La Paysanne Pervertie ou Les Dangers De La Ville
La Paysanne Pervertie ou Les Dangers De La Ville читать книгу онлайн
Ce roman ?pistolaire nous conte l'histoire classique d'une jeune fille, provinciale d'origine modeste, qui monte ? Paris. Apr?s avoir profit?, sans en abuser, de la bont? d'une amie de la famille, la facilit? et la vie dans la grande ville incitent notre h?ro?ne ? se faire «entretenir» par un marquis. La ma?tresse sera en bons termes avec la marquise puisque son propre fr?re en est l'amant. Mais ces amours ne durent gu?re et la d?ch?ance sera grande?
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Lettre 108. Mme Canon, à Mme Parangon.
[Bon cœur de femme, sous une rude enveloppe!].
28 avril.
De bien mauvaises nouvelles à vous apprendre, ma chère nièce! J’entends dire d’étranges choses d’Ursule et de son frère! Ils vivent tous deux, ou tous trois, car le marquis est avec eux, dans une jolie maison, à ce faubourg Saint-Honoré . Je ne sais ce que tout ça veut dire; et la manière dont URSULE m’a quittée; et son frère qui la cherchait pour la frime, et qui l’a trouvée quand il a voulu! je m’y perds! Cet Edmond va devenir un vaurien, et je ne sais quoi me tient que je ne l’écrive à ses parents, qui sont de bonnes gens, et craignant Dieu. Je vois que cette petite URSULE va donner dans le travers; ça est joli; ça aura des hommes qui lui en conteront, la tête tournera à ça; et puis la tête emportera le cul, comme dit le proverbe. Jamais de ma vie! Si ça avait affaire à moi!… Je vous, en avertis, ma nièce, vu que vous avez quelque crédit sur l’esprit de ces gens-là; et vous l’avez acheté assez chers Dieu merci! afin que vous leur fassiez des remontrances un peu vertes. Et marquez-leur tout ce que je vous écris, si vous voulez! je ne les crains pas! je n’ai jamais craint les vauriens. Merci de ma vie! je voudrais qu’ils me vinssent parler! je les ferais rentrer cent pieds sous terre. Ah dame, c’est qu’on est bien forte, quand on a le bon droit de son, côté, et que des mal-vivants viennent vous reprocher ce que vous avez dit d’eux! moi je tiendrais tête à une armée de méchants, et si je ne suis qu’une vieille femme!
Tenez, ma nièce, Ursule, a toujours été coquette; j’ai vu ça dès le premier jour. Voyez à mettre fin à la conduite de cette petite fille-là: car je m’y intéresse malgré moi; et à présent que ma colère vient de s’évaporer sur ce papier, tenez, les larmes me viennent aux yeux, et si vous savez bien que je ne suis pas pleureuse. – Mais avoir vu cette petite fille si aimable, si douce, si portée au bien, et la voir aujourd’hui là quasi perdue, avec une figure si angélique, c’est un crève-cœur pour moi! je voudrais ne l’avoir jamais connue!… Oui, si elle était là, je la souffletterais, oui, oui, je la souffletterais! m’avoir quittée, pour aller avec qui?… Est-ce là la place d’une honnête fille?… Je ne vous en dis pas davantage; mais cette petite drôlesse-là nous met la mort au cœur, à moi, et à cette pauvre Fanchette, qui la pleure tous les jours. Hom! si je tenais votre Gaudet!… Adieu; car revoilà mes larmes.