Les Pardaillan – Livre VII – Le Fils De Pardaillan – Volume I

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Nous sommes ? Paris en 1609. Henri IV r?gne, sous la menace permanente des attentats. Le chevalier de Pardaillan, qui n'a pas retrouv? son fils, rencontre un jeune truand, Jehan-le-Brave, en qui il ne tarde pas ? reconna?tre l'enfant de Fausta. Or, Jehan-le-Brave, qui ignore tout de ses origines, est amoureux de Bertille de Saugis, fille naturelle d'Henri IV. Pour prot?ger sa bien-aim?e et le p?re de celle-ci, c'est-?-dire le roi, il entre en conflit avec tous ceux qui complotent sa mort: Concini et son ?pouse, L?onora Galiga?, Aquaviva, le sup?rieur des j?suites qui a recrut? un agent pour ses intentions criminelles, le pauvre Ravaillac. Le chevalier de Pardaillan s'engage dans la lutte aux c?t?s de son fils, aussi bien pour l'observer que pour prot?ger le roi. Or, Fausta jadis avait cach? ? Montmartre un fabuleux tr?sor que tout le monde convoite, les j?suites, les Concini, et m?me le ministre du roi Sully. Seule Bertille conna?t par hasard le secret de cette cachette, ainsi que le chevalier de Pardaillan…
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– Holà!… Hé!… monsieur l’homme pressé! s’écria le gentilhomme.
L’amoureux ne tourna pas la tête. Peut-être n’avait-il pas entendu.
Tout à coup, une poigne s’abattit sur son épaule. Sans se retourner, confiant en sa force, il se secoua comme un jeune sanglier, pensant faire lâcher prise au gêneur. Mais le gêneur ne céda pas. Au contraire, son étreinte se resserra, se fit plus puissante. Sous la poigne de fer qui le maîtrisait, l’amoureux fut contraint de s’arrêter. Il se retourna en grinçant.
Il se vit en présence d’un gentilhomme de haute mine qui pouvait avoir une soixantaine d’années, mais n’en paraissait pas cinquante. En tout cas, ce gentilhomme était doué d’une force prodigieuse, puisqu’il avait pu, d’une seule main, paralyser, sans effort apparent, la résistance de notre amoureux.
Face à face, les deux hommes se regardèrent dans les yeux un inappréciable instant.
La stupeur, la honte, l’admiration, la fureur, le désespoir, tous ces sentiments passèrent sur le visage expressif du jeune homme.
Le gentilhomme, très calme, sans colère, le regardait d’un air froid. Il faut croire que ce gentilhomme n’était pas le premier venu. Comme si cette jeune physionomie qu’il considérait avait été un livre ouvert dans lequel il lisait couramment, une expression de pitié adoucit son œil fixe jusque-là et, lâchant le bouillant amoureux, il lui dit avec une douceur qui n’excluait pas une certaine hauteur:
– Je vois, monsieur, que si je vous laisse aller, ma susceptibilité va être cause de quelque irréparable malheur.
«Il me convient d’oublier la brusquerie de vos manières. Allez, jeune homme, pour cette fois-ci le chevalier de Pardaillan oubliera votre incivilité.»
L’amoureux eut un sursaut violent, ses yeux s’injectèrent, sa main se crispa sur la poignée de sa rapière comme s’il eût voulu dégainer à l’instant même. Mais il n’acheva pas le geste et, secouant la tête, pour lui-même, il expliqua:
– Non!… Je n’ai pas un instant à perdre!…
Et se rapprochant du chevalier de Pardaillan jusqu’à le toucher, les yeux dans les yeux, il gronda:
– Vous voulez bien me pardonner!… Et moi qui ne suis pas chevalier, moi Jehan qu’on appelle le Brave, je ne vous pardonnerai jamais l’humiliation que vous venez de m’infliger… Je vous tuerai, monsieur!… Allez, profitez des quelques heures qui vous restent à vivre. Demain matin, à neuf heures, je vous attendrai derrière le mur des Chartreux… Et s’il vous convenait d’oublier le rendez-vous qu’il vous donne, sachez que Jehan le Brave saura vous retrouver, fussiez-vous au plus profond des enfers!
Et il repartit comme un fauve déchaîné.
Le chevalier de Pardaillan fit un mouvement en avant comme pour le saisir à nouveau. Puis il s’arrêta, haussa les épaules avec insouciance et s’éloigna paisiblement en sifflotant un air du temps de Charles IX.