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Aventures De Trois Russes Et De Trois Anglais Dans LAfrique Australe

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Aventures De Trois Russes Et De Trois Anglais Dans LAfrique Australe
Название: Aventures De Trois Russes Et De Trois Anglais Dans LAfrique Australe
Автор: Verne Jules
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Aventures de trois Russes et de trois Anglais (1872) mettent en sc?ne six astronomes dont la t?che est de mesurer une portion de m?ridien terrestre. Il s'agit donc plus de g?od?sie que d'astronomie, mais historiquement, ce genre de travail a toujours ?chu aux astronomes. Les h?ros utilisent la m?thode de triangulation expos?e en d?tail dans l'Astronomie Populaire d'Arago. On retrouve le th?me des grandes exp?ditions scientifiques des Picard, Lacaille, Maupertuis, Bouguer, Godin, La Condamine, M?chain, Delambre, Arago… commandit?es par l'Acad?mie des sciences, aux ?poques o? le m?tier d'astronome ?tait un m?tier dangereux.

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Oui, ce karrou avait alors un aspect enchanteur. Il offrait toutes les conditions favorables à la vie ruminante. Les gnous aux sabots pointus, les caamas, qui suivant Harris, semblent n’être composés que de triangles, les élans, les chamois, les gazelles, y abondaient. Quelle variété de gibier, quels «coups de fusil», pour un des membres estimés du Hunter-Club! C’était vraiment une tentation trop forte pour sir John Murray, et, après avoir obtenu deux jours de repos du colonel Everest, il les employa à se fatiguer d’une remarquable façon. Mais aussi, quels succès il obtint en collaboration avec son ami le bushman, tandis que William Emery les suivait en amateur! Que de coups heureux à enregistrer sur son carnet de vénerie! Que de trophées cynégétiques à rapporter à son château des Highlands! Et dans quel oubli, pendant ces deux jours de vacances, il laissa les opérations géodésiques, la triangulation, la mesure de la méridienne! Qui eût cru que cette main, si habile à se servir du fusil, eût jamais manié les délicates lunettes d’un théodolite! Qui eût pensé que cet œil, si prompt à viser dans ses bonds une rapide antilope, se fût exercé à travers les constellations du ciel, en poursuivant quelque étoile de treizième grandeur! Oui! sir John Murray fut bien, complètement et uniquement chasseur pendant ces deux jours de liesse, et l’astronome disparut à faire craindre qu’il ne reparût jamais!

Entre autres faits de chasse à porter à l’actif de sir John, il faut en citer un, signalé par des résultats inattendus, et qui ne rassura guère le bushman sur l’avenir de l’expédition scientifique. Cet incident ne pouvait que justifier les inquiétudes dont le perspicace chasseur avait fait part au colonel Everest.

C’était le 15 octobre. Depuis deux jours, sir John se livrait tout entier à ses impérieux instincts. Un troupeau d’une vingtaine de ruminants avait été signalé à deux milles environ sur le flanc droit de la caravane. Mokoum reconnut qu’ils appartenaient à cette belle espèce d’antilopes, connue sous le nom d’oryx, et dont la capture, fort difficile, met en relief tout chasseur africain.

Aussitôt, le bushman fit connaître à sir John l’heureuse occasion qui se présentait et il l’engagea fortement à en profiter. Il lui apprit en même temps que ces oryx étaient très-difficiles à forcer, que leur vitesse dépassait celle du cheval le plus rapide, que le célèbre Cumming, quand il chassait dans le pays des Namaquois, lors même qu’il montait des chevaux de grand fond, n’avait pas atteint, dans toute sa vie de chasseur, quatre de ces merveilleuses antilopes!

Il n’en fallait pas tant pour surexciter l’honorable Anglais, qui se déclara prêt à se lancer sur les traces des oryx. Il choisit son meilleur cheval, son meilleur fusil, ses meilleurs chiens, et, dans son impatience, précédant le patient bushman, il se dirigea vers la lisière d’un taillis confinant à une vaste plaine, et près duquel la présence des ruminants avait été signalée.

Après une heure de marche, les deux chevaux s’arrêtèrent. Mokoum, abrité derrière un bouquet de sycomores, montra à son compagnon la bande paissante qui se tenait au vent à quelques centaines de pas. Ces défiants animaux ne les avaient cependant point encore aperçus, et ils broutaient paisiblement l’herbe des pâturages. Toutefois, un des ces oryx semblait se tenir à l’écart. Le bushman le fit remarquer à sir John.

«C’est une sentinelle, lui dit-il. Cet animal, un vieux malin sans doute, veille au salut commun. Au moindre danger, il fera entendre une sorte de hennissement, et la troupe, lui en tête, décampera de toute la vigueur de jambes. Il faut donc ne le tirer qu’à bonne distance et l’abattre du premier coup.»

Sir John se contenta de répondre par un signe de tête affirmatif, et il se mit en bonne position pour observer ce troupeau.

Les oryx continuaient de brouter sans défiance. Leur gardien, auquel un remous de vent avait peut-être apporté quelques émanations suspectes, levait assez fréquemment son front cornu et montrait quelques symptômes d’agitation. Mais il était trop loin des chasseurs pour que ceux-ci pussent le tirer avec succès. Quant à forcer la bande à la course, sur cette vaste plaine qui lui offrait une piste favorable, il ne fallait pas y songer. Peut-être la troupe se rapprocherait-elle du taillis, et dans ce cas, sir John et le bushman pourraient viser l’un de ces oryx dans des conditions à peu près favorables.

Le hasard sembla devoir favoriser les chasseurs. Peu à peu, sous la direction du vieux mâle, les ruminants se rapprochèrent du bois. Sans doute, ils ne se croyaient pas en sûreté dans cette plaine découverte, et ils voulaient s’abriter sous l’épaisse ramure du taillis. Lorsque leur intention ne put être méconnue, le bushman invita son compagnon à mettre comme lui pied à terre. Les chevaux furent attachés au pied d’un sycomore, la tête enveloppée dans une couverture, précaution qui assurait à la fois leur mutisme et leur immobilité. Puis, les chiens suivant, Mokoum et sir John se glissèrent sous les broussailles, en longeant la lisière sarmenteuse du bois, mais de manière à gagner une sorte de pointe formée par les derniers arbres, et dont l’extrémité n’était pas à trois cents pas du troupeau.

Là, les deux chasseurs se blottirent comme s’ils eussent été à l’affût, et, le fusil armé, ils attendirent.

De la place qu’ils occupaient ainsi, ils pouvaient observer les oryx, et admirer même en détail ces élégants animaux. Les mâles se distinguaient peu des femelles, et même par une bizarrerie dont la nature n’offre que de rares exemples, ces femelles, armées plus formidablement que les mâles, portaient des cornes recourbées en arrière et élégamment effilées. Aucun animal n’est plus charmant que cette antilope dont l’oryx forme la variété; aucune ne présente de bigarrures noires aussi délicatement disposées. Un bouquet de poils flotte à la gorge de l’oryx, sa crinière est droite, et son épaisse queue traîne jusqu’à terre.

Cependant le troupeau, composé d’une vingtaine d’individus, après s’être rapproché du bois, demeura stationnaire. Le gardien, bien évidemment, poussait les oryx à quitter la plaine. Il passait entre les hautes herbes et cherchait à les masser en un groupe compact, comme fait un chien de berger des moutons confiés à sa surveillance. Mais ces animaux, folâtrant dans le pâturage, ne paraissaient point d’humeur à abandonner cette luxuriante prairie. Ils résistaient, ils s’échappaient en gambadant, et recommençaient à brouter quelques pas plus loin.

Ce manège surprit fort le bushman. Il le fit observer à sir John, mais sans pouvoir lui en donner l’explication. Le chasseur ne pouvait comprendre l’obstination de ce vieux mâle, ni pour quelle raison il voulait ramener sous bois la troupe d’antilopes.

La situation se prolongeait cependant, sans se modifier. Sir John tourmentait impatiemment la platine de son rifle. Tantôt il voulait tirer, tantôt se porter en avant. Mokoum ne parvenait que très-difficilement à le contenir.

Une heure s’était ainsi écoulée, et l’on ne pouvait prévoir combien d’autres s’écouleraient encore, quand un des chiens, probablement aussi impatient que sir John, poussa un formidable aboiement et se précipita vers la plaine.

Le bushman, furieux, eût volontiers envoyé une charge de plomb au maudit animal! Mais déjà le rapide troupeau fuyait avec une vitesse sans égale, et sir John comprit alors qu’aucun cheval n’aurait pu l’atteindre. En peu d’instants, les oryx ne formaient plus que des points noirs qui bondissaient entre les hautes herbes.

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