JOSEPH BALSAMO Memoires dun medecin Tome II
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Les «M?moires d'un m?decin» est une suite romanesque qui a pour cadre la R?volution Fran?aise et qui comprend «Joseph Balsamo», «le Collier de la reine», «Ange Pitou» et la «Comtesse de Charny». Cette grande fresque, tr?s int?ressante sur le plan historique, captivante par son r?cit, a une grande force inventive et une port?e symbolique certaine.
«Joseph Balsamo» s'ouvre en 1770 sur un Prologue ?sot?rique: sur le mont Tonnerre sont r?unis les chefs de la franc-ma?onnerie universelle. Un inconnu qui se pr?sente comme le nouveau Messie, l'homme-Dieu – «Je suis celui qui est» -, proph?tise la R?volution universelle, qui sera lanc?e par la France, o? il se charge de devenir l'agent de la Providence. Cet inconnu s'appelle Joseph Balsamo, alias Cagliostro.
Trois trames vont s'entrem?ler tout au long du roman:
La lutte pour le pouvoir entre le parti de la dauphine, Marie-Antoinette, et celui de la Du Barry.
L'amour malheureux de Gilbert, petit paysan ambitieux, pour la belle Andr?e de Taverney, et le roman d'apprentissage de Gilbert qui, ayant suivi Andr?e ? Paris, devient d'abord le jouet de la Du Barry, puis est adopt? par son p?re spirituel, le philosophe Jean-Jacques Rousseau.
Enfin, le drame qui se joue entre Balsamo, Lorenza – m?dium qui assure, gr?ce ? son don de double vue, la puissance de Balsamo, qui le hait lorsqu'elle est ?veill?e et l'adore lorsqu'elle est endormie – et Althotas – qui cherche l'?lixir de longue vie, pour lequel il lui faut le sang d'une vierge…
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– Moi! s’écria Gilbert.
– Non, rien, Philippe, répondit Andrée, non; il n’a rien fait, mon père s’égare. M. Gilbert n’est plus à notre service, il a donc parfaitement le droit d’être où il lui plaît d’aller. Mon père ne veut pas comprendre cela, et, en le retrouvant ici, il s’est mis en colère.
– C’est là tout? demanda Philippe.
– Absolument, mon frère, et je ne comprends rien au courroux de M. de Taverney, surtout à un pareil propos et quand choses et gens ne méritent pas même un regard. Voyez, Philippe, si nous avançons.
Le baron se tut, dompté par la sérénité toute royale de sa fille.
Gilbert baissa la tête, écrasé par ce mépris. Il y eut un éclair qui passa à travers son cœur et qui ressemblait à celui de la haine. Il eût préféré un coup mortel de l’épée de Philippe, et même un coup sanglant de son fouet.
Il faillit s’évanouir.
Par bonheur, en ce moment, la harangue était achevée; il en résulta que les carrosses reprirent leur mouvement.
Celui du baron s’éloigna peu à peu, d’autres le suivirent; Andrée s’effaçait comme dans un rêve.
Gilbert demeura seul, prêt à pleurer, prêt à rugir, incapable, il le croyait du moins, de soutenir le poids de son malheur.
Alors une main se posa sur son épaule.
Il se retourna et vit Philippe, qui, ayant mis pied à terre et donné son cheval à tenir à un soldat de son régiment, revenait tout souriant à lui.
– Voyons, qu’est-il donc arrivé, mon pauvre Gilbert, et pourquoi es-tu à Paris?
Ce ton franc et cordial toucha le jeune homme.
– Eh! monsieur, dit-il avec un soupir arraché à son stoïcisme farouche, qu’eussé-je fait à Taverney? Je vous le demande. J’y fusse mort de désespoir, d’ignorance et de faim!
Philippe tressaillit, car son esprit impartial était frappé, comme l’avait été Andrée, du douloureux abandon où l’on avait laissé le jeune homme.
– Et tu crois donc réussir à Paris, pauvre enfant, sans argent, sans protection, sans ressources?
– Je le crois, monsieur; l’homme qui veut travailler meurt rarement de faim, là où il y a d’autres hommes qui désirent ne rien faire.
Philippe tressaillit à cette réponse. Jamais il n’avait vu dans Gilbert qu’un familier sans importance.
– Manges-tu, au moins? dit-il.
– Je gagne mon pain, monsieur Philippe, et il n’en faut pas davantage à celui qui ne s’est jamais fait qu’un reproche, c’est de manger celui qu’il ne gagnait pas.
– Tu ne dis pas cela, je l’espère, pour celui qu’on t’a donné à Taverney, mon enfant? Ton père et ta mère étaient de bons serviteurs du château, et toi même te rendais facilement utile.
– Je ne faisais que mon devoir, monsieur.
– Écoute, Gilbert, continua le jeune homme; tu sais que je t’ai toujours aimé; je t’ai toujours vu autrement que les autres; est-ce à tort? est-ce à raison? l’avenir me l’apprendra. Ta sauvagerie m’a paru délicatesse; ta rudesse, je l’appelle fierté.
– Ah! monsieur le chevalier! fit Gilbert respirant.
– Je te veux donc du bien, Gilbert.
– Merci, monsieur.
– J’étais jeune comme toi, malheureux comme toi dans ma position; de là vient peut-être que je t’ai compris. La fortune un jour m’a souri; eh bien, laisse-moi t’aider, Gilbert, en attendant que la fortune te sourie à ton tour.
– Merci, merci, monsieur.
– Que veux-tu faire? Voyons, tu es trop sauvage pour te mettre en condition.
Gilbert secoua la tête avec un méprisant sourire.
– Je veux étudier, dit-il.
– Mais, pour étudier, il faut des maîtres, et, pour payer des maîtres, il faut de l’argent.
– J’en gagne, monsieur.
– Tu en gagnes! dit Philippe en souriant; et combien gagnes-tu? Voyons!
– Je gagne vingt-cinq sous par jour, et j’en puis gagner trente et même quarante.
– Mais c’est tout juste ce qu’il faut pour manger.
Gilbert sourit.
– Voyons, je m’y prends mal peut-être pour t’offrir mes services.
– Vos services à moi, monsieur Philippe?
– Sans doute, mes services. Rougis-tu de les accepter?
Gilbert ne répondit point.
– Les hommes sont ici-bas pour s’entraider, continua Maison-Rouge; ne sont-ils pas frères?
Gilbert releva la tête et attacha ses yeux si intelligents sur la noble figure du jeune homme.
– Ce langage t’étonne? dit Philippe.
– Non, monsieur, dit Gilbert, c’est le langage de la philosophie; seulement, je n’ai pas l’habitude de l’entendre chez des gens de votre condition.
– Tu as raison, et cependant ce langage est celui de notre génération. Le dauphin lui-même partage ces principes. Voyons, ne fais pas le fier avec moi, continua Philippe, et ce que je t’aurai prêté, tu me le rendras plus tard. Qui sait si tu ne seras pas un jour un Colbert ou un Vauban?
– Ou un Tronchin, dit Gilbert.
– Soit. Voici ma bourse, partageons.
– Merci, monsieur, dit l’indomptable jeune homme, touché, sans vouloir en convenir, de cette admirable expansion de Philippe; merci, je n’ai besoin de rien; seulement… seulement, je vous suis reconnaissant bien plus que si j’eusse accepté votre offre, soyez-en sûr.
Et là-dessus, saluant Philippe stupéfait, il regagna vivement la foule, dans laquelle il se perdit.
Le jeune capitaine attendit plusieurs secondes, comme s’il ne pouvait en croire ni ses yeux ni ses oreilles; mais, voyant que Gilbert ne reparaissait point, il remonta sur son cheval et regagna son poste.
