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Les Enfants Du Capitaine Grant

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Les Enfants Du Capitaine Grant
Название: Les Enfants Du Capitaine Grant
Автор: Verne Jules
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Enfants Du Capitaine Grant - читать бесплатно онлайн , автор Verne Jules

Lord et Lady Glenarvan, ainsi que le g?ographe Paganel, aident Mary et Robert Grant ? retrouver leur p?re qui a fait naufrage sur une ?le dont on ne connait que la latitude, ce qui les am?ne ? traverser l'Am?rique du sud, puis l'Australie o? un bagnard ?vad?, Ayrton, tente de s'emparer du yacht de Glenarvan, et enfin l'Oc?anie o?, apr?s avoir ?chapp? aux anthropophages, il retrouveront enfin la trace de leur p?re…

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En y arrivant, les captifs furent horriblement impressionnés à la vue des têtes qui ornaient les poteaux de la seconde enceinte. Lady Helena et Mary Grant détournèrent les yeux avec plus de dégoût encore que d’épouvante.

Ces têtes avaient appartenu aux chefs ennemis tombés dans les combats, dont les corps servirent de nourriture aux vainqueurs.

Le géographe les reconnut pour telles, à leurs orbites caves et privés d’yeux.

En effet, l’œil des chefs est dévoré; la tête, préparée à la manière indigène, vidée de sa cervelle et dénudée de tout épiderme, le nez maintenu par de petites planchettes, les narines bourrées de phormium, la bouche et les paupières cousues, est mise au four et soumise à une fumigation de trente heures.

Ainsi disposée, elle se conserve indéfiniment sans altération ni ride, et forme des trophées de victoire.

Souvent les maoris conservent la tête de leurs propres chefs; mais, dans ce cas, l’œil reste dans son orbite et regarde. Les néo-zélandais montrent ces restes avec orgueil; ils les offrent à l’admiration des jeunes guerriers, et leur payent un tribut de vénération par des cérémonies solennelles.

Mais, dans le pah de Kai-Koumou, les têtes d’ennemis ornaient seules cet horrible muséum, et là, sans doute, plus d’un anglais, l’orbite vide, augmentait la collection du chef maori.

La case de Kai-Koumou, entre plusieurs huttes de moindre importance, s’élevait au fond du pah, devant un large terrain découvert que des européens eussent appelé «le champ de bataille.» Cette case était un assemblage de pieux calfeutrés d’un entrelacement de branches, et tapissé intérieurement de nattes de phormium. Vingt pieds de long, quinze pieds de large, dix pieds de haut faisaient à Kai-Koumou une habitation de trois mille pieds cubes. Il n’en faut pas plus pour loger un chef zélandais.

Une seule ouverture donnait accès dans la hutte; un battant à bascule, formé d’un épais tissu végétal, servait de porte. Au-dessus, le toit se prolongeait en manière d’impluvium. Quelques figures sculptées au bout des chevrons ornaient la case, et le «wharepuni» ou portail offrait à l’admiration des visiteurs des feuillages, des figures symboliques, des monstres, des rinceaux contournés, tout un fouillis curieux, né sous le ciseau des ornemanistes indigènes.

À l’intérieur de la case, le plancher fait de terre battue s’élevait d’un demi-pied au-dessus du sol.

Quelques claies en roseaux, et des matelas de fougère sèche recouverts d’une natte tissée avec les feuilles longues et flexibles du «typha», servaient de lits. Au milieu, un trou en pierre formait le foyer, et au toit, un second trou servait de cheminée. La fumée, quand elle était suffisamment épaisse, se décidait enfin à profiter de cette issue, non sans avoir déposé sur les murs de l’habitation un vernis du plus beau noir.

À côté de la case s’élevaient les magasins qui renfermaient les provisions du chef, sa récolte de phormium, de patates, de taros, de fougères comestibles, et les fours où s’opère la cuisson de ces divers aliments au contact de pierres chauffées. Plus loin, dans de petites enceintes, parquaient des porcs et des chèvres, rares descendants des utiles animaux acclimatés par le capitaine Cook. Des chiens couraient çà et là, quêtant leur maigre nourriture.

Ils étaient assez mal entretenus pour des bêtes qui servent journellement à l’alimentation du maori.

Glenarvan et ses compagnons avaient embrassé cet ensemble d’un coup d’œil. Ils attendaient auprès d’une case vide le bon plaisir du chef, non sans être exposés aux injures d’une bande de vieilles femmes.

Cette troupe de harpies les entourait, les menaçait du poing, hurlait et vociférait. Quelques mots d’anglais qui s’échappaient de leurs grosses lèvres laissaient clairement entrevoir qu’elles réclamaient d’immédiates vengeances.

Au milieu de ces vociférations et de ces menaces, lady Helena, tranquille en apparence, affectait un calme qui ne pouvait être dans son cœur. Cette courageuse femme, pour laisser tout son sang-froid à lord Glenarvan, se contenait par d’héroïques efforts. La pauvre Mary Grant, elle, se sentait défaillir, et John Mangles la soutenait, prêt à se faire tuer pour la défendre. Ses compagnons supportaient diversement ce déluge d’invectives, indifférents comme le major, ou en proie à une irritation croissante comme Paganel.

Glenarvan, voulant éviter à lady Helena l’assaut de ces vieilles mégères, marcha droit à Kai-Koumou, et montrant le groupe hideux: «Chasse-les», dit-il.

Le chef maori regarda fixement son prisonnier sans lui répondre; puis, d’un geste, il fit taire la horde hurlante. Glenarvan s’inclina, en signe de remerciement, et vint reprendre lentement sa place au milieu des siens.

En ce moment, une centaine de néo-zélandais étaient réunis dans le pah, des vieillards, des hommes faits, des jeunes gens, les uns calmes, mais sombres, attendant les ordres de Kai-Koumou, les autres se livrant à tous les entraînements d’une violente douleur; ceux-ci pleuraient leurs parents ou amis tombés dans les derniers combats.

Kai-Koumou, de tous les chefs qui se levèrent à la voix de William Thompson, revenait seul aux districts du lac, et, le premier, il apprenait à sa tribu la défaite de l’insurrection nationale, battue dans les plaines du bas Waikato. Des deux cents guerriers qui, sous ses ordres, coururent à la défense du sol, cent cinquante manquaient au retour.

Si quelques-uns étaient prisonniers des envahisseurs, combien, étendus sur le champ de bataille, ne devaient jamais revenir au pays de leurs aïeux!

Ainsi s’expliquait la désolation profonde dont la tribu fut frappée à l’arrivée de Kai-Koumou. Rien n’avait encore transpiré de la dernière défaite, et cette funeste nouvelle venait d’éclater à l’instant.

Chez les sauvages, la douleur morale se manifeste toujours par des démonstrations physiques. Aussi, les parents et amis des guerriers morts, les femmes surtout, se déchiraient la figure et les épaules avec des coquilles aiguës. Le sang jaillissait et se mêlait à leurs larmes. Les profondes incisions marquaient les grands désespoirs.

Les malheureuses zélandaises, ensanglantées et folles, étaient horribles à voir.

Un autre motif, très grave aux yeux des indigènes, accroissait encore leur désespoir. Non seulement le parent, l’ami qu’ils pleuraient, n’était plus, mais ses ossements devaient manquer au tombeau de la famille. Or, la possession de ces restes est regardée, dans la religion maorie, comme indispensable aux destinées de la vie future; non la chair périssable, mais les os, qui sont recueillis avec soin, nettoyés, grattés, polis, vernis même, et définitivement déposés dans «l’oudoupa», c’est-à-dire «la maison de gloire». Ces tombes sont ornées de statues de bois qui reproduisent avec une fidélité parfaite les tatouages du défunt. Mais aujourd’hui, les tombeaux resteraient vides, les cérémonies religieuses ne s’accompliraient pas, et les os qu’épargnerait la dent des chiens sauvages blanchiraient sans sépulture sur le champ du combat.

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