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La reprise

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La reprise
Название: La reprise
Дата добавления: 16 январь 2020
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La reprise - читать бесплатно онлайн , автор Robbe-grillet Alain

Nous sommes ? Berlin, en novembre 1949. HR, agent subalterne d'un service fran?ais de renseignement et d'interventions hors normes, arrive dans l'ancienne capitale en ruine, ? laquelle il se croit li? par un souvenir confus, remontant par bouff?es de sa tr?s jeune enfance. Il y est aujourd'hui charg? d'une mission dont ses chefs n'ont pas cru bon de lui d?voiler la signification r?elle, pr?f?rant n'en fournir que les ?l?ments indispensables pour l'action qu'on attend de son aveugle fid?lit?. Mais les choses ne se passent pas comme pr?vu…

?a fait des si?cles qu'on vous rebat les oreilles avec le Nouveau Roman et Robbe-Grillet. Evidemment, vous avez eu le choix. Vous avez lu ou vous n'avez pas lu Robbe-Grillet. D?s lors, vous avez ?t? class? d?finitivement. Si vous faites partie des lecteurs de Robbe-Grillet, je n'ai rien ? vous apprendre, nous nous comprenons.

Si vous avez essay? La Jalousie en vain, si on vous a dit Dans le Labyrinthe, c'est pire, vous n'avez certainement pas d? avoir la moindre envie de lire La Reprise. D'autant que le Nouveau Roman n'est plus tendance depuis longtemps, et que son auteur, pensez-vous, doit fr?ler le g?tisme. Peut-?tre tout au plus les relents de souffre qui entourent ce roman ont-ils titill? votre libido, mais, c'est s?r, pas au point de le lire!

Pour vous, donc, cette critique. La Reprise est le point d'orgue du Nouveau Roman. Dans sa construction, on y sent la cons?cration d'un style qui, jusqu'? pr?sent, semblait plus relever de l'exp?rimentation que de l'art. Le caract?re froid, m?thodique des romans pr?c?dents, leur obscurantisme volontaire ont c?d? la place ? une fluidit? totale. Les inventions des romans de Robbe-Grillet trouvent ici tout naturellement leur place. Les effets de brouillage n'ont plus rien de gratuit, ils servent l'histoire de fa?on magistrale. Tous les autres romans de Robbe-Grillet semblent converger vers celui-ci, peut-?tre le dernier, qui du coup, justifie tout le Nouveau Roman.

La Reprise est certainement le point final, mais aussi, pour une nouvelle g?n?ration de lecteurs, le point d'entr?e dans l'oeuvre de Robbe-Grillet.

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Les brûlures avec le bout rougi d'un cigare sont horriblement douloureuses, surtout quand on les applique dans ces régions particulièrement sensibles et vulnérables dont tu devines sans mal la localisation… L'arôme du tabac clair n'en sera que plus savoureux ensuite, plus musqué…»

Cette fois, ma petite sirène de la Baltique (dont les jambes ici ont été largement disjointes) éclate en sanglots convulsifs et désespérés, bredouille des supplications incohérentes, jure tout ignorer de ce que l'on voudrait obtenir d'elle, implore notre pitié pour son gentil gagne-pain. Comme je continue à tirer tranquillement sur mon havane (un des meilleurs que j'aie fumés) en la regardant se tordre et gémir, elle réussit à trouver une information susceptible – espère-t-elle – de nous convaincre d'une bonne volonté d'ailleurs évidente: «La dernière fois que je l'ai aperçu, j'avais tout juste six ans… C'était dans un modeste logement du centre, qui donnait sur le Gendarmenmarkt, un endroit qui n'existe même plus à présent…

– Tu vois bien, dis-je, que tu sais quelque chose et que tu as de nouveau menti en nous assurant le contraire.»

Je quitte mon fauteuil d'un air résolu pour m'avancer sur elle, qui ouvre en grand les yeux et la bouche, paralysée tout à coup par un effroi fascinant. Je détache d'un coup sec de l'index le cylindre de cendre grise, au bout du cigare dont je tire aussitôt plusieurs bouffées successives afin d'en aviver au maximum la pointe incandescente, que je fais mine d'approcher d'une aréole rose au mamelon dressé. L'imminence du supplice arrache à la prévenue un long hurlement de terreur.

C'était là le dénouement attendu. Je laisse choir mon reste de havane sur le sol. Puis, avec beaucoup de douceur et une infinie tendresse, j'enlace ma victime enchaînée en lui murmurant des paroles d'amour, sentimentales et déraisonnables, pimentées cependant, pour éviter l'excès de sucrerie, par quelques détails choquants appartenant davantage au vocabulaire de la luxure, voire d'une pornographie assez crue. Gigi frotte son ventre et ses seins contre moi, comme une enfant qui vient d'échapper à quelque terrible danger et se réfugie entre des bras protecteurs. Ne pouvant que demander, à cause des liens qui l'entravent, elle tend ses lèvres à la pulpe mouillée pour que je l'embrasse, et me rend mes baisers avec une passion très crédible, bien que sans doute exagérée à dessein. Quand ma main droite, celle qui a failli lui martyriser les bouts de seins, descend le long de l'aine jusqu'à l'ouverture béante des cuisses, je m'aperçois que ma jeune conquête est en train de faire pipi, par brèves saccades qu'elle ne parvient plus à contenir. Pour l'encourager et recueillir ainsi les fruits de mon ouvrage, je place mes doigts à l'origine même de la source chaude, qui jaillit alors en longs jets spasmodiques, ma proie vaincue s'abandonnant à son envie trop longtemps contrariée, tandis que s'élève en cascade, mêlé à des pleurs pas encore complètement taris, un rire clair et frais de petite fille qui vient de découvrir un jeu nouveau, un peu dégoûtant. «Voilà, dit le docteur, une persuasion rondement menée!»

Mais à cet instant précis, un violent bruit de verre brisé a retenti sur ma gauche, provenant du vitrage dépoli qui nous séparait de la pièce voisine.

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HR, toujours perdu dans sa contemplation de l'énigmatique fresque murale qui tient lieu de fenêtre à la chambre d'enfants où il a dormi, retenu en particulier par cette adolescente grandeur nature qui frappe au carreau (en trompe-l'œil lui aussi) pour demander du secours, si présente – non seulement par sa main tendue en avant, mais surtout par son angélique visage rosi d'émoi, ses larges yeux verts encore agrandis par l'excitation de l'aventure, sa bouche dont les lèvres disjointes à la pulpe brillante sont sur le point de pousser un long cri de détresse – et si proche qu'on la croirait déjà entrée dans la chambre, HR donc sursaute en entendant derrière lui un bruit cristallin de verre cassé.

Il se retourne vivement vers la paroi opposée. A l'angle gauche de la pièce, dans l'embrasure béante de la porte, Gigi est là, toujours vêtue de sa robe d'écolière à col arrondi en dentelle blanche, regardant sur le sol à ses pieds des débris étincelants qui ressemblent aux restes d'une coupe à champagne, brisée en multiples fragments épars. Le plus important d'entre eux – et le mieux reconnaissable comporte l'ensemble du pied, ne supportant plus qu'une pointe de cristal, effilée comme un stylet à lame courbe. L'adolescente, qui tient sur son bras replié un vêtement d'extérieur, manteau ou cape, a pris un air désemparé qui lui fait entrouvrir les lèvres de confusion, les paupières baissées vers le soudain désastre. Elle dit:

«Je vous apportais une coupe de mousseux… Ça m'a échappé des mains, je ne comprends pas comment…» Puis, relevant les yeux, elle retrouve aussitôt son ton plein d'assurance: «Mais qu'est-ce que vous faites là depuis une heure, toujours en pyjama et planté devant cette peinture absurde? J'ai eu le temps d'aller boire un verre avec des amis, qui sont en bas avec ma mère, et de finir mes préparatifs pour la soirée au boulot… A présent, je dois y aller, ou bien je vais être en retard…

– Cet endroit où tu travailles, c'est un mauvais lieu?

– Trouvez donc un bon lieu à Berlin, dans les ruines généralisées laissées par le cataclysme! Comme dit un proverbe d'ici: les putains et les escrocs arrivent toujours plus vite que les prêtres! Inutile de se voiler la face… Et dangereux!

– Les clients, c'est seulement des militaires alliés?

– Ça dépend des jours. Il y a aussi des aventuriers en tout genre: espions minables, proxénètes, psychanalystes, architectes d'avant-garde, criminels de guerre, hommes d'affaires véreux avec leurs avocats. Io prétend qu'il y vient tout ce qu'il faut pour refaire un monde.

– Et comment se nomme cette cour des miracles?

– On en trouve autant qu'on veut dans toute la bordure nord de Schoneberg, depuis Kreuzberg jusqu'à Tiergarten. La boîte où j'officie s'appelle die Sphinx, qui veut dire «la Sphinge» puisque le mot est uniquement féminin en allemand.

– Tu parles allemand?

– Allemand, anglais, italien…

– Il y a une langue que tu préfères?»

Une mèche blonde retombant devant sa bouche, Gigi se contente, en guise de réponse dirait-on, de sortir le bout rose de sa langue et de happer entre ses lèvres aux ourlets charnus la boucle de cheveux rebelle. Ses yeux brillent bizarrement. Sous l'effet d'un adroit maquillage, ou bien de quelque drogue? Quelle sorte de vin venait-elle donc de boire? Avant de disparaître, elle prononce encore plusieurs phrases rapides: «La vieille dame qui va venir, pour vous apporter le dîner, ramassera les morceaux de verre. Si vous ne le savez pas déjà, les toilettes sont dans le couloir: à droite et puis à gauche. Vous ne pouvez pas sortir de la maison: vous êtes encore trop faible. La porte qui permet de descendre à l'étage inférieur est d'ailleurs fermée à clef.»

Drôle de clinique, pense HR qui se demande en outre s'il a véritablement envie de quitter cette inquiétante demeure, où il a bien l'air d'être prisonnier. Que sont devenus ses vêtements? Il ouvre la porte de la grosse armoire à glace. Dans la partie penderie, un costume d'homme est accroché sur un cintre, mais ce n'est visiblement pas le sien. Sans y réfléchir davantage, il retourne vers le tableau de guerre et sa propre image en soldat, ou du moins celle d'un homme qui lui ressemble malgré le bandeau ensanglanté masquant les yeux, et vers cette Gigi d'Europe centrale qui le guide par la main. C'est seulement alors qu'il remarque un détail du trompe-l'œil qui lui avait échappé: le carreau que touche la fillette secourable présente une fêlure en étoile, juste centrée sur l'endroit où vient de frapper son petit poing. Les lignes sinueuses qui en partent, dans l'épaisseur supposée de la vitre, scintillent en longs rubans de lumière comme les impalpables leurres métallisés que larguaient les avions assaillants, pour rendre leur repérage impossible.

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