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Les Pauvres Gens

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Les Pauvres Gens
Название: Les Pauvres Gens
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Pauvres Gens - читать бесплатно онлайн , автор Dosto?evski Fedor Mikha?lovitch

Dosto?evski d?crit lui-m?me la gen?se de ce roman ?pistolaire, premi?re oeuvre qu'il a publi?e: «La fum?e sortait des naseaux des chevaux, des colonnes de fum?e montaient des toits des deux rives et il semblait que de nouveaux ?difices surgissaient au-dessus des anciens, qu'une nouvelle ville se b?tissait dans l'air… Il me semblait que toute cette ville, avec tous ses habitants, puissants et faibles, avec toutes leurs habitations, asiles de mendiants ou palais dor?s, ressemblait en cette heure de cr?puscule ? une r?verie fantastique, enchant?e, qui dispara?trait et se dissiperait en fum?e montant vers le ciel sombre. Je me suis mis ? regarder et je vis soudain des figures ?tranges. C'?taient des figures ?tranges, bizarres, tout ? fait prosa?ques, qui n'avaient rien de Don Carlos ni de Posa, rien que de simples conseillers titulaires, mais en m?me temps des conseillers titulaires fantastiques. Quelqu'un grima?ait devant moi, en se dissimulant derri?re cette foule fantastique et tirait des ficelles, des ressorts. Les poup?es se mouvaient, et il riait, il riait! C'est alors que m'apparut une autre histoire, dans quelque coin sombre, un c?ur de conseiller titulaire, honn?te et pur, candide et d?vou? ? ses chefs, et, avec lui, une jeune fille, offens?e et triste, et leur ?mouvante histoire me d?chira le c?ur.»

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Pourquoi me parlez-vous, Varvara Alexéievna, des commodités de mon logement, de la tranquillité de mon existence, et d'autres choses semblables? Je ne suis pas difficile, ma petite mère, pas exigeant, et je n'ai jamais vécu dans de meilleures conditions qu'aujourd'hui. Pourquoi aurais-je tout à coup des prétentions à mon âge? Je mange à ma faim, j'ai de quoi me vêtir et me chausser. Que nous faut-il de plus, à nous autres? Nous ne sommes pas fils de comte! Mon père n'appartenait pas à la noblesse, et il a vécu avec toute sa famille beaucoup plus pauvrement que moi, car il ne gagnait pas ce que je gagne. Je ne suis pas un enfant gâté. Cependant, et pour dire la vérité entière, j'avoue que tout était incomparablement mieux dans mon ancien logement. Je m'y sentais plus libre. Certes, mon logis actuel n'est pas mal non plus; il y a même plus de gaîté ici, à certains égards, plus de variété du moins. Je n'ai pas à me plaindre du nouvel appartement, mais je regrette l'ancien. Nous autres vieux, ou plutôt gens d'un certain âge, nous nous attachons aux choses anciennes comme à des amis très proches. L'autre appartement était étroit, savez-vous. Les murs – à quoi bon en parler? – les murs y étaient semblables à tous les autres murs, et ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Mais le souvenir de ce passé m'emplit de nostalgie et me rend mélancolique aujourd'hui… Que c'est bizarre: mon cœur est lourd, et pourtant ces souvenirs me semblent agréables. Même ce qui avait été déplaisant sur le moment même, les inconvénients de cette existence passée dont je m'irritais parfois, paraissent comme dépouillés, dans le souvenir, de leur aspect désagréable et surgissent dans mon imagination sous une forme attrayante. Nous avons vécu paisiblement là-bas, Varinka, nous y avons vécu, moi et ma logeuse, la brave vieille défunte aujourd'hui. Voilà que je commence à ressentir de la tristesse également à l'évocation de cette vieille! Ce fut une brave femme, et elle ne faisait pas payer cher mon loyer. Elle tricotait tout le temps des couvertures avec de longues aiguilles, en les assemblant morceau par morceau. C'était là son unique occupation. Nous avions mis en commun nos dépenses de chauffage, en sorte que nous travaillions à la même table. Sa petite-fille Mâcha vivait auprès d'elle; je l'ai connue enfant, elle doit avoir treize ans aujourd'hui. C'était une espiègle, toujours gaie et qui nous amusait énormément. Nous vivions ainsi tous les trois. Souvent, dans les longues soirées d'hiver, nous nous réunissions autour de la table ronde; nous buvions du thé et puis nous nous mettions au travail. La vieille s'interrompait de tricoter par moment et, pour distraire Mâcha, afin que l'espiègle demeure tranquille, elle se mettait à lui conter des histoires. Quelles belles histoires elle connaissait! Un homme mûr et sensé pouvait les écouter avec autant de plaisir qu'un enfant. Eh oui! Il m'arrivait ainsi d'allumer ma pipe et de prêter l'oreille à ses récits au point que j'en oubliais les choses sérieuses. Quant à la petite, notre gentille espiègle, elle devenait songeuse. Sa joue rose appuyée sur son bras mignon, elle entr'ouvrait sa jolie bouche et, dès que le conte lui faisait un peu peur, elle se serrait fortement contre la vieille. Quel plaisir nous avions à la regarder! On ne remarquait pas, certaines fois, que la bougie était presque consumée, on n'entendait pas les rafales de vent dans la cour, ni la tourmente de neige… Il faisait bon vivre là-bas à trois, Varinka. Nous y avons passé près de vingt années ensemble… Mais je bavarde à côté du sujet, à ce que je vois. Ces choses ne vous intéressent peut-être pas, et puis ces souvenirs me rendent triste, surtout en cette minute, car c'est le crépuscule. Thérèse s'affaire par ici, j'ai mal à la tête et je ressens des douleurs dans le dos également. En outre, mes pensées sont tellement bizarres, comme si elles avaient mal, elles aussi. Je me sens triste, aujourd'hui, Varinka!… Il y a un point dans votre lettre qui m'étonne, ma chère amie. Comment pouvez-vous m'écrire de vous rendre visite? Qu'en diront les gens, mon petit ange, y avez-vous songé? Il faudra traverser la cour pour me rendre chez vous, nos voisins le remarqueront; ils poseront des questions et cela donnera naissance à des bavardages, puis à des cancans, car on interprétera faussement nos relations. Non, mon ange mignon, il vaut mieux que je vous voie demain à l'église, aux vêpres. Cela sera plus raisonnable ainsi, et moins risqué pour tous les deux. Ne m'en voulez pas, ma petite mère, de cette lettre désordonnée. En la relisant, je me suis aperçu que j'y ai tout dit de travers. Je ne suis, Varinka, qu'un vieil homme sans instruction. Je n'ai pas appris assez dans ma jeunesse et ce n'est pas maintenant que je pourrais m'instruire: les choses, à mon âge, n'entrent plus facilement dans la tête. Je le sais bien, ma petite mère, que je ne suis pas habile dans l'art d'écrire et je n'ignore pas, sans que je doive y être rappelé par d'autres avec moquerie, que je ne fais qu'accumuler des sottises lorsque je me mêle de faire des phrases un peu plus élevées… Je vous ai vue à la fenêtre aujourd'hui, j'ai vu comment vous avez baissé le rideau. Adieu, adieu, que le Seigneur vous garde! Adieu, Varvara Alexéievna.

Votre ami désintéressé,

Makar DIÉVOUCHKINE.

P.-S. Je n'écris de satire sur personne, ma bien chère amie. Je suis trop vieux, ma petite mère Varvara Alexéievna, pour m'amuser à être méchant sans motif. On se moquerait de moi aussi en ce cas, d'après le vieux proverbe russe qui dit: «Tel qui creuse un fossé pour autrui, y tombe… lui-même.»

* * * * *

9 avril.

Cher Monsieur Makar Alexéievitch,

Comment n'avez-vous pas honte, Makar Alexéievitch, mon ami et mon bienfaiteur, de vous renfrogner ainsi et de faire le capricieux? Se peut-il vraiment que je vous aie blessé! Hélas! il m'arrive souvent d'être imprudente, mais j'étais bien loin de penser que vous prendriez mes paroles pour des allusions ironiques. Soyez certain que je ne me permettrai jamais de plaisanter au sujet de votre âge et de votre caractère. Tout çà, c'est à cause de ma légèreté, et plus encore parce que je m'ennuie terriblement, et l'on sait bien que l'ennui peut pousser à tout. J'avais pensé, de mon côté, que vous aviez vous-même plaisanté dans votre lettre. Je me suis sentie affreusement triste ensuite en me rendant compte que vous êtes mécontent de moi. Non, mon bon ami et bienfaiteur, vous vous trompez si vous me prenez pour une insensible et une ingrate. Je sais apprécier dans mon cœur tout ce que vous avez fait pour moi, en prenant ma défense contre les méchants, en me protégeant de leurs persécutions et de leur haine. Je prierai éternellement le Seigneur pour vous et si seulement mes prières atteignaient le ciel et pouvaient être exaucées, vous serez heureux.

Je me sens très malade aujourd'hui. J'ai de la fièvre, entrecoupée de frissons. Fédora est très inquiète à mon sujet. C'est à tort que vous vous gênez de nous rendre visite, Makar Alexéievitch. Cela ne regarde personne. Vous êtes notre connaissance, c'est bien simple!… Adieu, Makar Alexéievitch. Je n'ai rien d'autre à dire pour l'instant, et je ne pourrais pas écrire davantage, car je me sens très mal. Je vous prie encore une fois de ne pas m'en vouloir et de croire au respect et à l'attachement que j'aurai toujours l'honneur d'éprouver pour vous

votre servante fidèle et dévouée,

Varvara DOBROSIOLOVA.

* * * * *

12 avril.

Chère Madame Varvara Alexéievna,

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