour.
– Tu reçois bien mauvaise compagnie, Henri; et que venait-il faire?
– Il venait me demander audience.
– Ah! voilà un homme qui sait vivre; ce n'est pas comme toi, qui entres dans la chambre des gens à deux heures du matin sans dire gare.
– Que pouvait-il avoir à me dire, Chicot?
– Comment! malheureux, s'écria le Gascon, c'est pour me demander cela que tu me réveilles?
– Chicot, mon ami, tu sais que M. de Morvilliers s'occupe de ma police.
– Non, ma foi, dit Chicot, je ne le savais pas.
– Chicot, dit le roi, je trouve, au contraire, moi, que M. de Morvilliers est toujours très bien renseigné.
– Et quand je pense, dit le Gascon, que je pourrais dormir au lieu d'entendre de pareilles sornettes!
– Tu doutes de la surveillance du chancelier? demanda Henri.
– Oui, corbœuf, j'en doute, dit Chicot, et j'ai mes raisons.
– Lesquelles?
– Si je t'en donne une seule, cela te suffira-t-il?
– Oui, si elle est bonne.
– Et tu me laisseras tranquille après?
– Certainement.
– Eh bien, un jour, non, c'était un soir.
– Peu importe!
– Au contraire, cela importe beaucoup. Eh bien, un soir je t'ai battu dans la rue Froidmantel; tu avais avec toi Quélus et Schomberg…
– Tu m'as battu?
– Oui, bâtonné, bâtonné, tous trois.
– À quel propos?
– Vous aviez insulté mon page, vous avez reçu les coups, et M. de Morvilliers ne vous en a rien dit.
– Comment! s'écria Henri, c'était toi, scélérat? c'était toi, sacrilège?
– Moi-même, dit Chicot en se frottant les mains; n'est-ce pas, mon fils, que je frappe bien quand je frappe?
– Misérable!
– Tu avoues donc que c'est la vérité?
– Je te ferai fouetter, Chicot.
– Il ne s'agit pas de cela: est-ce vrai, oui ou non? voilà tout ce que je te demande.
– Tu sais bien que c'est vrai, malheureux!
– As-tu fait venir le lendemain M. de Morvilliers?
– Oui, puisque tu étais là quand il est venu.
– Lui as-tu raconté le fâcheux accident qui était arrivé la veille à un gentilhomme de tes amis?
– Oui.
– Lui as-tu ordonné de retrouver le coupable?
– Oui.
– Te l'a-t-il retrouvé?
– Non.
