Les Mysteres De Paris Tome IV
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Voici un roman mythique, presque ? l'?gal du Comte de Monte-Cristo ou des Trois mousquetaires, un grand roman d'aventures, foisonnant, qui nous d?crit un Paris myst?rieux et inconnu, d?voil? dans ses recoins les plus secrets, un Paris exotique o? les apaches de Paris remplacent ceux de l'Am?rique.
Errant dans les rues sombres et dangereuses de la Cit?, d?guis? en ouvrier, le prince Rodolphe de G?rolstein sauve une jeune prostitu?e, Fleur-de-Marie, dite la Goualeuse, des brutalit?s d'un ouvrier, le Chourineur. Sans rancune contre son vainqueur, le Chourineur entra?ne Rodolphe et Fleur-de-Marie dans un tripot, Au Lapin Blanc. L?, le Chourineur et Fleur-de-Marie content leur triste histoire ? Rodolphe. Tous deux, livr?s d?s l'enfance ? l'abandon et ? la mis?re la plus atroce, malgr? de bons instincts, sont tomb?s dans la d?gradation: le meurtre pour le Chourineur, dans un moment de violence incontr?l?e, la prostitution pour Fleur-de-Marie. Rodolphe se fait leur protecteur et entreprend de les r?g?n?rer en les arrachant ? l'enfer du vice et de la mis?re o? ils sont plong?s…
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XIII Punition
Nous conduirons de nouveau le lecteur dans l’étude du notaire Jacques Ferrand.
Grâce à la loquacité habituelle des clercs, presque incessamment occupés des bizarreries croissantes de leur patron, nous exposerons ainsi les faits accomplis depuis la disparition de Cecily.
– Cent sous contre dix que, si son dépérissement continue, avant un mois le patron aura crevé comme un mousquet?
– Le fait est que, depuis que la servante qui avait l’air d’une Alsacienne a quitté la maison, il n’a plus que la peau sur les os.
– Et quelle peau!
– Ah çà! il était donc amoureux de l’Alsacienne, alors, puisque c’est depuis son départ qu’il se racornit ainsi?
– Lui! le patron, amoureux? Quelle farce!!!
– Au contraire, il se remet à voir des prêtres plus que jamais!
– Sans compter que le curé de la paroisse, un homme bien respectable, il faut être juste, s’en est allé (je l’ai entendu), en disant à un autre prêtre qui l’accompagnait: «C’est admirable!… M. Jacques Ferrand est l’idéal de la charité et de la générosité sur la terre…»
– Le curé a dit ça? De lui-même? Et sans effort?
– Quoi?
– Que le patron était l’idéal de la charité et de la générosité sur la terre?…
– Oui, je l’ai entendu…
– Alors je n’y comprends plus rien; le curé a la réputation, et il la mérite, d’être ce qu’on appelle un vrai bon pasteur…
– Oh! ça, c’est vrai, et de celui-là faut parler sérieusement et avec respect! Il est aussi bon et aussi charitable que le Petit-Manteau-Bleu [42], et quand on dit ça d’un homme, il est jugé.
– Et ça n’est pas peu dire.
– Non. Pour le Petit-Manteau-Bleu comme pour le bon prêtre, les pauvres n’ont qu’un cri… et un brave cri du cœur.
– Alors j’en reviens à mon idée. Quand le curé affirme quelque chose, il faut le croire, vu qu’il est incapable de mentir; et pourtant, croire d’après lui que le patron est charitable et généreux… ça me gêne dans les entournures de ma croyance.
– Oh! que c’est joli, Chalamel! Oh! que c’est joli!…
– Sérieusement, j’aime autant croire à cela qu’à un miracle… Ce n’est pas plus difficile.
– M. Ferrand, généreux!… Lui… qui tondrait sur un œuf!
– Pourtant, messieurs, les quarante sous de notre déjeuner?
– Belle preuve! C’est comme lorsqu’on a par hasard un bouton sur le nez… C’est un accident.
– Oui; mais d’un autre côté, le maître clerc m’a dit que depuis trois jours le patron a réalisé une énorme somme en bons du Trésor, et que…
– Eh bien?
– Parle donc…
– C’est que c’est un secret…
– Raison de plus… Ce secret?
– Votre parole d’honneur que vous n’en direz rien?…
– Sur la tête de nos enfants, nous la donnons.
– Que ma tante Messidor fasse des folies de son corps si je bavarde!
– Et puis, messieurs, rapportons-nous à ce que disait majestueusement le grand roi Louis XIV au doge de Venise, devant sa cour assemblée:
Lorsqu’un secret est possédé par un clerc,
Ce secret, il doit le dire, c’est clair.
– Allons, bon! voilà Chalamel avec ses proverbes!
– Je demande la tête de Chalamel!
– Les proverbes sont la sagesse des nations; c’est à ce titre que j’exige ton secret.
– Voyons, pas de bêtises… Je vous dis que le maître clerc m’a fait promettre de ne dire à personne…
– Oui, mais il ne t’a pas défendu de le dire à tout le monde?
– Enfin ça ne sortira pas d’ici. Va donc!…
– Il meurt d’envie de nous le dire, son secret.
– Eh bien! le patron vend sa charge; à l’heure qu’il est, c’est peut-être fait!…
– Ah! bah!
– Voilà une drôle de nouvelle!…
– C’est renversant!
– Éblouissant!
– Voyons, sans charge, qui se charge de la charge dont il se décharge?
– Dieu! que ce Chalamel est insupportable avec ses rébus!
– Est-ce que je sais à qui il la vend?
– S’il la vend, c’est qu’il veut peut-être se lancer, donner des fêtes… des routes, comme dit le beau monde.
– Après tout, il a de quoi.
– Et pas la queue d’une famille.
– Je crois bien qu’il a de quoi! Le maître clerc parle de plus d’un million y compris la valeur de la charge.
– Plus d’un million, c’est caressant.
– On dit qu’il a joué à la Bourse en catimini, avec le commandant Robert, et qu’il a gagné beaucoup d’argent.
– Sans compter qu’il vivait comme un ladre.
– Oui; mais ces ladrichons-là, une fois qu’ils se mettent à dépenser, deviennent plus prodigues que les autres.
– Aussi, je suis comme Chalamel; je croirais assez que maintenant le patron veut la passer douce.
– Et il aurait joliment tort de ne pas s’abîmer de volupté et de ne pas se plonger dans les délices de Golconde… s’il en a le moyen… car, comme dit le vaporeux Ossian dans la grotte de Fingal:
Tout notaire qui bambochera,
S’il a du quibus raison aura.
– Je demande la tête de Chalamel!
– C’est absurde!
– Avec ça que le patron a joliment l’air de penser à s’amuser.
– Il a une figure à porter le diable en terre!
– Et puis M. le curé qui vante sa charité!
– Eh bien! charité bien ordonnée commence par soi-même… Tu ne connais donc seulement pas tes commandements de Dieu, sauvage? Si le patron se demande à lui-même l’aumône des plus grands plaisirs… il est de son devoir de se les accorder… ou il se regarderait comme bien peu…
– Moi, ce qui m’étonne, c’est cet ami intime qui lui est comme tombé des nues, et qui ne le quitte pas plus que son ombre…
– Sans compter qu’il a une mauvaise figure…