Enone, j'avais cru qu'en aimant ta beaute
Ou l'ame avec le corps trouvent leur unite,
J'allais, m'affermissant et le coeur et l'esprit,
Monter jusqu'a cela, qui jamais ne perit,
N'ayant ete cree, qui n'est froidure он feu,
Qui n'est beau quelque part et laid en autre lieu;
Et me flattais encore d'une belle harmonie,
Que j'eusse compose du meilleur et du pire,
Ainsi que le chanteur que cherit Polymnio,
En accordant le grave avec l'aigu, retire
Un son bien eleve sur les nerfs de sa lyre.
Mais mon courage, helas! se pamant comme mort,
M'enseigna que lo trait qui m'avait fait amant
Ne fut pas de cet arc que courbe sans effort
La Venus qui naquit du male seulement,
Mais que j'avais souffert cette Venus derniere
Oui a le coeur couard, ne d'une faible mere.
Et pourtant, ce mauvais garcon, chasseur habile,
Qui charge son carquois de sagesse subtile,
Qui secoue on riant sa torche, pour un jour,
Qui ne pose jamais que sur de tendres fleurs,
C'est sur un teint charmant qu'il essuie les pleurs,
Et c'est encore un Dieu, Enone, cet Amour.
Mais, laisse, les oiseaux du printemps sont parus,
Et je vois les rayons du soleil amortis.
Enone, ma douleur, harmonieux visage,
Superbe humilite, doux-honnete langage,
Hier me remirant dans cet etang glace,
Qui au bout du jardin se couvre de feuillage,
Sur ma face je vis que les jours ont passe.