Les Mysteres De Paris Tome III
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Voici un roman mythique, presque ? l'?gal du Comte de Monte-Cristo ou des Trois mousquetaires, un grand roman d'aventures, foisonnant, qui nous d?crit un Paris myst?rieux et inconnu, d?voil? dans ses recoins les plus secrets, un Paris exotique o? les apaches de Paris remplacent ceux de l'Am?rique.
Errant dans les rues sombres et dangereuses de la Cit?, d?guis? en ouvrier, le prince Rodolphe de G?rolstein sauve une jeune prostitu?e, Fleur-de-Marie, dite la Goualeuse, des brutalit?s d'un ouvrier, le Chourineur. Sans rancune contre son vainqueur, le Chourineur entra?ne Rodolphe et Fleur-de-Marie dans un tripot, Au Lapin Blanc. L?, le Chourineur et Fleur-de-Marie content leur triste histoire ? Rodolphe. Tous deux, livr?s d?s l'enfance ? l'abandon et ? la mis?re la plus atroce, malgr? de bons instincts, sont tomb?s dans la d?gradation: le meurtre pour le Chourineur, dans un moment de violence incontr?l?e, la prostitution pour Fleur-de-Marie. Rodolphe se fait leur protecteur et entreprend de les r?g?n?rer en les arrachant ? l'enfer du vice et de la mis?re o? ils sont plong?s…
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– Ah bah!…, vraiment? dit le comte avec une ironie farouche.
– Vous ne me croyez pas, mon père?
– C’était bien tôt ou bien tard! ajouta le vieillard toujours impassible et dans la même attitude.
Florestan, pensant avoir ému son père en lui parlant de son projet de suicide, crut nécessaire de remonter la scène par un coup de théâtre.
Il ouvrit un meuble, y prit un petit flacon de cristal verdâtre et dit au comte en le posant sur la table:
– Un charlatan italien m’a vendu ce poison…
– Et… il était pour vous… ce poison? dit le vieillard toujours accoudé.
Florestan comprit la portée des paroles de son père.
Ses traits exprimèrent cette fois une indignation réelle, car il disait vrai.
Un jour, il avait eu la fantaisie de se tuer: fantaisie éphémère! Les gens de sa sorte sont trop lâches pour se résoudre froidement et sans témoins à la mort qu’ils affrontent par point d’honneur dans un duel.
Il s’écria donc avec l’accent de la vérité:
– Je suis tombé bien bas… mais du moins pas jusque-là, mon père! C’était pour moi que je réservais ce poison!
– Et vous avez eu peur? fit le comte sans changer de position.
– Je l’avoue, j’ai reculé devant cette extrémité terrible; rien n’était encore désespéré: les personnes auxquelles je devais étaient riches et pouvaient attendre… À mon âge, avec mes relations, j’espérai un moment, sinon refaire ma fortune, du moins m’assurer une position honorable, indépendante, qui m’en eût tenu lieu… Plusieurs de mes amis, peut-être moins bien doués que moi, avaient fait un chemin rapide dans la diplomatie. J’eus une velléité d’ambition… Je n’eus qu’à vouloir, et je fus attaché à la légation de Gerolstein… Malheureusement, quelques jours après cette nomination, une dette de jeu contractée envers un homme que je haïssais me mit dans un cruel embarras… J’avais épuisé mes dernières ressources… Une idée fatale me vint. Me croyant certain de l’impunité, je commis une action infâme… Vous le voyez… mon père… je ne vous ai rien caché… j’avoue l’ignominie de ma conduite, je ne cherche à l’atténuer en rien… Deux partis me restent à prendre, et je suis également décidé à tous deux… Le premier est de me tuer… et de laisser votre nom déshonoré, car si je ne paie pas aujourd’hui même vingt-cinq mille francs, la plainte est déposée, l’éclat a lieu, et, mort ou vivant, je suis flétri. Le second moyen est de me jeter dans vos bras, mon père… de vous dire: «Sauvez votre fils, sauvez votre nom de l’infamie… et je vous jure de partir demain pour l’Afrique, de m’y engager soldat et d’y trouver la mort ou de vous revenir un jour vaillamment réhabilité…» Ce que je vous dis là, mon père, voyez-vous, est vrai… En présence de l’extrémité qui m’accable, je n’ai pas d’autre parti… Décidez… ou je mourrai couvert de honte, ou, grâce à vous… je vivrai pour réparer ma faute… Ce ne sont pas là des menaces et des paroles de jeune homme, mon père… J’ai vingt-cinq ans, je porte votre nom, j’ai assez de courage ou pour me tuer… ou pour me faire soldat, car je ne veux pas aller au bagne…
Le comte se leva.
– Je ne veux pas que mon nom soit déshonoré, dit-il froidement à Florestan.
– Ah! mon père!… Mon sauveur, s’écria chaleureusement le vicomte; et il allait se précipiter dans les bras de son père, lorsque celui-ci, d’un geste glacial, calma cet entraînement.
– On vous attend jusqu’à trois heures… chez cet homme qui a le faux?
– Oui, mon père… il est deux heures…
– Passons dans votre cabinet… donnez-moi de quoi écrire.
– Voici, mon père.
Le comte s’assit devant le bureau de Florestan et écrivit d’une main ferme:
«Je m’engage à payer ce soir à dix heures les vingt-cinq mille francs que doit mon fils.
«Comte de SAINT-REMY»
– Votre créancier ne veut que de l’argent; malgré ses menaces, cet engagement de moi le fera consentir à un nouveau délai; il ira chez M. Dupont, banquier, rue de Richelieu, n° 7, qui lui répondra de la valeur de cet acte.
– Ô mon père!… Comment jamais…
– Vous m’attendrez ce soir… à dix heures, je vous apporterai l’argent… Que votre créancier se trouve ici…
– Oui, mon père: et après-demain je pars pour l’Afrique… Vous verrez si je suis ingrat!… Alors, peut-être, lorsque je serai réhabilité, vous accepterez mes remerciements.
– Vous ne me devez rien; j’ai dit que mon nom ne serait pas déshonoré davantage; il ne le sera pas, dit simplement M. de Saint-Remy en prenant sa canne qu’il avait déposée sur le bureau; et il se dirigea vers la porte.
– Mon père, votre main, au moins! reprit Florestan d’un ton suppliant.
– Ici, ce soir, à dix heures, dit le comte en refusant sa main.
Et il sortit.
– Sauvé!… s’écria Florestan radieux. Sauvé! Puis il reprit, après un moment de réflexion: Sauvé à peu près… N’importe, c’est toujours cela… Peut-être ce soir lui avouerai-je l’autre chose. Il est en train… il ne voudra pas s’arrêter en si beau chemin, et que son premier sacrifice reste inutile faute d’un second… Et encore, pourquoi lui dire?… Qui saura jamais?… Au fait, si rien ne se découvre, je garderai l’argent qu’il me donnera pour éteindre cette dernière dette… J’ai eu de la peine à l’émouvoir, ce diable d’homme!!! L’amertume de ses sarcasmes m’avait fait douter de sa bonne résolution; mais ma menace de suicide, la crainte de voir son nom flétri, l’ont décidé; c’était bien là qu’il fallait frapper… Il est sans doute beaucoup moins pauvre qu’il n’affecte de l’être… S’il possède une centaine de mille francs, il a dû faire des économies en vivant comme il vit… Encore une fois, sa venue est un coup du sort… Il a l’air sauvage, mais au fond je le crois bon homme… Courons chez cet huissier!
Il sonna. M. Boyer parut.
– Comment ne m’avez-vous pas averti que mon père était ici? Vous êtes d’une négligence…
– Par deux fois j’ai voulu adresser la parole à monsieur le vicomte, qui rentrait avec M. Badinot par le jardin; mais monsieur le vicomte, probablement préoccupé de son entretien avec M. Badinot, m’a fait signe de la main de ne pas l’interrompre… Je ne me suis pas permis d’insister… Je serais désolé que monsieur le vicomte pût me croire coupable de négligence…
– C’est bien… Dites à Edwards de me faire tout de suite atteler Orion, non, Plower au cabriolet.
M. Boyer s’inclina respectueusement.
Au moment où il allait sortir, on frappa.
M. Boyer regarda le vicomte d’un air interrogatif.
– Entre! dit Florestan.
Un second valet de chambre parut, tenant à la main un petit plateau de vermeil.