Les Tribulations DUn Chinois En Chine

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Les Tribulations DUn Chinois En Chine
Название: Les Tribulations DUn Chinois En Chine
Автор: Verne Jules
Дата добавления: 16 январь 2020
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Les Tribulations DUn Chinois En Chine - читать бесплатно онлайн , автор Verne Jules

Le richissime Chinois Kin-Fo vient de se trouver soudainement ruin?. La vie, qui lui paraissait jusqu'alors insipide, lui devient insupportable. Il contracte une assurance vie de 200 000 dollars en faveur de sa fianc?e L?-ou et du philosophe Wang, son mentor et ami ? qui il demande de le tuer dans un d?lai de deux mois, tout en lui remettant une lettre qui l'innocentera de ce meurtre. Avant le d?lai imparti, Kin-Fo recouvre sa fortune, doubl?e. Il n'est plus question pour lui de renoncer ? la vie. Mais Wang a disparu avec la lettre et il n'est pas homme ? rompre une promesse! Voil? donc Kin-Fo condamn? ? mort, par ses propres soins! Une seule ressource: retrouver Wang. Et Kin-Fo de se lancer dans le plus haletant des p?riples au pays du C?leste Empire. R?cit alerte ? l'intrigue parfaitement bien men?e, Les tribulations d'un Chinois en Chine est un des joyaux des " Voyages extraordinaires " du grand Jules Verne.

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Le chanteur changeait de physionomie et semblait vieillir à chaque strophe. On le couvrait d'applaudissements.

Il continua: «A la troisième veille, la lune éclaire l'espace. Kin-Fo a soixante ans. Après les feuilles vertes de l'été, les jaunes chrysanthèmes de la saison d'automne!

«A la quatrième veille, la lune est tombée à l'ouest. Kin-Fo a quatre-vingts ans! Son corps est recroquevillé comme une crevette dans l'eau bouillante! Il décline! Il décline avec l'astre de la nuit!

«A la cinquième veille, les coqs saluent l'aube naissante.

Kin-Fo a cent ans. Il meurt, son plus vif désir accompli; mais le dédaigneux prince Ien refuse de le recevoir. Le prince Ien n'aime pas les gens si âgés, qui radoteraient à sa cour! Le vieux Kin-Fo, sans pouvoir se reposer jamais, erre toute l'éternité!»

Et la foule d'applaudir, et le chanteur de vendre par centaines sa complainte à trois sapèques l'exemplaire!

Et pourquoi Kin-Fo ne l'achèterait-il pas? Il tira quelque menue monnaie de sa poche, et, la main pleine, il allongea le bras à travers les premiers rangs de la foule.

Soudain, sa main s'ouvrit! Les piécettes lui échappèrent et tombèrent sur le sol…

En face de lui, un homme était là, dont les regards se croisèrent avec les siens.

«Ah!» s'écria Kin-Fo, qui ne put retenir cette exclamation, à la fois interrogative et exclamative.

Fry-Craig l'avaient entouré, le croyant reconnu, menacé, frappé, mort peut-être!

«Wang! cria-t-il.

– Wang!» répétèrent Craig-Fry.

C'était Wang, en personne! Il venait d'apercevoir son ancien élève; mais, au lieu de se précipiter sur lui, il repoussa vigoureusement les derniers rangs du groupe, et s'enfuit, au contraire, de toute la vitesse de ses jambes, qui étaient longues!

Kin-Fo n'hésita pas. Il voulut avoir le cœur net de son intolérable situation, et se mit à la poursuite de Wang, escorté de Fry-Craig, qui ne voulaient ni le dépasser, ni rester en arrière.

Eux aussi, ils avaient reconnu l'introuvable philosophe, et compris, à la surprise que celui-ci venait de manifester, qu'il ne s'attendait pas plus à voir Kin-Fo, que Kin-Fo ne s'attendait à le trouver là.

Maintenant, pourquoi Wang fuyait-il? C'était assez inexplicable, mais enfin il fuyait, comme si toute la police du Céleste Empire eût été sur ses talons.

Ce fut une poursuite insensée.

«Je ne suis pas ruiné! Wang, Wang! Pas ruiné! criait Kin-Fo.

– Riche! riche!» répétaient Fry-Craig.

Mais Wang se tenait à une trop grande distance pour entendre ces mots, qui auraient dû l'arrêter. Il franchit ainsi le quai, le long du canal, et atteignit l'entrée du faubourg de l'Ouest.

Les trois poursuivants volaient sur ses pas, mais ne gagnaient rien. Au contraire, le fugitif menaçait plutôt de les distancer.

Une demi-douzaine de Chinois s'étaient joints à Kin-Fo, sans compter deux ou trois couples de tipaos, prenant pour quelque malfaiteur un homme qui détalait si bien.

Curieux spectacle que celui de ce groupe haletant, criant, hurlant, s'accroissant en route de nombreux volontaires!

Autour du chanteur, on avait parfaitement entendu Kin-Fo prononcer ce nom de Wang. Heureusement, le philosophe n'avait pas riposté par celui de son élève, car toute la ville se fût lancée sur les pas d'un homme si célèbre. Mais le nom de Wang, subitement révélé, avait suffi. Wang! c'était cet énigmatique personnage, dont la découverte valait une énorme récompense! On le savait. De telle sorte que, si Kin-Fo courait après les huit cent mille dollars de sa fortune, Craig-Fry, après les deux cent mille de l'assurance, les autres couraient après les deux mille de la prime promise, et, l'on en conviendra, c'était là de quoi donner des jambes à tout ce monde.

«Wang! Wang! Je suis plus riche que jamais! disait toujours Kin-Fo, autant que le lui permettait la rapidité de sa course.

– Pas ruiné! pas ruiné! répétaient Fry-Craig.

– Arrêtez! arrêtez!» criait le gros des poursuivants, qui faisait la boule de neige en route.

Wang n'entendait rien. Les coudes collés à la poitrine, il ne voulait ni s'épuiser à répondre, ni rien perdre de sa vitesse pour le plaisir de tourner la tête.

Le faubourg fut dépassé. Wang se jeta sur la route dallée qui longe le canal. Sur cette route, alors presque déserte, il avait le champ libre. La vivacité de sa fuite s'accrut encore; mais, naturellement aussi, l'effort des poursuivants redoubla.

Cette course folle se soutint pendant près de vingt minutes. Rien ne pouvait laisser prévoir quel en serait le résultat. Cependant, il parut que le fugitif commençait à faiblir un peu. La distance, qu'il avait maintenue jusqu'à ce moment entre ses poursuivants et lui, tendait à diminuer.

Aussi Wang, sentant cela, fit-il un crochet et disparut-il derrière l'enclos verdoyant d'une petite pagode, sur la droite de la route.

«Dix mille taëls à qui l'arrêtera! cria Kin-Fo.

– Dix mille taëls! répétèrent Craig-Fry.

– Ya! ya! ya!» hurlèrent les plus avancés du groupe.

Tous s'étaient jetés de côté, sur les traces du philosophe, et contournaient le mur de la pagode.

Wang avait reparu. Il suivait un étroit sentier transversal, le long d'un canal d'irrigation, et, pour dépister les poursuivants, il fit un nouveau crochet qui le replaça sur la route dallée.

Mais, là, il fût visible qu'il s'épuisait, car il retourna la tête à plusieurs reprises. Kin-Fo, Craig et Fry, eux, n'avaient point faibli. Ils allaient, ils volaient, et pas un des rapides coureur de taëls ne parvenait à prendre sur eux quelques pas d'avance.

Le dénouement approchait donc. Ce n'était plus qu'une affaire de temps, et d'un temps relativement court, quelques minutes au plus.

Tous, Wang, Kin-Fo, ses compagnons, étaient arrivés à l'endroit où la grande route franchit le fleuve sur le célèbre pont de Palikao.

Dix-huit ans plus tôt, le 21 septembre 1860, ils n'auraient pas eu leurs coudées franches sur ce pont de la province de Pé-Tché-Li. La grande chaussée était alors encombrée de fuyards d'une autre espèce. L'armée du général San-Ko-Li-Tzin, oncle de l'empereur, repoussée par les bataillons français, avait fait halte sur ce pont de Palikao, magnifique œuvre d'art, à balustrade de marbre blanc, que borde une double rangée de lions gigantesques. Et ce fut là que ces Tartares Mantchoux, si incomparablement braves dans leur fatalisme, furent broyés par les boulets des canons européens.

Mais le pont, qui portait encore les marques de la bataille sur ses statues écornées, était libre alors.

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