JOSEPH BALSAMO Memoires dun medecin Tome I
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Les «M?moires d'un m?decin» est une suite romanesque qui a pour cadre la R?volution Fran?aise et qui comprend «Joseph Balsamo», «le Collier de la reine», «Ange Pitou» et la «Comtesse de Charny». Cette grande fresque, tr?s int?ressante sur le plan historique, captivante par son r?cit, a une grande force inventive et une port?e symbolique certaine.
«Joseph Balsamo» s'ouvre en 1770 sur un Prologue ?sot?rique: sur le mont Tonnerre sont r?unis les chefs de la franc-ma?onnerie universelle. Un inconnu qui se pr?sente comme le nouveau Messie, l'homme-Dieu – «Je suis celui qui est» -, proph?tise la R?volution universelle, qui sera lanc?e par la France, o? il se charge de devenir l'agent de la Providence. Cet inconnu s'appelle Joseph Balsamo, alias Cagliostro.
Trois trames vont s'entrem?ler tout au long du roman:
La lutte pour le pouvoir entre le parti de la dauphine, Marie-Antoinette, et celui de la Du Barry.
L'amour malheureux de Gilbert, petit paysan ambitieux, pour la belle Andr?e de Taverney, et le roman d'apprentissage de Gilbert qui, ayant suivi Andr?e ? Paris, devient d'abord le jouet de la Du Barry, puis est adopt? par son p?re spirituel, le philosophe Jean-Jacques Rousseau.
Enfin, le drame qui se joue entre Balsamo, Lorenza – m?dium qui assure, gr?ce ? son don de double vue, la puissance de Balsamo, qui le hait lorsqu'elle est ?veill?e et l'adore lorsqu'elle est endormie – et Althotas – qui cherche l'?lixir de longue vie, pour lequel il lui faut le sang d'une vierge…
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Un cri terrible fit retentir les voûtes.
– Tu connais nos mystères! s’écria le président; tu es donc un voyant ou un traître?
– Qui es-tu? demandèrent ensemble trois cents voix, en même temps que vingt épées étincelaient aux mains des fantômes les plus proches, et par un mouvement régulier, comme eût été celui d’une phalange exercée, venaient s’abaisser et se réunir sur la poitrine de l’inconnu.
Mais lui, souriant, calme, relevant la tête en secouant sa chevelure sans poudre, et retenue par le seul ruban qu’on avait noué autour de son front:
– Ego sum qui sum, dit-il, je suis celui qui est.
Puis il promena ses regards sur la muraille humaine qui l’entourait étroitement. À son regard dominateur les épées s’abaissèrent par mouvements inégaux, selon que ceux que l’inconnu écrasait de ce regard cédaient instantanément à son influence ou essayaient de la combattre.
– Tu viens de prononcer une imprudente parole, dit le président, et sans doute tu ne l’as prononcée que parce que tu n’en connais point la portée.
L’étranger secoua la tête en souriant.
– J’ai répondu ce que je dois répondre, dit-il.
– D’où viens-tu donc alors? demanda le président.
– Je viens du pays d’où vient la lumière.
– Nos instructions annoncent cependant que tu viens de Suède.
– Qui vient de Suède peut venir d’orient, reprit l’étranger.
– Une seconde fois, nous ne te connaissons pas. Qui es-tu?
– Qui je suis!… Soit, reprit l’inconnu; je vous le dirai tout à l’heure, puisque vous feignez de ne me point comprendre; mais auparavant je veux vous dire qui vous êtes vous-mêmes.
Les fantômes tressaillirent, et leurs glaives s’entrechoquèrent en passant de leur main gauche dans leur main droite et en se relevant à la hauteur de la poitrine de l’inconnu.
– D’abord, reprit l’étranger en étendant la main vers le président, toi qui te crois un dieu et qui n’es qu’un précurseur, toi le représentant des cercles suédois, je te dirai ton nom, pour n’avoir point besoin de te dire celui des autres. Swedenborg, les anges qui causent familièrement avec toi ne t’ont-ils pas révélé que celui que tu attendais s’était mis en chemin?
– C’est vrai, répondit le président en relevant son linceul pour mieux voir celui qui lui parlait; ils me l’ont dit.
Et celui qui relevait son linceul, contre toutes les habitudes des rites de la société, montrait en le relevant le visage vénérable et la barbe blanchie d’un vieillard de quatre-vingts ans.
– Bien, reprit l’étranger, maintenant à ta gauche est le représentant du cercle anglais, qui préside la loge de la Calédonie. Salut, milord. Si le sang de votre aïeule revit en vous, l’Angleterre peut espérer que la lumière éteinte se rallumera.
Les épées s’abaissèrent, la colère commençait à faire place à l’étonnement.
– Ah! c’est vous, capitaine? continua l’inconnu en s’adressant au dernier chef placé à la gauche du président; dans quel port avez-vous laissé votre beau bâtiment, que vous aimez comme une maîtresse? C’est une brave frégate, n’est-ce pas, que la Providence, et un nom qui portera bonheur à l’Amérique?
Puis se retournant vers celui qui se tenait à la droite du président:
– À ton tour, dit-il, prophète de Zurich, voyons regarde-moi en face, toi qui as poussé jusqu’à là divination la science physionomique, et dis tout haut si dans les lignes de mon visage tu ne reconnais pas le témoignage de ma mission.
Celui auquel il s’adressait recula d’un pas.
– Allons, continua l’étranger en s’adressant à son voisin, allons, descendant de Pélage, il s’agit de chasser une seconde fois les Maures de l’Espagne. Ce sera chose facile si les Castillans n’ont point à tout jamais perdu l’épée du Cid.
Le cinquième chef resta muet et immobile; on eût dit que la voix de l’inconnu l’avait changé en pierre.
– Et à moi, reprit le sixième chef, allant au-devant des paroles de l’inconnu, qui semblait l’oublier, à moi, n’as-tu rien à me dire?
– Si fait, répondit le voyageur en fixant sur divination un de ces regards perçants qui fouillaient les cœurs; si fait, j’ai à te dire ce que Jésus dit à Judas: je te le dirai tout à l’heure.
Celui auquel il s’adressait devint plus pâle que son linceul, tandis qu’un murmure courant par toute l’assemblée semblait demander compte au récipiendaire de cette étrange accusation.
– Tu oublies le représentant de la France, dit le président.
– Celui-là n’est point parmi nous, répondit l’étranger avec hauteur, et tu le sais bien, toi qui parles, puisque voilà son siège vide. Maintenant rappelle-toi que les pièges font sourire celui qui voit dans les ténèbres, qui agit malgré les éléments et qui vit malgré la mort.
– Tu es jeune, reprit le président, et tu parles avec l’autorité d’un dieu… Réfléchis bien, à ton tour: l’audace n’étourdit que les hommes irrésolus ou ignorants.
Un sourire de suprême dédain se dessina sur les lèvres de l’étranger.
– Vous êtes tous irrésolus, dit-il, puisque vous ne pouvez agir sur moi; vous êtes tous ignorants, puisque vous ne savez pas qui je suis, tandis qu’au contraire je sais, moi, qui vous êtes: donc je réussirais près de vous rien qu’avec de l’audace; mais à quoi sert l’audace à celui qui est tout-puissant?
– La preuve de cette puissance, dit le président, la preuve, donnez-nous-la.
– Qui vous a convoqués? demanda l’inconnu, passant du rôle d’interrogé à celui d’interrogateur.
– Le cercle suprême.
– Ce n’est pas sans but, dit l’étranger en se retournant vers le président et vers les cinq chefs, que vous êtes venus, vous de Suède, vous de Londres, vous de New-York, vous de Zurich, vous de Madrid, vous de Varsovie, vous tous enfin, continua-t-il en s’adressant à la foule, des quatre parties du monde, pour vous réunir dans le sanctuaire de la foi terrible.
– Non, sans doute, répondit le président, nous venons au-devant de celui qui a fondé un empire mystérieux en orient, qui a réuni les deux hémisphères dans une communauté de croyances, qui a enlacé les mains fraternelles du genre humain.
– Y a-t-il un signe certain auquel vous puissiez le reconnaître?
– Oui, dit le président, et Dieu a daigné me le dévoiler par l’intermédiaire de ses anges.
– Vous seul connaissez ce signe, alors?
– Moi seul le connais.
– Vous n’avez révélé ce signe à personne?