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Pierre Et Jean

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Pierre Et Jean
Название: Pierre Et Jean
Автор: de Maupassant Guy
Дата добавления: 16 январь 2020
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Pierre Et Jean - читать бесплатно онлайн , автор de Maupassant Guy

Ce roman de Guy de Maupassant a ?t? publi? en feuilleton dans la nouvelle Revue du 1er d?cembre 1887 au 1er janvier 1888 et en volume chez Ollendorff la m?me ann?e.

Les Roland, anciens bijoutiers parisiens se sont retir?s au Havre, o? ils vivent des jours heureux. Ils ont deux fils: l’a?n?, Pierre, pr?s de la trentaine, brun, maigre et nerveux, tourment? par de grands projets et sujet ? des d?couragements impr?vus, vient d'obtenir son de terminer ses ?tudes de m?decine. Jean, son cadet de cinq ans, gros, blond, et placide vient d'obtenir son d'achever ses ?tudes de droit. Ils sont venus tous deux prendre du repos apr?s leurs ?tudes couronn?es de succ?s.

Ils songent ? s’installer et convoitent tous deux la jeune et belle veuve d’un riche capitaine de vaisseau, Mme Ros?milly.

Au cours d’une partie de p?che familiale en compagnie de Mme Ros?milly, les deux fr?res, pour s?duire la jeune femme, se livrent ? une comp?tition acharn?e ? la rame. Le lecteur d?couvre que sous une apparence d’union et d’affection, une vraie rivalit? oppose les deux fr?res.

Le soir m?me, au retour de cette promenade en mer ils apprennent que Mar?chal, un ancien ami de la famille, vient de mourir ? Paris et qu’il l?gue toute sa fortune ? Jean. Sur le port, Pierre f?licite son fr?re pour sa nouvelle fortune, mais il ressent int?rieurement un irr?pressible sentiment de jalousie.

Cette jalousie, aliment?e par les insinuations du pharmacien Marowsko, ? qui il vient d’apprendre la nouvelle («?a ne fera pas bon effet»), et les r?flexions d’une fille de la brasserie («?a n’est pas ?tonnant qu’il te ressemble si peu») se transforme bient?t en une suspicion obsessionnelle: Et si Jean ?tait le fils naturel de Mar?chal?

Pierre, tr?s choqu?, trouble le joyeux repas familial.

Il sort en mer, mais est tr?s affect? par les soup?ons qu’ont fait na?tre les remarques de ses proches. Il ne parvient pas ? comprendre pourquoi seul Jean a h?rit? de la fortune de Mar?chal, alors que ce dernier le connaissait depuis qu'il ?tait tout petit.

La brume l’oblige ? rentrer. Il commence alors «une enqu?te minutieuse» en vue de percer ce myst?re. Il se souvient alors qu’? la naissance de Jean, on avait d?croch? du mur le portrait de Mar?chal.

Il demande ? sa m?re o? se trouve le portrait de Mar?chal. Il lui laisse entendre qu’il sait tout. Un voyage ? Trouville, dont il esp?re une diversion, ne parvient h?las pas ? lui changer les id?es. L’attitude de sa m?re ? propos du portrait, et la ressemblance qu’il note entre Mar?chal et son fr?re, transforment le doute en «intol?rable certitude».

Malheureux, tortur? par ce secret et par le remords qui le rend honteux de lui-m?me, Pierre tourmente sa m?re. ? l’occasion d’une sortie sur la plage, il se d?clare ? Mme Ros?milly, qui ne reste pas indiff?rente ? ses avances.

Jean s’est install? dans un nouvel appartement, ce qui suscite la jalousie de Pierre. Les deux fr?res se querellent. Pierre, sous le coup de la col?re, r?v?le, sans m?nagement, ? son fr?re la v?rit?: «Tu es le fils d’un homme qui t’as laiss? sa fortune». Leur m?re, qui est dans la chambre ? c?t?, entend certainement cet horrible aveu.

La m?re de Jean lui confirme ce secret: «Tu n’es pas le fils de Roland». Elle veut partir ? tout jamais, mais Jean la supplie de rester. La m?re et le fils se r?concilient.

Pierre souhaite s’?loigner et d?cide de s’embarquer comme m?decin ? bord d'un paquebot transatlantique.

M. Roland ne soup?onne pas la trag?die qui se joue au sein de sa famille.Nous retrouvons alors dans ce dernier chapitre les m?mes protagonistes que ceux du d?but du roman. Seul Pierre manque ? l‘appel. Tout ce groupe est r?uni dans la m?me barque, pour saluer le d?part de La Lorraine, ? bord de laquelle Pierre commence une nouvelle «vie de for?at vagabond».

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– VII -

Dans le break, en revenant, tous les hommes, hormis Jean, sommeillèrent. Beausire et Roland s’abattaient, toutes les cinq minutes, sur une épaule voisine qui les repoussait d’une secousse. Ils se redressaient alors, cessaient de ronfler, ouvraient les yeux, murmuraient: «Bien beau temps», et retombaient, presque aussitôt, de l’autre côté.

Lorsqu’on entra dans Le Havre, leur engourdissement était si profond qu’ils eurent beaucoup de peine à le secouer, et Beausire refusa même de monter chez Jean où le thé les attendait. On dut le déposer devant sa porte.

Le jeune avocat, pour la première fois, allait coucher dans son logis nouveau; et une grande joie, un peu puérile, l’avait saisi tout à coup de montrer, justement ce soir-là, à sa fiancée, l’appartement qu’elle habiterait bientôt.

La bonne était partie, Mme Roland ayant déclaré qu’elle ferait chauffer l’eau et servirait elle-même, car elle n’aimait pas laisser veiller les domestiques, par crainte du feu.

Personne, autre qu’elle, son fils et les ouvriers, n’était encore entré, afin que la surprise fût complète quand on verrait combien c’était joli.

Dans le vestibule, Jean pria qu’on attendît. Il voulait allumer les bougies et les lampes, et il laissa dans l’obscurité Mme Rosémilly, son père et son frère, puis il cria: «Arrivez!» en ouvrant toute grande la porte à deux battants.

La galerie vitrée, éclairée par un lustre et des verres de couleur cachés dans les palmiers, les caoutchoucs et les fleurs, apparaissait d’abord pareille à un décor de théâtre. Il y eut une seconde d’étonnement. Roland, émerveillé de ce luxe, murmura: «Nom d’un chien», saisi par l’envie de battre des mains comme devant les apothéoses.

Puis on pénétra dans le premier salon, petit, tendu avec une étoffe vieille or, pareille à celle des sièges… Le grand salon de consultation très simple, d’un rouge saumon pâle, avait grand air.

Jean s’assit dans le fauteuil devant son bureau chargé de livres, et d’une voix grave, un peu forcée:

«Oui, Madame, les textes de lois sont formels et me donnent, avec l’assentiment que je vous avais annoncé, l’absolue certitude qu’avant trois mois l’affaire dont nous nous sommes entretenus recevra une heureuse solution.» Il regardait Mme Rosémilly qui se mit à sourire en regardant Mme Roland; et Mme Roland, lui prenant la main, la serra.

Jean, radieux, fit une gambade de collégien et s’écria:

«Hein, comme la voix porte bien. Il serait excellent pour plaider, ce salon.» Il se mit à déclamer:

«Si l’humanité seule, si ce sentiment de bienveillance naturelle que nous éprouvons pour toute souffrance devait être le mobile de l’acquittement que nous sollicitons de vous, nous ferions appel à votre pitié, Messieurs les jurés, à votre cœur de père et d’homme; mais nous avons pour nous le droit, et c’est la seule question du droit que nous allons soulever devant vous…» Pierre regardait ce logis qui aurait pu être le sien, et il s’irritait des gamineries de son frère, le jugeant, décidément, trop niais et pauvre d’esprit.

Mme Roland ouvrit une porte à droite.

«Voici la chambre à coucher», dit-elle.

Elle avait mis à la parer tout son amour de mère. La tenture était en cretonne de Rouen qui imitait la vieille toile normande.

Un dessin Louis XV – une bergère dans un médaillon que fermaient les becs unis de deux colombes – donnait aux murs, aux rideaux, au lit, aux fauteuils un air galant et champêtre tout à fait gentil.

«Oh! c’est charmant, dit Mme Rosémilly, devenue un peu sérieuse, en entrant dans cette pièce.

– Cela vous plaît? demanda Jean.

– Énormément.

– Si vous saviez comme ça me fait plaisir.» Ils se regardèrent une seconde, avec beaucoup de tendresse confiante au fond des yeux.

Elle était gênée un peu cependant, un peu confuse dans cette chambre à coucher qui serait sa chambre nuptiale. Elle avait remarqué, en entrant, que la couche était très large, une vraie couche de ménage, choisie par Mme Roland qui avait prévu sans doute et désiré le prochain mariage de son fils; et cette précaution de mère lui faisait plaisir cependant, semblait lui dire qu’on l’attendait dans la famille.

Puis quand on fut rentré dans le salon, Jean ouvrit brusquement la porte de gauche et on aperçut la salle à manger ronde, percée de trois fenêtres, et décorée en lanterne japonaise. La mère et le fils avaient mis là toute la fantaisie dont ils étaient capables. Cette pièce à meubles de bambou, à magots, à potiches, à soieries pailletées d’or, à stores transparents où des perles de verre semblaient des gouttes d’eau, à éventails cloués aux murs pour maintenir les étoffes, avec ses écrans, ses sabres, ses masques, ses grues faites en plumes véritables, tous ses menus bibelots de porcelaine, de bois, de papier, d’ivoire, de nacre et de bronze avait l’aspect prétentieux et maniéré que donnent les mains inhabiles et les yeux ignorants aux choses qui exigent le plus de tact, de goût et d’éducation artiste. Ce fut celle cependant qu’on admira le plus. Pierre seul fit des réserves avec une ironie un peu amère dont son frère se sentit blessé.

Sur la table, les fruits se dressaient en pyramides, et les gâteaux s’élevaient en monuments.

On n’avait guère faim; on suça les fruits et on grignota les pâtisseries plutôt qu’on ne les mangea. Puis, au bout d’une heure, Mme Rosémilly demanda la permission de se retirer.

Il fut décidé que le père Roland l’accompagnerait à sa porte et partirait immédiatement avec elle, tandis pue Mme Roland, en l’absence de la bonne, jetterait son coup d’œil de mère sur le logis afin que son fils ne manquât de rien.

«Faut-il revenir te chercher?» demanda Roland.

Elle hésita, puis répondit:

«Non, mon gros, couche-toi. Pierre me ramènera.» Dès qu’ils furent partis, elle souffla les bougies, serra les gâteaux, le sucre et les liqueurs dans un meuble dont la clef fût remise à Jean; puis elle passa dans la chambre à coucher, entrouvrit le lit, retarda si la carafe était remplie d’eau fraîche et la fenêtre bien fermée.

Pierre et Jean étaient demeurés dans le petit salon, celui-ci encore froissé de la critique faite sur son goût, et celui-là de plus en plus agacé de voir son frère dans ce logis.

Ils fumaient assis tous les deux, sans se parler. Pierre tout à coup se leva:

«Cristi! dit-il, la veuve avait l’air bien vannée ce soir, les excursions ne lui réussissent pas.» Jean se sentit soulevé soudain par une de ces promptes et furieuses colères de débonnaires blessés au cœur.

Le souffle lui manquait, tant son émotion était vive, et il balbutia:

«Je te défends désormais de dire «la veuve» quand tu parleras de Mme Rosémilly.» Pierre se tourna vers lui, hautain:

«Je crois que tu me donnes des ordres. Deviens-tu fou, par hasard?» Jean aussitôt s’était dressé:

«Je ne deviens pas fou, mais j’en ai assez de tes manières envers moi.» Pierre ricana:

«Envers toi? Est-ce que tu fais partie de Mme Rosémilly?

– Sache que Mme Rosémilly va devenir ma femme.» L’autre rit plus fort:

«Ah! ah! très bien. Je comprends maintenant pourquoi je ne devrai plus l’appeler «la veuve». Mais tu as pris une drôle de manière pour m’annoncer ton mariage.

– Je te défends de plaisanter… tu entends… je te le défends.» Jean s’était approché, pâle, la voix tremblante, exaspéré de cette ironie poursuivant la femme qu’il aimait et qu’il avait choisie.

Mais Pierre soudain devint aussi furieux. Tout ce qui s’amassait en lui de colères impuissantes, de rancunes écrasées, de révoltes domptées depuis quelque temps et de désespoir silencieux, lui montant à la tête, l’étourdit comme un coup de sang.

«Tu oses?… Tu oses?… Et moi je t’ordonne de te taire, tu entends, je te l’ordonne!» Jean, surpris de cette violence, se tut quelques secondes, cherchant, dans ce trouble d’esprit où nous jette la fureur, la chose, la phrase, le mot qui pourrait blesser son frère jusqu’au cœur.

Il reprit, en s’efforçant de se maîtriser pour bien frapper, de ralentir sa parole pour la rendre plus aiguë:

«Voilà longtemps que je te sais jaloux de moi, depuis le jour où tu as commencé à dire «la veuve» parce que tu as compris que cela me faisait mal.» Pierre poussa un de ces rires stridents et méprisants qui lui étaient familiers:

«Ah! ah! mon Dieu! Jaloux de toi!… moi?… moi?…

moi?… et de quoi?… de quoi, mon Dieu? de ta figure ou de ton esprit?…» Mais Jean sentit bien qu’il avait touché la plaie de cette âme:

«Oui, tu es jaloux de moi, et jaloux depuis l’enfance; et tu es devenu furieux quand tu as vu que cette femme me préférait et qu’elle ne voulait pas de toi.» Pierre bégayait, exaspéré de cette supposition:

«Moi… moi… jaloux de toi? à cause de cette cruche, de cette dinde, de cette oie grasse?…» Jean qui voyait porter ses coups reprit:

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