La Dame de Monsoreau Tome II
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Le dimanche gras de l'ann?e 1578, apr?s la f?te du populaire, et tandis que s'?teignaient dans les rues les rumeurs de la joyeuse journ?e, commen?ait une f?te splendide dans le magnifique h?tel que venait de se faire b?tir, de l'autre c?t? de l'eau et presque en face du Louvre, cette illustre famille de Montmorency qui, alli?e ? la royaut? de France, marchait l'?gale des familles princi?res. Cette f?te particuli?re, qui succ?dait ? la f?te publique, avait pour but de c?l?brer les noces de Fran?ois d'Epinay de Saint-Luc, grand ami du roi Henri III et l'un des favoris les plus intimes, avec Jeanne de Coss?-Brissac, fille du mar?chal de France de ce nom. Le repas avait eu lieu au Louvre, et le roi, qui avait consenti ? grand-peine au mariage, avait paru au festin avec un visage s?v?re qui n'avait rien d'appropri? ? la circonstance …' 'La Dame de Monsoreau' est, ? la suite de 'La Reine Margot', le deuxi?me volet du somptueux ensemble historique que Dumas ?crivit sur la Renaissance.
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– Que dis-tu?
– Je dis que Diane de Méridor s'appelle aujourd'hui madame de Monsoreau.
À ces mots, au lieu de la pâleur qui couvrait ordinairement les joues de François, le sang reflua si violemment à son visage, qu'on eût cru qu'il allait lui jaillir par les yeux.
– Sang du Christ! s'écria le prince furieux; cela est-il bien vrai?
– Pardieu! puisque je le dis, répliqua Bussy avec son air hautain.
– Ce n'est point ce que je voulais dire, répéta le prince, et je ne suspectais point votre loyauté, Bussy; je me demandais seulement s'il était possible qu'un de mes gentilshommes, un Monsoreau, eût eu l'audace de protéger contre mon amour une femme que j'honorais de mon amour.
– Et pourquoi pas? dit Bussy.
– Tu eusses donc fait ce qu'il a fait, toi?
– J'eusse fait mieux, monseigneur, je vous eusse averti que votre honneur se fourvoyait.
– Un moment, Bussy, dit le duc redevenu calme, écoutez, s'il vous plaît; vous comprenez, mon cher, que je ne me justifie pas.
– Et vous avez tort, mon prince, car vous n'êtes qu'un gentilhomme toutes les fois qu'il s'agit de prud'homme.
– Eh bien c'est pour cela que je vous prie d'être le juge de M. de Monsoreau.
– Moi?
– Oui, vous, et de me dire s'il n'est point un traître, traître envers moi?
– Envers vous?
– Envers moi, dont il connaissait les intentions.
– Et les intentions de Votre Altesse étaient?…
– De me faire aimer de Diane sans doute!
– De vous faire aimer?
– Oui, mais dans aucun cas de n'employer la violence.
– C'étaient là vos intentions, monseigneur? dit Bussy avec un sourire ironique.
– Sans doute, et ces intentions, je les ai conservées jusqu'au dernier moment, quoique M. de Monsoreau les ait combattues avec toute la logique dont il était capable.
– Monseigneur! monseigneur! que dites-vous là? Cet homme vous a poussé à déshonorer Diane?
– Oui.
– Par ses conseils!
– Par ses lettres. En veux-tu voir une, de ses lettres?
– Oh! s'écria Bussy, si je pouvais croire cela!
– Attends une seconde, tu verras.
Et le duc courut à une petite caisse que gardait toujours un page dans son cabinet, et en tira un billet qu'il donna à Bussy:
– Lis, dit-il, puisque tu doutes de la parole de ton prince.
Bussy prit le billet d'une main tremblante de doute, et lut:
«Monseigneur,
Que Votre Altesse se rassure: ce coup de main se fera sans risques, car la jeune personne part ce soir pour aller passer huit jours chez une tante qui demeure au château de Lude; je m'en charge donc, et vous n'avez pas besoin de vous en inquiéter. Quant aux scrupules de la demoiselle, croyez bien qu'ils s'évanouiront dès qu'elle se trouvera en présence de Votre Altesse; en attendant, j'agis… et ce soir… elle sera au château de Beaugé.
De Votre Altesse, le très respectueux serviteur,
BRYANT DE MONSOREAU.»
– Eh bien, qu'en dis-tu, Bussy? demanda le prince après que le gentilhomme eut relu la lettre une seconde fois.
– Je dis que vous êtes bien servi, monseigneur.
– C'est-à-dire que je suis trahi, au contraire.
– Ah! c'est juste! j'oubliais la suite.
– Joué! le misérable. Il m'a fait croire à la mort d'une femme…
– Qu'il vous volait; en effet, le trait est noir; mais, ajouta Bussy avec une ironie poignante, l'amour de M. de Monsoreau est une excuse.
– Ah! tu crois? dit le duc avec son plus mauvais sourire.
– Dame! reprit Bussy, je n'ai pas d'opinion là-dessus; je le crois si vous le croyez.
– Que ferais-tu à ma place? Mais d'abord, attends; qu'a-t-il fait lui-même?
– Il a fait accroire au père de la jeune fille que c'était vous qui étiez le ravisseur. Il s'est offert pour appui; il s'est présenté au château de Beaugé avec une lettre du baron de Méridor; enfin il a fait approcher une barque des fenêtres du château, et il a enlevé la prisonnière; puis, la renfermant dans la maison que vous savez, il l'a poussée, de terreurs en terreurs, à devenir sa femme.
– Et ce n'est point là une déloyauté infâme? s'écria le duc.
– Mise à l'abri sous la vôtre, monseigneur, répondit le gentilhomme avec sa hardiesse ordinaire.
– Ah! Bussy!… tu verras si je sais me venger!
– Vous venger! allons donc, monseigneur, vous ne ferez point une chose pareille.
– Comment?
– Les princes ne se vengent point, monseigneur, ils punissent. Vous reprocherez son infamie à ce Monsoreau, et vous le punirez.
– Et de quelle façon?
– En rendant le bonheur à mademoiselle de Méridor.
– Et le puis-je?
– Certainement.
– Et comment cela?
– En lui rendant la liberté.
– Voyons, explique-toi.
– Rien de plus facile; le mariage a été forcé, donc le mariage est nul.
– Tu as raison.
– Faites donc annuler le mariage, et vous aurez agi, monseigneur, en digne gentilhomme et en noble prince.
– Ah! ah! dit le prince soupçonneux, quelle chaleur! cela t'intéresse donc, Bussy?
– Moi, pas le moins du monde; ce qui m'intéresse, monseigneur, c'est qu'on ne dise pas que Louis de Clermont, comte de Bussy, sert un prince perfide et un homme sans honneur.
– Eh bien, tu verras. Mais comment rompre ce mariage?
– Rien de plus facile, en faisant agir le père.
– Le baron de Méridor?
– Oui.
– Mais il est au fond de l'Anjou.
– Il est ici, monseigneur, c'est-à-dire à Paris.
– Chez toi?
– Non, près de sa fille. Parlez-lui, monseigneur, qu'il puisse compter sur vous; qu'au lieu de voir dans Votre Altesse ce qu'il y a vu jusqu'à présent, c'est-à-dire un ennemi, il y voie un protecteur, et lui, qui maudissait votre nom, va vous adorer comme son bon génie.